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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Il y a bien longtemps que j'avais lu quelques livres de Claude Michelet, des grives aux loups et autres romans de terroirs, bien écrits, documentés et fort intéressants.
À court de livres pendant cette période de repli, je suis allée voir dans la boîte à livres de mon village et y ai trouvé La grande muraille, que j'ai lu en une petite journée.
L'histoire est prenante, on se laisse porter par le courant de cette vie qui passe à toute vitesse, racontée avec juste les mots qu'il faut, sans superflu. Et c'est là justement tout l'art de l'écriture de Michelet, et ce que j'apprécie beaucoup dans un roman, c'est d'amener le lecteur à réfléchir et à comprendre tout ce qui n'est pas dit.
Ici par exemple, on comprend à quel point l'horreur de la guerre (de 14-18) vécue par de jeunes garçons de 20 ans a pu provoquer comme dégâts irréversibles sur des êtres déjà fragiles et peu gâtés par la vie.
Ensuite, on réfléchit sur la folie, qui peut changer de sujet suivant de quel point de vue on se place.
Enfin, qu'en est-il d'un projet fou, un projet titanesque, mené par un homme seul, un seul homme durant toute sa vie et quel sens cela a-t-il ?
Et encore d'autres questions, très intemporelles et universelles, même si l'histoire commence en 1914.
À lire absolument.
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La Feuille Volante n° 1345 – Avril 2019.

La Grande MurailleClaude Michelet. Pocket.

Il n'y a rien de telle qu'une succession pour jeter la zizanie dans une famille. Firmin vient d'hériter de son oncle et tuteur une vaste pièce de terre au détriment de ses autres cousins Émile, Edmond et Leonie. Cette parcelle avait beau n'être qu'une grande étendue incultivable où tout le monde, depuis des années déverse son surplus de pierre, Émile souhaite la lui racheter, ne serait-ce que parce qu'il estime que cela fait partie de son héritage naturel et non de celui de Firmin. Chacun au village conseille à ce dernier d'abandonner cette parcelle simplement parce qu'elle ne lui rapportera jamais rien et qu'il se fatiguera en pure perte mais lui, Firmin qui est célibataire et qui n'a rien d'autre qu'une pauvre maison, décide de la cultiver autant pour embêter son cousin que pour tenter quelque chose d'insensé : faire pousser des arbres fruitiers dans ce désert minéral. Il utilisera les pierre pour délimiter sa propriété en érigeant un mur. Résultat au village tout le monde le prend pour un fou !
La Grande guerre arrive et Firmin retrouve son cousin Edmond dans les tranchées où ils survivent ensemble dans la boue, la mitraille et les rats… Revenu au village il reprend la construction de sa muraille et les arbres et la vigne qu'il a plantés se mettent à donner des fruits parce que sous la pierre il y avait de la terre fertile qui, travaillée et amendée, s'est révélée productive. C'est devenu sa passion, son unique raison de vivre et peut-être un signe du destin qui a fait de lui le propriétaire de ce qu'il n'aurait jamais imaginé pouvoir posséder, à moins bien sûr qu'il n'ait décidé de faire la nique, par delà la mort, à cet oncle qui avait bien conscience de lui faire ainsi un cadeau empoisonné ! le rempart qu'il érige est ici plus qu'un symbole. Ça dépasse l'obligation légale de se clore. Il y a la volonté de se protéger contre la jalousie, voire de la nourrir, de ceux qui le prenaient pour un fou et qui seront bien obligés de constater la réussite de la persévérance et de l'effort. C'est en effet une constante chez les hommes d'envier, et même de détester, ceux qui réussissent là où d'aucuns ne veulent même pas s'engager. C'est le culte de l'effort, du travail bien fait qui s'inscrit dans un terroir rural, une sorte de manière de s'approprier cette terre ingrate au départ en l'apprivoisant. Après tout, ce pauvre orphelin, qui était sans doute différent des autres de la fratrie, recueilli par un oncle qui en a fait son héritier, aurait pu vendre cette terre stérile à son cousin ou simplement la laisser en l'état de broussaille caillouteuse, mais il a préféré la cultiver pour affirmer son côté rebelle et montrer qu'après avoir défendu son pays dans les tranchés il allait poursuivre différemment son effort. L'oeuvre de Michelet s'inscrit d'ailleurs en grande partie dans l'amour et le travail de la terre et de la condition des petits agriculteurs face à la modernité.
Ce récit m'a rappelé le roman de Jean Giono « L'homme qui plantait des arbres » (La Feuille Volante n° 1124). Certes le style est différent mais néanmoins fort agréable à lire, mais l'histoire est à peu près la même. C'est un peu une parabole où un homme seul décide de se battre pour son idée, même si le projet est fou et que chacun tente d'y faire échec. C'est à la fois absurde, utopique mais c'est le sens qu'il donne à sa vie. Il y a cependant une différence importante à mes yeux. Celui de Giono s'inscrit dans un contexte laïc. Il s'agit d'un homme pauvre qui décide s'ensemencer avec des glands une étendue désertique qui ne lui appartient pas et qui deviendra une forêt. Ici Michelet met sa fiction dans le contexte sociologique de l'époque, celle de l'appartenance au catholicisme où l'église était, plus que la Mairie sans doute, le centre du village. Son cousin Edmond devient prêtre et après la guerre qu'il a faite avec Firmin, il revient comme curé de leur village, son cousin devenant son sacristain, son enfant de choeur, même s'il n'est pas très catholique ! Edmond n'a aucun intérêt à posséder du bien sur terre et donc à le transmettre, c'est ici l'alliance non plus du « sabre et du goupillon » qui a petit à petit vidé nos églises, mais celle au contraire de l'effort humain que le clergé populaire accompagne et soutient, de la dimension religieuse de l'action de l'homme sur terre, ce qui évoque pour moi la figure de son père Edmond Michelet.
Il y a chez Firmin cette volonté de s'affirmer face aux autres tout en se coupant du monde, de fuir ses semblables, qui d'ailleurs le lui rendent bien, à l'exception d'Edmond devenu curé, une amitié finalement assez atypique. Il puise sa joie dans la nature généreuse, dans le travail bien fait et cela lui suffit.
C'est le premier roman de Michelet que je lis et il m'a bien plu.

©Hervé Gautier.
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Mon livre préféré de Claude Michelet parce qu'il me semble qu'il contient tout: la terre d'abord, emblème de son auteur; la guerre de 14-18 insensée; les yeux des autres sur le héros du livre encerclé par sa muraille; les pierres qu'il est si agréable de manipuler, d'empiler, en modifiant leurs emplacements pour les reconnaître ensuite une fois qu'elles ont atteint leur destination finale, aboutie; les vanités humaines, tant celles de ceux qui sont enfermés dans leurs certitudes et méprisent celui qui construit sa muraille que celle du héros lui-même qui finit par perdre le sens de son oeuvre. L'ensemble servi par une écriture d'une ampleur et d'une lenteur parfaitement adaptées à la construction de cette grande muraille.
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J'adore Claude Michelet : son style, ses histoires, le sujet de la terre qu'il traite toujours avec justesse : le courage des hommes, leur "frusterie".
Je ne saurais donc dire si je suis vraiment objective.
Mon roman favori reste, pour l'instant "les bâtisseurs d'éternité", roman historique et qui m'a tellement passionnée... Mais celui-ci m'a aussi beaucoup plu... Il me rappelle que la plupart d'entre nous avons eu des ancêtres paysans.
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