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Critique de pompimpon


MACIF, Emmaüs, Chorum, SOS, France Terre d'Asile… Certains noms, sigles, nous sont familiers, d'autres non. Tous sont les noms, sigles, d'entreprises ou d'associations relevant de l'économie sociale et solidaire.

Il est permis d'espérer que, pour être en accord avec les valeurs qu'elles défendent, ces entreprises ou associations soient "de bons patrons" attentifs aux conditions de travail, niveau de rémunération et droits de ses salariés.
Mais, selon ce vieil adage qui fait des cordonniers les plus mal chaussés, l'auteur qui a travaillé pour et écrit sur l'économie sociale et solidaire depuis plus de vingt ans, comme le rappelle la quatrième de couverture, Pascale-Dominique Russo, donc, nous dit que non.

Pour appuyer son propos, elle nous montre le revers de la médaille, l'envers du décor, les coulisses du salariat en milieu engagé.
Par une succession d'exemples, de témoignages et de situations concrètes au sein des entreprises et associations sus-mentionnées mais aussi de quelques autres, elle met en évidence les contradictions de cette économie qui veut être rentable pour rester sociale et solidaire mais, ce faisant, bascule dans une logique de rendement à tout prix qui ne déparerait pas dans une entreprise "classique" avec actionnaires et dividendes.

Et c'est le grand écart entre une volonté forte de porter des projets de réinsertion, d'accueil des migrants, de protection sociale complémentaire qui aient un sens et les conditions dans lesquelles ces projets sont montés puis mis en oeuvre.

Il y a déjà, dans les associations dont les conseils d'administration ne sont composés que de bénévoles, la difficulté pour ces derniers d'endosser le rôle de DRH.
Il y a également, comme une évidence, cette injonction pour le salarié à avoir un engagement équivalent à celui d'un bénévole, alors qu'ils ne peuvent évidemment s'investir dans leur travail de la même façon.

Avec l'entrée des associations dans le champ des appels d'offres qu'il faut décrocher à tout prix pour survivre, c'est la grande bascule vers une souffrance qui ne devrait pas y avoir sa place, des salariés payés au minimum, qui ne comptent pas leurs heures, font des burn-out et sont parfois licenciés au lance-pierre, quand ils ne partent pas en courant.

Ajoutons enfin que, pour obéir au diktat "too big to fail" bien connu des marchés boursiers, les associations, les mutuelles, se regroupent de gré ou de force en structures énormes, y perdant de leur âme et nombre de collaborateurs au passage.

Le milieu associatif n'est pas plus sanctuarisé que le milieu hospitalier et c'est bien dommage parce que dans un cas comme dans l'autre on finit toujours par s'en mordre les doigts.
Souvent trop tard.
Ne voir l'organisation, les fonctions, les missions, les services, les personnels qu'à travers le prisme de l'économie et du rendement est dévastateur pour les êtres et pour les mandats qui leur sont donnés par notre société aveugle.

Pascale-Dominique Russo dresse là le portrait d'un système qui ne fonctionne pas comme il le devrait.
Le constat est amer.

Travaillant moi-même depuis le siècle dernier ( !) dans la protection sociale, ayant vu cette régression des droits des salariés et de leurs conditions de travail au fil du temps, cette contradiction entre le message porté à l'extérieur et la politique de rendement dans les différents services, travailler plus au moindre coût, s'adapter aux réductions de budget et de personnel, toutes choses qui ont engendré une grande souffrance pour certains, de nombreuses difficultés pour tous autour de moi, j'ai reconnu bien des situations décrites par l'auteur ou par les intervenants auxquels elle donne la parole.

C'est un témoignage pris sur le vif, à l'instant T, qui pourrait servir de base à une vraie réflexion sur ce que nous voulons faire de nos bons sentiments, de nos convictions, et de la façon dont ils sont traduits en actions par le canal associatif et social.

Je remercie infiniment Pascale-Dominique Russo et les éditions du Faubourg pour leur confiance, et Babélio pour m'avoir permis cette lecture.
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