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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le Monde d'hier, livre testament autobiographique, débuté en septembre 1939, montre que Stefan Zweig en tant qu'écrivain juif autrichien, humaniste et pacifique, fut le témoin malmené d'une époque sismique.

Stefan Zweig qui débute son récit par Vienne aux temps heureux, avant la grande Guerre, quand la ville était tournée vers la création artistique la plus exigeante. Un dynamisme culturel soutenu par la bourgeoisie juive fortunée, polyglotte et cultivée dont Zweig faisait partie avec ses amis, tous assoiffés d'un renouveau artistique mais attachés à un conservatisme politique.

Une situation politique et sociale en apparence immuable bientôt bousculée par l'apparition d'un parti socialiste autrichien auquel s'opposent un parti chrétien-social, petit bourgeois et antisémite, et plus anti juif encore, un parti national-allemand agressif, dont Hitler devait reprendre les méthodes brutales et la théorie raciale antisémite : « La saloperie c'est la race ».

A l'époque Zweig, étudiant en philosophie, n'est pas encore sensible à ce danger émergent. Il commence à publier et est heureux de cette reconnaissance. Mais la découverte de Berlin de ses idées nouvelles et de son atmosphère épicée le poussent à se remettre en cause ; il décide de « commencer par apprendre du monde ce qu'il a d'essentiel ». Il traduit Baudelaire, Verlaine, Keats, voyage en Europe, en Inde en Amérique en Afrique, découvre Émile Verhaeren dont l'enthousiasme pour le monde moderne le fascine, devient l'ami de Paul Valéry, Romain Rolland, Rilke, qu'il admire profondément, et de tant d'autres.

Une curiosité et une quête intellectuelles qui ne se démentiront jamais au cours de sa vie. Mais si Stefan Zweig témoigne de joies incomparables, de rencontres et de lectures merveilleuses, de voyages oh combien enrichissants, qui furent les siens pendant cinquante ans, les ouragans du monde, avec le gâchis de 1914, l'effondrement de l'empire austro-hongrois, les épouvantables régimes nationalistes et le sort inique qu'ils ont réservé aux juifs, auront raison de tout cela, et par conséquent de son envie de vivre. Et c'est assez émouvant.

Challenge MULTI-DÉFIS 2020
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« Le monde d'hier » s'ouvre sur une constatation douloureuse : avoir grandi dans un monde de paix porté par la foi dans le progrès n'en rend que plus amer le délitement qui s'en suit vers l'entre soi et la violence d'un univers qu'on croyait naïvement éternel.

S'il y a une chose que je ne m'attendais pas à trouver dans ces mémoires de Stefan Zweig, c'est cette résonnance entre sa génération et la mienne en matière de ressenti de l'époque ! Foudroyante entrée en matière donc, même si les similitudes s'arrêtent là, n'étant ni rentière, ni fine lettrée, ni autrichienne, et n'ayant pas eu la chance de pouvoir parcourir à loisir comme lui l'Europe et le monde à la rencontre des plus purs esprits de ce temps.

