L'interview a eu lieu sur le toit d'un hôtel, la nuit. Ils m'ont équipée d'un microphone et ont compté à rebours : cinq, quatre, trois, deux, un. [...]
- Je n'ai peur de personne. J'aurai mon éducation. Même si je dois m'asseoir par terre pour continuer ma scolarité. Je dois poursuivre mes études, et je le ferai.
Comment étais-je devenue aussi directe ? Je m'en suis étonnée. "Eh bien, Malala ! me suis-je dit, tu ne fais rien de mal. Tu parles en faveur de la paix, pour défendre tes droits, les droits des filles. Ce n'est pas mal. C'est ton devoir."
Après l'entretien, un ami de mon père lui a demandé :
- Quel âge a Malala ?
Quand mon père lui a répondu que j'avais onze ans, il a eu un choc.
- Elle est pakha jenai, a-t-il dit, sage au-dessus de son âge.
Puis il a demandé :
- Comment est-elle devenue ainsi ?
Mon père a répondu :
- Ce sont les circonstances qui l'ont rendue ainsi !
J'avais grandi en entendant prononcer le mot "terrorisme" mais je n'avais jamais compris ce qu'il pouvait signifier. Jusqu'à ce moment-là. Le terrorisme est différent de la guerre où les soldats se font face pour se battre. Le terrorisme, c'est la peur tout autour de soi. C'est aller se coucher le soir sans savoir quelles horreurs le lendemain apportera. C'est se réfugier avec sa famille dans la pièce centrale de la maison parce qu'on a décidé d'un commun accord que c'est l'endroit le plus sûr où se tenir. C'est descendre sa propre rue sans savoir à qui on peut faire confiance.
Le terrorisme, c'est la crainte, quand votre père passe la porte pour sortir le matin, de ne pas le voir revenir le soir. Désormais, l'ennemi était partout, les attaques venaient de nulle part.
Lui qui avait osé s'opposer aux talibans, il apprenait que, parfois, ne rien dire c'est parler tout aussi fort.
Je crois que tout le monde fait une erreur une fois dans sa vie. L’important est la leçon qu’on en retire.
Dans le Swat, beaucoup de gens voyaient du danger partout où ils regardaient. Mais ma famille n'envisageait pas la vie de cette façon. Nous percevions des possibilités. [...] Mon père et moi sommes du genre à nous émerveiller de tout.