Pour un premier roman c'est vraiment très bien. J'ai d'abord été séduite par ce titre "
Rififi chez Loti" qui évoque les vieux polars à la
Frédéric Dard ou les adaptations au cinéma avec
Jean Gabin, entre autres. D'ailleurs c'est
Auguste le Breton, auteur français et prolifique de polars qui déposa ce terme, qui lui appartient encore de nos jours. Il en fit sa marque de fabrique avec plusieurs séries de rififi dont une série géographique qui date des années 50 et 60 avec notamment
du rififi à New York,
du rififi à Barcelone, du rififi à Paname et d'autres encore…
Alors forcément j'y ai pensé car le polar de
Jean-André Lecru, ancien libraire, se passe à Rochefort, ville natale de
Pierre Loti écrivain voyageur du 19ème siècle.
L'argot n'est pas utilisé, ce qui ne retire rien à l'intérêt que je porte à ce livre au parlé local rochefortais. Et comme je suis allée en vacances récemment à Rochefort j'étais très motivée par la lecture de ce polar.
Juan, le narrateur, collecte les graffitis inscrits sur les murs de la ville. Cela va lui servir de fil rouge pour mener une enquête malgré lui. Il trouvera des inscriptions telles que « Faussaire tu vas mourir » ou encore «
Pierre Loti ton honneur sera sauf ».
Il a une bande de copains et copines, Delphine dite Begon jaune, Loulou,
Philippe L anarchiste monté de Paris dont un manque à l'appel. C'est Claude, retrouvé assassiné sous la barque en pierre renversée du cénotaphe de Bellot, navigateur franc maçon. C'est assez intrigant d'autant plus que le défunt a envoyé à Juan un manuscrit de
Pierre Loti, la veille de sa mort : l'original d'aziyadé datant de 1879. C'est le premier roman de loti. Il s'agit d'une version exotique du mythe romantique de l'amour tragique dont la forme est originale, mêlant à la fois le journal intime du héros et la correspondance qu'il échange avec des proches et qui permet le recul par rapport à l'intrigue.
On voit bien que
Jean-André Lecru est libraire pour aller nous dégoter un livre de référence peu connu aujourd'hui mais qui semble avoir été emblématique de l'orientalisme qui a marqué la littérature et les arts du 19ème siècle en France.
Pour revenir à Rochefort, un inspecteur qui fait du zèle mais n'arrive à rien complète le tableau et nous voilà avec une aventure urbaine rondement menée. Je n'en révèlerai pas plus.
Même s'il y a des maladresses d'écriture (c'est un premier roman) j'y ai retrouvé un cadre que j'aime bien, autour de la place Colbert où
Jacques Demy a tourné « Les demoiselles de Rochefort » en 1966. D'ailleurs, on voit que l'auteur attache une importance particulière aux lieux :
un vieux cinéma, la corderie royale et l'arsenal avec le chantier de reconstruction de la frégate Hermione. Et cette frégate est célèbre car le navire a, en 1780, permit à
La Fayette de rejoindre les insurgés américains en lutte pour leur indépendance.
Alors, en plus du suspense, on a le droit à une visite critique et historique de la ville, c'est donc un beau voyage.
Ce livre m'a été offert par les éditions La Geste dans le cadre d'une opération masse critique et je les en remercie.