En dépit d'un certain élitisme, non pas lié au propos mais au parcours de vie, j'ai pris un très grand plaisir à ce voyage dans le temps sous la plume incisive, empathique et sensible de Stefan Zweig : c'est tout le 20ème siècle qui défile sous les yeux, de l'Autriche compassée mais si riche de culture et d'insouciance des années 1910 au Paris littéraire des années 20 (Zweig aimait Paris et ça se lit !), du fléau de la première guerre à la montée d'Hitler après l'épisode dévastateur de l'hyper inflation allemande.
Certes, Zweig vit dans une bulle et semble passer à travers les événements comme le nanti qu'il était, mais l'acuité compatissante de son regard (même si de là où il parle ce regard ne porte pas jusqu'au fond des sociétés qu'il observe), la puissance de ses convictions européennes et de fraternité forcent le respect. On compatit à sa souffrance de citoyen rendu apatride et d'homme de lettres blessé, et on se surprend même à une certaine nostalgie d'un temps où la force d'une pensée semblait encore avoir le pouvoir d'élever les âmes, et où l'on pouvait prendre le temps. Aurais-je vieilli ?
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J'aime beaucoup les nouvelles de Stefan Zweig et j'étais curieuse de découvrir un peu son parcours. Et c'était vraiment très intéressant ! C'est un autrichien privilégié qui va connaitre deux guerres mais aussi être témoin de la montée du fascisme et du nazisme. Et de ce fait son récit est vraiment prenant, c'est un témoignage fascinant d'évènements mondiaux comme ce jour où il apprend pratiquement en maillot de bain sur une plage belge l'entrée de son pays dans la première guerre mondiale. J'avais hâte à chaque fois de savoir comment il avait vécu tel ou tel évènement, il décrit bien l'ambiance du moment et cela diffère souvent avec ce que je pouvais imaginer. il livre par contre peu de choses sur sa vie intime, ses deux femmes sont à peine évoquées, tout comme la réaction de sa famille sur les tensions en Autriche. En tout cas c'est riche en anecdotes et en informations historiques sur une époque assez large qui va du tout début du XXéme siècle à la deuxième guerre mondiale. On y croise de nombreux artistes, écrivains, hommes politiques dont il était proche et on se dit le monde est petit pour celui qui peut voyager aussi facilement. C'est fascinant, poignant de revisiter des évènements de son point de vue. Cela me donne envie d'enchainer sur une petite biographie de lui.
Pioche dans ma PAL Février 2023
Challenge pavés 2023
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Ce qui est étonnant avec les livres, c'est que nous ne savons jamais à l'avance ce que va être notre ressenti à chaque lecture, et le Monde d'hier n'échappe pas, pour moi, à ce principe.

Je reste circonspect, partagé entre la satisfaction de ces écrits de Zweig, toujours très beau, et la déception de certains passages pour lesquels je n'ai pas réussi à m'intéresser.

Ouvrage autobiographique, écrit en 1941, alors que l'auteur est en exil au Brésil, Zweig porte son regard et son analyse sur le monde qu'il a connu durant ses soixante ans d'existence et qu'il a vu transformé de havre de paix en enfer sur terre. Il parcourt donc l'Autriche, son pays de naissance, et l'Europe, sa région d'adoption et de coeur, de la fin du XIXème siècle au début de la Seconde guerre mondiale.

Vienne, la bourgeoise de la Belle Epoque, qui vit, comme le reste de l'Europe, dans la tranquillité et l'assurance de la sécurité d'un état millénaire, et je vous renvoie à l'oeuvre de Roth, La Crypte des Capucins. Une période très paternaliste et misogyne mais en pleine révolution scientifique, industrielle et intellectuelle. Une époque qui reste très idéalisée par Zweig qui en tirera son éducation et surtout lui aura permis de développer un côté profondément humaniste. C'est le Temps des repères et des valeurs.

Il croyait en la culture européenne qui, par sa richesse, devait amener un monde meilleur. En avance sur son temps, il était pro-européen. Faisant fi des idéologies politiques, même les plus extrêmes, il voyait la bonté de l'Homme. Surpris par la Première guerre mondiale, il sera meurtri par la deuxième, et auparavant, par la montée du national-socialisme.

Stefan Zweig analyse ces soixante années vécues, à cheval sur deux siècles, partageant ses rencontres artistiques, moments du livre pour lesquelles j'ai eu de la lassitude dans ma lecture. Excepté ces passages, j'ai découvert un écrivain d'un très grand mérite, qui n'a jamais cherché à faire le « show ». Il a vécu en respectant des valeurs et il a cru en un idéal qu'il espérait voir fleurir et qui finalement sera piétiné. La vie ne pouvait plus être vécue. Stefan Zweig conclut désabusé son livre et sa vie, tout en conservant une note d'optimisme.

