Ce tome contient une histoire qui n'a de sens que lue avec Amazing Spider-Man By Nick Spencer Vol. 11 (épisode 50 à 55) qu'il vaut mieux avoir lu avant pour comprendre un traître mot de cet imbroglio. Il regroupe les 5 épisodes 50.LR à 54.LR, initialement parus en 2020, tous coécrits par
Nick Spencer &
Matthew Rosenberg. Les épisodes 50.LR à 52.LR ont été dessinés et encrés par
Federico Vicentini, avec une mise en couleurs réalisée par Marcio Menyz, aidé par Erick Arciniega pour le 52.LR. Les épisodes 53.LR et 54.LR ont été dessinés par
Federico Vicentini &
Takeshi Miyazawa, encrés par
Scott Hanna, et mis en couleurs par Menyz (53.LR) et Arciniega (53.LR & 54.LR). Les couvertures ont été réalisées par
Sara Pichelli (50.LR) et Marcelo Ferreira (51.LR à 54.LR). le comprend également les couvertures variantes réalisées par
Iban Coello, Marci Checchetto, Khoi Pham,
Mark Bagley. le tome se termine par une postface de Nick Mowe, le responsable éditorial, venant expliciter la position de l'éditeur Marvel sur un geste commis par un des personnages, afin d'éviter toute politique.
Alors que Spider-Man se bat contre Spider-Girl (Anya Corazón), Spider-Woman (Jessica Drew), Silk (Cindy Moon), Ghost-Spider (Gwen Stacy), Spider-Man (Miles Morales) et Madame Web (Julia Carpenter), transformés en démon, Norman Osbron se confie à sa thérapeute : il a longtemps eu peur de son image dans le miroir, il ne voulait pas voir le monstre s'y refléter. Il avait vendu son âme à un démon et il a laissé cela le transformer en un monstre qui a détruit des vies sans compter. La docteure Ashley Kafka lui rétorque qu'elle n'est pas revenue à l'institut Ravencroft pour l'entendre se défausser sur une puissance divine, au lieu d'admettre ses défauts réels. Il répond qu'elle n'a pas compris : il est le seul coupable, le seul responsable de tout, la mort de Gwen, les malheurs de son fils. La psychologue en déduit qu'il fait les premiers pas dans un processus de rédemption : c'est un processus douloureux.
À bord du sous-marin, Spider-Man continue d'affronter l'Ordre de la Toile, en essayant de ne pas blesser ses amis possédés. Il est projeté par Madame Web contre la vitre qui se fendille. Spider-Man (Miles Morales) se jette sur lui et la vitre cède, l'eau envahissant le poste de pilotage. Il est éjecté dans l'eau, et lance une toile pour se raccrocher au sous-marin. La docteure Kafka continue d'interroger Norman : elle rappelle qu'il lui a dit connaître l'identité réelle de Kindred, prononçant même son nom à haute voix. Norman confirme son identité. Il explique que Kindred lui a rendu visite à plusieurs reprises dans sa cellule : au lieu de l'aider Norman l'a mis au défi. Là encore il est responsable de la transformation de cette personne en Kindred. Spider-Man se dirige vers l'habitacle du sous-marin pour venir en aide à ses amis. Il relance une toile et fait des efforts désespérés pour le remonter vers la surface. Osborn continue de se lamenter : quoi qu'il fasse, quelque sacrifice qu'il puisse réaliser, cela ne changera rien au sort de celui qui est devenu Kindred. Enfin le sous-marin s'échoue sur la rive du fleuve, et Spider-Man s'écroule mort de fatigue. Les six superhéros possédés bondissent hors de l'habitacle et recommencent à s'en prendre à lui.
Il est donc entendu que cette histoire ne s'adresse qu'aux lecteurs de la série principale de Spider-Man, que ce sont des épisodes dérivés de l'intrigue de fond débutée au numéro 1 de la saison Amazing Spider-Man écrite par
Nick Spencer, que tous les enjeux en découlent, et qu'elle ne fait pas sens par elle-même. Il s'agit donc de découvrir ce qui s'est passé entre les épisodes de la série régulière. le lecteur peut comprendre et même apprécier que l'éditeur ne l'ait pas contraint à acheter un recueil avec les épisodes 50 à 55 et les épisodes 50.LR à 54.LR d'un seul tenant, qu'il ait eu la possibilité de choisir. Mais du coup, chacun des deux recueils génère une impression un peu décousue, puisque dans l'un comme dans l'autre, il manque les événements de l'autre. Il peut également avoir un a priori négatif sur le fait que Spencer n'écrive pas ces épisodes tout seul. D'un côté, ça se comprend parce qu'avec un rythme de parution hebdomadaire, ça aurait fait 4 épisodes à écrire en 1 mois. D'un autre côté, c'est même plutôt mieux, vu le niveau élevé de décompression des épisodes de la série Amazing Spider--Man. Ici, au moins le coscénariste vient étoffer la trame de l'intrigue, par des dialogues plus consistants. Les personnages prennent e temps d'exposer leurs états d'âme, d'expliquer leurs actions, d'interagir, et pas simplement déchanger des horions.
