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Critique de Calimero29


Nous sommes dans le Valais, en Suisse, dans les années 70; nous assistons horrifiés, impuissants, muets, à la violence qu'abat Louis, le père, sur sa femme Claire, sa fille aînée, Emma et sa cadette, Jeanne, la narratrice. Tout le village ferme les yeux, en particulier le médecin auquel se confie Jeanne.
Chacune des trois femme essaie d'échapper à sa façon à l'enfer : Claire, par les fleurs qu'elle plante et les romans d'amour, Emma dans les bras d'hommes qui la payent et par le suicide, fuite ultime; seule Jeanne partira physiquement en suivant la scolarité de l'École Normale à 15ans, puis en allant à l'université à Lausanne. Mais partir ne guérit pas; la douleur, la haine, le dégoût, la rage empoisonnent la jeune fille, puis la femme que deviendra Jeanne. Seul, l'amour bienveillant de sa compagne, l'amour doux et respectueux de Paul et son retour dans le Valais lui apportent un certain apaisement.
Il y a quelques semaines, j'avais lu "Vers la violence" qui traite du même sujet, quoiqu'avec une bestialité moindre et avec une différence de taille : l'héroïne aimait son père.
Ici, le roman dégage une haine palpable de la part de Jeanne qui ne pardonnera pas à son père même sur son lit de mort et ira jusqu'à lui cracher son mépris au visage. C'est le roman du combat d'une femme pour devenir elle-même, pour se défaire du poison que la violence paternelle a instillée dans son coeur, pour essayer de ne pas voir une menace dans les hommes qui l'entourent, pour s'éveiller à la douceur. Elle ne sera jamais totalement en paix avec son enfance, avec son passé et en cela, ce texte est plus sombre que "Vers la violence".
Cependant, il y a des moments de bonheur : l'amour profond que Jeanne porte à sa mère tout en lui reprochant de ne pas être partie avec ses filles loin de leur bourreau, les instants de grâce et de sérénité à nager dans le lac Léman comme si elle se purifiait, se lavait de la souillure de son père, comme si elle retournait dans la chaleur et la sécurité de la matrice.
L'auteure nous offre de très beaux passages sur le Valais que Jeanne a fui mais vers lequel elle est revenue : amour de la terre, racines, authenticité des montagnes et des montagnards; Sarah Jollien-Fardel a elle-même vécu ce mouvement de rejet-amour pour son Valais natal.
Ce roman n'est pas un réquisitoire contre les hommes malgré les figures très négatives du père bestial, du médecin lâche, du gosse volontairement méchant et prétentieux; le personnage de Paul, tout en douceur, en patience, en empathie fait que le roman ne plonge ni dans le manichéisme, ni dans le simplisme.
Une lecture qui laissera une trace encore longtemps.
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