La Nuit des fous

Le gris, toujours le gris. Omniprésent.
Une couleur hésitante entre le blanc et le noir, qui oscille entre deux rives. Cette frontière entre le vivant et le mort résiste comme un sparadrap qui refuse de décoller.

[...] Le médecin précise : troubles associés à une dépression profonde, voire une mélancolie.
Noémie l'interrompt:
- C'est quoi la différence?
- La dépression est une affection psychosomatique occasionnée par une perturbation de l'humeur. La mélancolie, elle, est le niveau le plus élevé de la dépression.

[..] son coeur bat la chamade alors quelle entre dans le village. Entre chien et loup, sa voiture traverse un village fantôme. Une impression de solitude l'enserre. Un lieu vide d'âme.

Cette histoire familiale, très triste, a nécessité le temps de la digestion avant de pouvoir la dompter, la sculpter et en faire un roman noir.

Soudain, comme dans une pièce de théâtre, les personnages se dévoilent sous une lune éclatante. Les filles sont à genoux, ligotées, bâillonnées. L'astre de nuit, comme un projecteur, se fixe alors sur un personnage qui leur fait face. Un sourire glacial, des yeux fous. Devant lui, le visage du diable.

Élise gît, là, dans ce lit rustique aux draps maculés de sang. Depuis l'accouchement, personne n'est venu la voir. Aucun soin. Elle est comme un animal qui a mis bas. Une bête fatiguée et malade de laquelle le fermier s'est déjà détourné, indifférent, trop heureux de compter une nouvelle tête à son cheptel.

Elise dort mal, réveillée par des cauchemars atroces. Elle accouche d’un monstre, d’un enfant mort-né.
Elle est en train de perdre la tête.
Dans des moments de calme, elle se rassure. Après tout, sa tante s’y connaît. Une fois par semaine, elle a droit à la mesure de son ventre avec ce mètre de couturière. L’enfant pousse bien. Jeanne vérifie sa tension tous les jours. Sa tante prend soin d’elle.
Depuis quelques jours, Jeanne s’est adoucie. Elle est moins acariâtre. Mais bon Dieu, quel fichu caractère ! Jeanne a des sautes d’humeur imprévisibles. Elle alterne entre exaltation et humeur sombre.

Élise les écoute sans dire un mot. Des cernes ont creusé ses yeux. L’inquiétude revient au galop.

C’est étrange, les événements de la veille n’ont pas eu de prise sur eux.

Sa tante est guillerette, volubile. Roger, lui aussi, paraît moins maussade.

Décalage de ressenti.

L’adolescente, au moment de son internement, ne pèse que 40 kilos pour 1,70 mètre. Une anorexie mentale installée. Le médecin précise : troubles associés à une dépression profonde, voire à une mélancolie.
Noémie l’interrompt :
— C’est quoi la différence ?
— La dépression est une affection psychosomatique occasionnée par une perturbation de l’humeur. La mélancolie, elle, est le niveau le plus élevé de la dépression. La dépression mélancolique peut se définir comme la crise dépressive du trouble bipolaire ou de la psychose maniaco-dépressive.
— Donc, encore plus grave qu’une dépression ?
— Oui, d’ailleurs, elle a eu un traitement de cheval : phénelzine, un des premiers antidépresseurs – même à l’époque, franchement, il y avait des médocs plus appropriés. Cette médication a été associée à de l’électroconvulsivothérapie.

"Perverse narcissique. En gros, un serial killer qui veut ta peau sans en avoir l’air. Remarques désobligeantes, rabaissement, humiliations constantes. Le genre de comportement qui te fait glisser doucement vers la folie, te fait douter de tes capacités."