Mon Dieu,
je n'ai plus de vêtements sur moi,
je n'ai plus de chaussures,
je n'ai plus de sac, plus de portefeuilles de stylo,
je n'ai plus de nom. On m'a étiquetée 35282.
je n'ai plus de cheveux,
je n'ai plus de mouchoir,
je n'ai plus de photos de Maman et de mes cheveux.
je n'ai plus l'anthologie ou chaque jour
dans ma cellule de Fresnes
J'apprenais une poésie.
Je n'ai plus rien.
Mon crane, mon corps, mes mains sont nues.
Dormez bien sages en vos charniers
Morts dérisoires
Voici le temps des braconniers
De la Victoire
Ceux qui n'ont pas tremblé au vent de la défaite
Ceux qui n'ont pas pleuré au cri noir des géhennes
Ceux qui n'ont pas frémi au souffle de la bête
Les sans remords
Sans cuirasse d'orgueil ni fiers cimiers de la haine
Les bien vivants des jours de Mort
Les Malins et les Forts .
Tous en rang un par un
sans savoir ce qui va arriver
à gauche - à droite - ici ou là.
Nous suivons le chemin imposé
à gauche à droite- ici ou là
pour la dernière fois
proches encore les uns des autres.
Des pierres pour lit de repos
blottis l'un contre l'autre
Nous reposons
las épuisés.
A gauche - à droite : lèchent les flammes
A gauche - à droite : les flammes recouvrent nos frères et nos sœurs.