« Et celui qui avait passionnément travaillé toute sa vie à l'union des hommes et des esprits, en cette heure qui exigeait comme nulle autre une solidarité indestructible, se sentait, du fait de cet ostracisme subit, inutile et seul comme il ne l'avait jamais été dans sa vie […] Mais en fin de compte toute ombre n'est-elle pas aussi enfant de la lumière ? » [p.562-563]
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C'est à l'occasion d'un récent colloque organisé par le Collège des Bernardins a Paris et rassemblant une trentaines d'historiens de quinze nationalités différentes qui planchaient sur le sujet brûlant d'actualité: comment bâtir une histoire commune européenne, un nouveau récit pour l'Europe, qu'un des intervenants : Juan Manuel Bonet écrivain et critique d'art espagnol proposa une balade à travers 15 lieux de mémoire et de prolongement vivant de l'existence de la conscience européenne, balade passionnante sur laquelle je reviendrai, lorsque paraîtra l'ouvrage collectif issu notamment du colloque. Et dans cette balade il décrivit Vienne, ville de frontière, meurtrie par l'histoire et qui fut aussi lieux de paix et constructeur de la conscience européenne et de nous recommander au delà de cette évocation la lecture de " le monde d'hier, souvenir d'un européen " de Stefan Zweig.
Voici le point de départ de ma lecture, je m'y attarde tant il apparaît combien nous avons besoin aujourd'hui de la lucidité d'un Zweig.
Je cite un bref extrait de sa préface : " j'ai été élevé à Vienne, la métropole deux fois millénaire, capitale de plusieurs nations, et il m'a fallu la quitter comme un criminel avant qu'elle ne fut ravalée au rang d'une ville de province allemande. Mon oeuvre littéraire, dans sa langue originelle, a été réduite en cendre, dans ce pays même où mes livres s'étaient fait des amis de millions de lecteurs "
" contre ma volonté, j'ai été le témoin de la plus effroyable défaite de la raison et du plus sauvage
Triomphe de la brutalité qu'attendre la chronique du temps. Jamais une génération n'est tombée comme la notre d'une telle élévation spirituelle dans une telle décadence morale."

Son crime : être juif.
Dans une belle écriture, Stefan Zweig nous raconte non pas sa vie plutôt ses rencontres, ses passions, et nous explique en géostratége comment et dans le détail le passage de la belle époque, de la foi dans le progrès, du poids des intellectuels et des artistes à la terrifiante barbarie nazie et à la création du monde d'après guerre, du nationalisme bureaucratique et sans projet qu'il voyait se créer et qu'il ne voulut pas connaître, il se suicidera quelques jours après avoir déposé le manuscrit de " le monde d'hier" de ce qui est donc aussi son testament.

J'ai tout particulièrement apprécié :
- la description de Vienne, fin de siècle, à la fois capitale culturelle européenne mais engoncée et gouvernée en geriatrocratie...
- l'explication de pourquoi la psychanalyse freudienne fut inventée en Autriche: fruit de l'éducation sévère des élites creuset des complexes d'infériorité ..
- la rencontre des artistes tous jeunes et plus ou moins maudits : Paul Valéry, Hermann Behr, Munch, Debussy, Zola ...
- ses relations avec Émile Verhaeren et l'importance de l'acte de traduction
- Sa découverte de Paris, de Rodin et de l'héritage de la Révolution qui ne distingue pas le prolo du bourgeois dans leur citoyenneté
- Son éloge de la Suisse qui dans une fraternité simple accueille les nationalités différentes et les fond dans une honnête démocratie très concrète
- Sa fascination sur le passage à l'acte créatif chez les artistes, il deviendra un collectionneur hors pair pour amasser les témoins de ses premiers jets de créations musicales, littéraires et autres, il décrit ainsi Rodin sculptant dans des pages inoubliables. La recherche de la genèse puis du chemin créatif pour comprendre tant que faire se peut le résultat final ....
- Ses Explications détaillées de la chute de son pays pas assez démocratique et de la montée du nazisme et d'Hitler que ses créateurs ( industriels et anti communistes ) prirent pour leur pantin .... Un agitateur de brasserie devenu chancelier de transition !!!
- beaucoup d'émotion quand il parle de la mort de sa mère ( plus soignée car juive ) et de son grand désarroi d'exilé. Vous pouvez lire à ce propos mes citations de ce jour, sa radicalité contre les nationalismes, radicalité précisée, concrétisée, argumentée possède une grande force, très actuelle.

