Tout d'abord, un grand merci à Babélio et aux Editions City pour ce livre remporté lors de la dernière masse critique non fiction.
A travers de nombreuses anecdotes, Patrice nous raconte son expérience de pompier volontaire dans une caserne de la région parisienne durant vingt deux ans. On le suit du début de sa formation à la fin de sa carrière. Dans la vie professionnelle, il est professeur et se fait muter en Province, il est alors adjudant pompier, le plus haut grade pour un volontaire et dans sa nouvelle petite ville, on n'accepte pas un nouveau aussi élevé dans la hiérarchie, de plus il a une longue expérience dans une grande caserne et cela dérange le maire qui le refuse, Patrice quitte donc son service en même temps que sa commune de résidence. Il nous raconte avec bienveillance, humour et humanité les nombreuses interventions qu'il a connues. Certaines histoires sont tristes à l'image de la vie, mais j'ai beaucoup apprécié l'humour typique des soignants, qui permet de prendre distance avec les tragédies de la vie, car la mission continue. Les dernières années de sa carrière, le village de cinq mille habitants est devenu une cité dortoir et a quintuplé ses habitants, les pompiers sont donc confrontés à la violence gratuite et terrible des jeunes désoeuvrés. On leur balance des objets depuis les balcons et pas seulement des oeufs, pourris ou pas, un de ses collègues manque même de se faire brûler vif par des voyous. On ne saura pas si les coupables seront arrêtés ou pas, ce n'est pas l'aspect qui intéresse l'auteur. Il veut nous dépeindre le quotidien de ces hommes qui sacrifient tant de choses pour leurs contemporains, de moins en moins reconnaissants.
Ce livre reste pour moi une déception. C'est un empilement de plusieurs centaines, voire d'un petit millier d'anecdotes racontant des interventions variées. Certes elles nous montrent en quoi consiste la vie des pompiers, mais je me suis noyée dans la masse de ces petits récits, au bout de cent pages j'avais fait le tour du problème et les cent cinquante dernières m'ont vraiment ennuyée. Je trouve que ça manque de structure et surtout de réflexion sur l'évolution de la fonction par exemple. Ce n'est pas un documentaire mais un récit de vie. On devine par exemple l'émergence de la violence des cités dans les dernières années de carrière de Patrice, mais il ne partage pas son analyse de la question, on reste dans l'accumulation de faits, et sur tout un livre ça devient très lassant. Ce manque de recul m'a dérangée.
Une autre chose m'a étonnée, et l'auteur n'a rien à y voir, cela tient du système. Je trouve que certains appels sont vraiment injustifiés. En Suisse le système de secours est divisé, les pompiers s'occupent des incendies et des inondations, le Smur des urgences vitales et les ambulances du secours aux personnes, même si souvent c'est un central commun qui gère tous les appels et les redirige au bon service. On peut bien sûr faire appel aux pompiers pour un nid de guêpes ou un chat bloqué dans un arbre, mais dans ce cas l'intervention est payante (plusieurs centaines d'euros) tout comme les fausses alertes. Quant au transport en ambulance, l'assurance en rembourse un par année et les autres sont à la charge de la personne (600 euros), donc on évite d'appeler les secours pour un oui ou un non. Quand Patrice dit qu'il a dû intervenir souvent pour des morsures de chats, je me demande dans quel monde on vit. Je sais que les morsures de chats peuvent être dangereuses et qu'il faut les traiter par antibiotiques, mais aucun minet, même le plus féroce, n'est capable de blesser quelqu'un au point qu'il ne puisse se rendre seul chez son médecin, voire en taxi. Si ces interventions inutiles étaient aussi facturées à 600 euros, les pompiers seraient moins surchargés.
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