Le choix d'avoir des épisodes normaux et des épisodes .LR fait encore plus ressortir le côté artificiel de l'intervention du groupe de l'Ordre de la Toile. D'un côté, il est normal que les amis de Spider-Man se retrouvent mêlés à cette menace de grande envergure. D'un autre côté, leur intervention ne sert qu'à rallonger la sauce, sans apporter grand-chose. S'il veut se montrer encore plus critique, le lecteur peut aussi s'étonner de l'absence d'autres superhéros très liés à Spider-Man qui ne sont pas là pour le seconder. Il ne peut également que soupirer en voyant le retour de Morlun, sorti dont ne sait où. Mais, il peut aussi trouver agréable le retour de la docteure Ashley Kafka, apparue pour la première fois dans Peter Parker, the Spectacular Spider-Man 178 (1991) par
JM DeMatteis &
Sal Buscema. Il apprécie également l'inclusion de 4 pages extraites de Peter Parker, the Spectacular Spider-Man 200 (1993) par
JM DeMatteis &
Sal Buscema. Les coscénaristes maîtrisent la continuité et la mythologie du tisseur de toile, et en font bon usage, en particulier par le biais des réminiscences de Norman Osborn sur son histoire personnelle, et les réactions de Mary Jane Watson quand il lui demande son aide : rien n'est oublié, et tout n'est pas pardonnable.
Sans surprise, ces 4 épisodes sont dessinés par des artistes moins connus que ceux de la série mère. le lecteur constate par la suite que
Federico Vicentini passe d'ailleurs sur la série mère, après ces épisodes .LR. de prime abord, il est plutôt rassuré : le niveau de la narration visuelle est professionnel, et les dessins également. Il n'a pas l'impression qu'ils soient bâclés, étant au niveau d'un comics de superhéros industriel. Certes les arrière-plans sont souvent les parents pauvres de la narration. le metteur en couleurs (avec l'aide de deux autres coloristes) sait y faire pour réaliser des camaïeux et des dégradés qui viennent installer une ambiance, et occuper les espaces vides. Il se montre très compétent pour jouer avec les nuances pour renforcer les reliefs des surfaces, pour accentuer la différence entre deux éléments contigus, pour utiliser les effets spéciaux à bon escient afin de faire ressortir la manifestation des superpouvoirs, et la force des destructions. S'il prend un instant pour imaginer certaines planches sans l'adjonction de la mise en couleurs, le lecteur mesure tout ce qu'elle apporte.
En y prêtant attention, le lecteur peut voir que l'artiste fatigue à lutter contre les délais, et que l'ajout d'un deuxième artiste était indispensable pour les deux derniers épisodes, et pas tout à fait satisfaisant. Alors que les combats s'intensifient, les décors s'amenuisent, certaines pages en étant complètement dépourvus. Lorsqu'ils sont présents, le niveau de détails varie fortement, mais Vicentini sait les dessiner : le cabinet de la psychologue avec le divan, le fauteuil, la grande fenêtre, le feu de cheminée, les dossiers sur les étagères, le pont près duquel le sous-marin s'échoue, avec les gratte-ciels en arrière-plan, les rues de Manhattan où le combat fait rage le luxueux appartement de Felicia Hardy, le pont de Brooklyn les ruines de Ravencroft, le cimetière. En regardant les personnages, le lecteur peut distinguer la trace de l'influence de plusieurs autres dessinateurs :
Marco Checchetto,
Humberto Ramos, tout en présentant une cohérence. Il sait insuffler une tension dramatique dans les personnages par l'expression de leur visage, concevoir des prises de vue qui en mettent plein la vue lors des affrontements, assurer une logique de déplacement d'une case à l'autre, et guider l'oeil du lecteur au cours d'une séquence, ou sur une page. Celui-ci retient plusieurs moments mémorables : le tourment intérieur de Norman Osborn, le corps de Spider-Man recouvert d'araignées, l'arrivée de
Mary Jane à New York, la violence de l'attaque de l'Ordre de la Toile sur le pont de Brooklyn, le retour de Morlun, les sorts de Doctor Strange, la discussion dans la voiture entre Norman Osborn et Mary Jane Watson.
D'un côté, le lecteur a bien envie de découvrir ce qui est arrivé à l'Ordre de la Toile pendant Last Remains ; de l'autre côté, il se dit qu'il va tomber sur un produit vite fait avec des économies de moyen, juste pour caser plus de camelote. Il découvre une narration visuelle professionnelle et plutôt entraînante, d'aussi bonne qualité que les épisodes de la série mensuelle. Ces épisodes répondent pleinement à ses interrogations, et correspondent à ce qu'il imaginait. L'intervention de Spider-Girl, Spider Woman, Silk, Spider-Man (Miles Porales), Ghost Spider et Madame Web n'a rien de folichon ou d'indispensable, mais reste plaisante à lire. Les moments consacrés à Norman Osborn et Mary Jane Watson s'avèrent plus intéressants, et captivants pour le lecteur de la série régulière. Entre 3 et 4 étoiles en fonction du degré d'investissement du lecteur dans cette intrigue.