Bien sûr, cette critique ne fait qu'un petit survol, je ne peux que vous encourager à cette lecture, qui n'est pas si facile, elle est même parfois exigeante mais elle change le regard sur cette époque si proche de nous et qui en quelque sorte nous laisse dépositaire d'un testament qui très pudiquement nous passe un relais. Je ne sais pas si vous serez d'accord, nous n'avons pas course gagnée ! et cependant des espoirs que ne pouvaient plus entrevoir Stefan auraient pu bercer son grand âge, son choix de ne pas le vivre nous le rend sans doute encore plus proche. Pour ma part je n'oublierai jamais les convictions européennes de mon grand-père, son contemporain, qui "fit" les deux guerres et qui reprenait ma grand mère parlant des "boches", il la reprenait avec tendresse mais fermeté : il faut la paix pour nos petits enfants ! Nous avons eu un bel héritage ... A transmettre donc ! C'est aussi une sacrée responsabilité ...
Bonne lecture ...
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Le Monde d'hier, par Stefan Zweig. Ce livre n'est pas un roman, et davantage que des mémoires, c'est un document. Certes il est écrit à travers le regard de Stefan Zweig, lequel est pertinent et très personnel, mais il renseigne surtout sur toute une époque, le début du siècle, à Vienne en Autriche et plus généralement en Europe, dont il décrit la vie littéraire, entremêlée de considérations sur l'environnement social et historique.
Zweig, né en 1881, est issu d'un milieu viennois, aisé, bourgeois. Il est juif, s'en ressent peu, et pourtant son origine conditionnera, non pas son oeuvre, mais son destin, puisque, après avoir connu le succès, voire la gloire, pour ses romans, ses nouvelles, ses biographies, son théâtre, après avoir été reconnu comme un européen et un pacifiste convaincu par les milieux littéraires et artistiques, où il avait de multiples amis, après avoir vécu la première guerre mondiale comme un désastre humain et culturel, il a dû s'exiler, à la veille de la seconde guerre mondiale, chassé par les nazis, dépossédé de ses biens, anéanti par le désenchantement. Établi d'abord à Londres, puis au Brésil, il n'a pas supporté l'effondrement de ses rêves. Il s'est suicidé en 1942.
Son récit, d'une facture classique, chronologique, d'une écriture claire, riche, d'une précision remarquable au regard des années passées, relate la vie viennoise au début du siècle, marquée par l'insouciance, les multiples échanges au sein de l'élite culturelle, l'espoir généré par les progrès techniques et les productions et les échanges artistiques. Ami de Romain Rolland, autre grand pacifiste, Zweig supportera mal l'émergence puis l'affirmation de ce nationalisme qui finit en dévastation au coeur de l'Europe, en 14-18. La période suivante fut celle de l'apogée de l'écrivain: Zweig fut en effet un auteur à succès, traduit et vendu dans le monde entier. Il voyagea beaucoup, de capitale en capitale en Europe, en Inde, aux Amériques, il se fit beaucoup d'amis, des écrivains surtout mais aussi des musiciens, des peintres, des sculpteurs. le livre regorge de portraits fins, justes, parfois croustillants de multiples célébrités : Rainer Maria Rilke, Arthur Schnitzer, Émile Verhaeren, Auguste Rodin, Richard Strauss, Paul Valéry, Sigmund Freud, Walt Whitman, Maxim Gorki, et bien d'autres.
