Un recueil de dix nouvelles, plus ou moins longues, écrites avec un style haletant, qui met en scène des personnages pittoresques et alterne les tons comique, grinçant, poétique et fantastique. On ne s'ennuie pas une seconde en compagnie de ces cabossés de la vie, qui tentent de tenir le coup au moment où tout bascule.
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Albert et moi,
Quarante ans de bouquets de 12 roses rouges à La Saint Valentin, toujours cachés derrière le dos, accompagnés de cette question devenue idiote après toutes ces années : « Chérie, devine ce que je t’ai rapporté ? » (Je sais pas, moi, une bassine ? un balai ? un coussin péteur ?)
Quarante ans qu’on se coltine le même repas pour le Réveillon de la Saint Sylvestre, l’éternel huîtres-saumon-foie gras-dinde aux marrons-sorbet citron vodka,
Quarante ans de camping Aux flots bleus, en Bretagne, « parce que là-bas, il fait moins chaud qu’ici. »,
Quarante ans qu’Albert porte, chaque dimanche, le même gilet bleu marine à rayures rouges, « qui lui rappelle son père, qui était marin »,
Quarante ans d’une vie plate, balisée, sans surprise, sans le plus petit chemin de traverse possible.
Or, je vais avoir bientôt soixante-trois ans. Dans un an, Albert est à la retraite, et peut-être que cette vie changera. Ou pas.
Dans tous les cas, je sais que je ne peux plus attendre. J’ai pris ma décision.
Je vais le supprimer.
Quarante ans de bouquets de 12 roses rouges à La Saint Valentin, toujours cachés derrière le dos, accompagnés de cette question devenue idiote après toutes ces années : « Chérie, devine ce que je t’ai rapporté ? » (Je sais pas, moi, une bassine ? un balai ? un coussin péteur ?)
Quarante ans qu’on se coltine le même repas pour le Réveillon de la Saint Sylvestre, l’éternel huîtres-saumon-foie gras-dinde aux marrons-sorbet citron vodka,
Quarante ans de camping Aux flots bleus, en Bretagne, « parce que là-bas, il fait moins chaud qu’ici. »,
Quarante ans qu’Albert porte, chaque dimanche, le même gilet bleu marine à rayures rouges, « qui lui rappelle son père, qui était marin »,
Quarante ans d’une vie plate, balisée, sans surprise, sans le plus petit chemin de traverse possible.
Or, je vais avoir bientôt soixante-trois ans. Dans un an, Albert est à la retraite, et peut-être que cette vie changera. Ou pas.
Dans tous les cas, je sais que je ne peux plus attendre. J’ai pris ma décision.
Je vais le supprimer.