Ce témoignage honnête et courageux porte comme sous-titre "Une Juive dans la tourmente de la Collaboration". Courageux parce que l'auteur,
Bernard Ullmann, n'avait aucune raison d'être fier d'une mère qui avait épousé un des pires collaborateurs français du régime nazi,
Fernand de Brinon, et qui à ce titre a été fusillé le 15 avril 1947 au fort de Montrouge à Arcueil.
L'auteur lui-même est né le 13 janvier 1922 d'un premier mariage de sa mère avec Claude André Ullmann qu'elle avait épousé en 1916 et dont elle a divorcé en novembre 1933. Il a eu un frère aîné Pierre Jérôme Ullmann (1920-1997).
Quant à Lisette de Brinon, elle est née Jeanne Louise Rachel Franck, le 23 avril 1896 à Paris, dans une famille de la grande bourgeoisie juive belge non pratiquante.
Fernand de Brinon est né le 16 août 1885 à Libourne dans une famille de la noblesse du Bourbonnais. Il a étudié sciences politiques et le droit et est devenu avocat et journaliste. Partisan d'un rapprochement franco-allemand, il a rencontré
Adolf Hitler en novembre 1933 et a formé 2 ans plus tard le Comité France-Allemagne.
Juste avant, le 15 novembre 1934 il avait marié Lisette Franck.
Déjà en juillet 1940, le ministre
Pierre Laval le nomme représentant du gouvernement français auprès du Haut-Commandement allemand. Une fonction qu'il gardera, tout en la rendant plus étendue, jusqu'à la fin de la guerre. Il est condamné en mars 1947 à l'indignité nationale et donc exécuté le mois suivant, à l'âge de 61 ans.
Par son mariage avec cet homme et sa conversion au catholicisme, Lisette devient en fait une "aryenne d'honneur", dans le sens de l'ouvrage de
Damien Roger au titre homonyme, que j'ai commenté ici le 16 juillet dernier.
L'ouvrage ou témoignage de
Bernard Ullmann, paru en février 2004, quatre ans avant son décès en décembre 2008, comporte, après un avant-propos, 8 chapitres plutôt courts et compte 222 pages, mais il n'y figure aucune photo, sauf bien sûr celle de la couverture où l'on voit la marquise de Brinon en plein travail.
Le premier chapitre "Tout va très mal, Madame la Marquise !" commence par la visite de l'auteur à sa mère, qui se trouve, fort contre son gré, dans une maison de retraite à Montmorency, où d'ailleurs elle est décédée le 26 mars 1982, à l'âge de 85 ans.
Ce sont les 10 pages de l'avant-propos que j'ai trouvé le plus révélateur et que je vous recommande en particulier.
Pour terminer mon billet, je mentionne la réponse de Lisette à la question de son fils à la page 24 : "Fernand, l'avez-vous aimé ?" "Mon chéri,... ça ne te regarde pas."