Mais ce qui frappe dans ce livre, c'est la discrétion de Stefan Zweig, sa pudeur : il ne dit rien de sa vie privée, ni de sa personne qu'il présente parfois comme peu sûr de lui, rongé par le doute, indigne de sa célébrité, mais dont on note pourtant le goût des mondanités, la sociabilité. Il parle peu de son oeuvre, de ce qui l'inspire, sinon à ses débuts antimilitaristes. C'est pourquoi je parlais au début de ce texte d'un document sur une période, d'un témoignage sur les moeurs artistiques du début du XXe siècle. Un témoignage toutefois teinté dans une première partie d'optimisme et d'insouciance, et dans une seconde partie de pessimisme et de désillusion. Un témoignage marqué par une grande lucidité quand au cours belliqueux de l'histoire, en grande partie fondé sur les humeurs guerrières, revanchardes des populations et de leurs dirigeants. Un livre tout à fait passionnant.
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Le monde d'hier, souvenirs d'un européen de Stefan Zweig
On suit la vie du jeune Stefan Zweig durant sa scolarité en Autriche, qu'il décrit comme particulièrement ennuyeuse avec cette impression permanente de ne rien apprendre, que le temps qu'il y passait était totalement inutile. Viendra ensuite l'université où il travaillera toujours aussi peu, s'arrangeant simplement et à minima pour valider son cursus.
Ainsi commence cette autobiographie d'un jeune juif autrichien né dans une famille aisée, le père est un industriel et la mère issue d'une famille qui possède une banque. C'est dans ce milieu hyper privilégié que va grandir Stefan Zweig dont les seuls intérêts dès le plus jeune âge sont la littérature et les arts en général. Passionné de poésie il fréquente les cercles où il pourra partager ses écrits et très rapidement proposera ses textes à de prestigieuses revues qui, à sa grande surprise accepteront de le publier. Viendront les voyages en Europe, France, Angleterre, Italie, les rencontres , Romain Rolland, Paul Valéry, Rilke et de nombreux autres. Puis viendront les années sombres, la guerre, la fin de la monarchie, l'espérance en 1919 que, malgré les soucis économiques, l'hyper inflation et les difficultés d'approvisionnement, cette guerre serait la dernière. Grand collectionneur d'autographes( de Vinci, Napoléon, Wagner, Balzac, Nietzsche…)et de manuscrits rares, Zweig va se trouver emporté dans ce tourbillon belliqueux qu'il n'aura pas vu venir et pour lequel, encore plus qu'un autre il n'était pas préparé. En tant que juif il ne se sentait pas menacé d'aucune façon avant la première guerre mondiale, peut-être vivait il dans un microcosme très protégé.
Beaucoup d'informations intéressantes notamment sur la monarchie austro hongroise de l'époque à laquelle Zweig a vécu, l'empereur François Joseph vieillissant, son neveu François Ferdinand héritier présomptif, détesté du peuple qui sera assassiné, la montée des nationalismes, les alliances incertaines.
Un livre que l'on parcourt avec plaisir, Zweig a rencontré à peu près tout ce que le monde de la poésie, des romans, peintres ou musiciens compte en Europe, beaucoup de ces noms célèbres à l'époque ont disparu des mémoires, et c'est un large panorama qu'il dresse de tous ces artistes.
Néanmoins ses réflexions politiques sur l'Europe m'ont paru par trop élitistes pour m'avoir réellement passionné. Ça reste du Zweig très bien construit et écrit, concis et intelligent comme toujours.
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Ce livre, écrit au Brésil en 1941, n'est pas qu'un récit autobiographique; il est surtout une réflexion sur les mécanismes qui sous-tendent les bouleversements du monde.
La génération de Stefan Zweig, celle qui est née à la fin du XIXème siècle, a connu les prémices et les soubresauts des deux guerres mondiales qui ont marqué l'histoire de l'Europe dans la 1ère partie du XXème.
Son parcours personnel, sa naissance dans une famille de la bourgeoisie juive viennoise, sa formation scolaire et universitaire, ses voyages à l'étranger, la fréquentation des grands intellectuels de son temps, tout cela lui donna très tôt le bagage nécessaire pour observer d'un oeil à la fois perspicace et douloureux les dérèglements internes de cette époque.
