Mon Dieu, ce que je pouvais avoir honte. J'essayais de me rendre invisible aux yeux des autres (et peut-être que je l'étais sans devoir me forcer). J'espérais que personne ne ferait attention à moi, parce qu'on aurait sûrement remarqué ma tenue ridicule, ma coiffure et mes accessoires qui auraient vieilli même ma grand-mère. Et j'ai donc eu l'idée de m'enfermer dans les toilettes en simulant une attaque de dysenterie et d'attendre l'heure où maman passerait me prendre.
J'ai étudié la gatta morta à fond et je m'en suis fait une idée très nette. La gatta morta est un génie.
Sa passivité apparente dissimule une force et une agressivité hors pair. C'est une marionnettiste qui tire les pantins inconscients. On n'y peut rien, il n'existe aucune arme contre elle.
Par conséquent, malgré Francesco ou grâce à lui, j'étais Chiara, enfin. J'avais pris l'habitude de réviser avec Matelda. On se voyait souvent chez moi et en fin de journée, Luca et Michele sonnaient à l'interphone. Venait alors le tour quotidien du quartier pour promener Matisse, le chien de Luca. Pendant ces promenades, nous parlions de nous. Ou plutôt, je parlais de Francesco et mes amis écoutaient avec patience. Ces promenades nous ont aidé à grandir, elles nous ont offert des moments inoubliables et elles nous ont unis pour toujours