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Critique de boulaycarine


Auteure d'une trentaine de romans, Maud Tabachnik explore les noirceurs de l'esprit humain à travers ses romans politiques et historiques. Paru aux Éditions du Masque en 1999, LA MÉMOIRE DU BOURREAU vient d'être réédité chez J'ai lu. Une couverture évocatrice associée à un titre percutant, pour une première fois marquante …



Anton Strübell, ancien commandant de camp SS vit paisiblement comme un riche aristocrate sous la protection du gouvernement syrien.

Son fils Gerhardt vient recueillir ses abominables souvenirs afin de les diffuser sur Internet. Anton Strübell raconte … Son idéal, son combat, ses espoirs mais aussi sa vie d'homme, sa femme et ses enfants.

Mais au fil des entretiens, Gerhardt supporte de plus en plus mal le passé de son père, empreint de mort, de violence et de cruauté.

Rapatrié en Allemagne suite à un problème de santé, Anton Strübell est sauvé par le Docteur Klein et devra affronter la mémoire de l'Histoire.



Maud Tabachnik plante le décor de manière originale en ouvrant son roman directement par un dialogue. Une conversation entre un père et son fils, quoi de plus banal ? le tête-à-tête prend une tournure nettement moins ordinaire lorsque le père est un des principaux chefs SS rescapés de la guerre.

Pour rédiger LA MÉMOIRE DU BOURREAU l'auteure s'est glissée dans la peau d'un tortionnaire. Un homme qui par soumission a volé, déporté, torturé et tué. Un nazi convaincu, qui avait pour mission de donner la chasse aux Juifs désignés comme les principaux responsables de la pitoyable situation de l'Allemagne. Un soldat prêt à donner sa vie pour le Führer, qui admettait que sacrifier « les fruits pourris d'une récolte » était une décision qui s'avérait nécessaire, puisqu'elle ne concernait que des sous-hommes, des déchets de cette humanité qu'il fallait sauver. Un homme persuadé que le national-socialisme était l'espoir et qui pensait au destin grandiose qui l'attendait grâce au Führer. Un homme prêt à tout recommencer …

“Nous étions persuadés que le Reich allait durer mille ans ; que notre race dominerait, et montrerait le chemin. Nous voulions pour nos enfants ce qu'il y avait de mieux. Chaque ennemi que nous terrassions était une marche qui nous hissait plus haut vers la victoire. Que valaient pour nous ces populations misérables, que nos chefs nous désignaient comme n'appartenant pas à l'humanité, et dont il fallait se défaire ? Nous voulions créer un homme nouveau, un monde nouveau. Nos chefs nous avaient persuadés que nous le pouvions. Eux, d'une Allemagne écrasée et humiliée, avaient fait l'élite des nations. Elle combattrait contre tous et elle vaincrait."

Élevé dans l'idéologie national-socialiste, son fils qu'il pensait acquis à ses idées va progressivement évoluer. Gerhardt prend peu à peu la mesure de la monstruosité des actes commis par son père et l'héritage paternel devient lourd à porter.

“Tu connais mes idées, c'est hélas toi qui me les as données. Mais t'entendre jour après jour, évoquer vos exploits guerriers, m'a fait comprendre que le mouvement nazi a été dirigé par des monstres. Des pervers fanatiques qui ont entraîné notre pays dans le chaos. Leur but n'était pas de créer une race nouvelle, il était d'écraser l'humanité."

En rédigeant son roman à la première personne du singulier, l'auteure donne une atmosphère particulière à ce récit, amplifiant de ce fait l'impact sur le lecteur. Ce roman noir historique illustrant un homme guidé par le devoir, portant un regard teinté d'émotion sur son passé et n'éprouvant aucun regret sur « ses exploits guerriers » ne peut laisser impassible.

Imaginer les mémoires d'un officier SS, un exercice difficile que Maud Tabachnik a relevé haut la main. La Shoah vu sous l'angle d'un bourreau, plutôt inédit et carrément terrifiant.

Une première fois marquante qui annonce assurément d'autres rendez-vous avec Maud Tabachnik !


Lien : http://lenoiremoi.overblog.c..
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