Le sous-titre du livre " Souvenirs d'un Européen" donne le ton. L'auteur, européen convaincu, en regardant monter les nationalismes et la xénophobie, en vivant lui-même l'exil, voit s'effriter ses plus belles convictions pour l'Europe.
Ce récit, par ailleurs bien écrit malgré quelques longueurs ici et là, a une valeur profondément actuelle.
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D'aucuns penseront que Stefan Zweig a un côté très irritant, du genre "moi je suis un intellectuel bourgeois pacifiste, ouvert sur le monde et tellement fier de ce que je suis, et je donne des leçons de géopolitique alors que je n'ai même pas été soldat." C'est pas faux. Mais bon, comme chacun d'entre nous, Zweig est le produit de son milieu: la bourgeoisie juive viennoise de la Belle époque. Ah la Belle époque ! C'est justement le propos du Monde d'hier car ces souvenirs d'un européen ne sont finalement pas une autobiographie mais plutôt le témoignage d'un contemporain ayant assisté à l'écroulement du monde, et pas seulement du sien.
D'abord Vienne la belle, la douce, la foisonnante, la capitale du grand empire austro-hongrois, celui qui règne sur une douzaine de peuples, les Habsbourg putain ! Ceux qui font frétiller Stéphane Bern et les mémères élevées à Sissi imperatrice. Vienne la vieille mais aussi Vienne l'avant-gardiste, celle de Hoffmanstahl, Rilke, Klimt, Malher... Dieu que ça m'a donné envie d'aller à Vienne ! Et puis 1914 et le premier effondrement, le fracas, la dislocation, la catastrophe, le fumier sur lequel poussera la brutalité crasse du nazisme. L'après guerre, ahurissant, tétanisant. Mais justement, c'est là que Zweig accède à la notoriété et à l'aisance. Il achète une maison à Salzbourg, à la frontière, d'où il peut presque voir, de l'autre côté de la vallée, le futur nid d'aigle d'Hitler. Comme il a les moyens de voyager, ça ne n'affecte pas trop au début mais, très vite, en Italie ou en Autriche, il assiste à des coups de force de jeunes paramilitaires issus de groupuscules haineux et furieux du traité de Versailles et de la crise (Hitler et ses sbires n'étaient que l'un d'entre eux). Et puis, de nouveau, c'est la descente aux enfers. L'histoire on la connaît tous, 100 fois on nous l'a racontée mais, la plus value d'un récit par Stefan Zweig c'est la langue, précise, imagée, magnifique.
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Le monde d'hier c'est Vienne d'avant 1914, d'avant les guerres mondiales, il y a déjà plus d'un siècle. La plume de Stephan Zweig est d'un lyrisme, d'une telle beauté que je ne peux que le recommander. Il mêle la poésie, l'Histoire, l'art, la littérature et on y croise ses amis comme Rilke, Freud ou encore Valéry, ce livre est un devoir de mémoire et un classique de la littérature, c'est parmi les livres de l'auteur, de loin mon préféré tant il est riche en histoires. Lui, juif, relatant la montée du nazisme, sentant venir les guerres à venir, un homme très éclairé pour son époque et pour la nôtre c'est un témoignage qui relate les horreurs subies par les juifs mais c'est aussi toute la poésie de la vie bourgeoise de l'époque. Se remémorant ses souvenirs de jeunesse, c'est à travers l'Europe que l'on voyage, et c'était passionnant à lire.
J'ai beaucoup aimé le fait qu'il reste une certaine objectivité dans ce livre, il n'y a pas un mot plus haut que l'autre envers une personne ou un groupe, c'est d'une grande sagesse de la part de l'auteur. Je ne peux que le recommander, rien que la plume de Zweig vaut le détour, elle est restée contemporaine et le restera.
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