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Citations sur Trois hommes dans un bateau (sans oublier le chien) (97)

Quand il a commencé de vivre à mes crochets, je n’ai jamais pensé le garder bien longtemps. Souvent, je le regardais, assis sur le tapis, les yeux levés sur moi, et je me disais : « Ce chien ne vivra pas. Il rejoindra bientôt nuages et séraphins, emporté sur un char de feu, c’est fatal. »

Mais après que j’eus remboursé la douzaine de poulets qu’il avait égorgés, après que je l’eus tiré par la peau du cou – grognant et gigotant – de cent quatorze bagarres de rues, quand une mégère m’eut traité d’assassin en me brandissant sous le nez la dépouille de son pauvre chat, quand mon voisin m’eut poursuivi en justice pour laisser en liberté une bête féroce qui l’avait assiégé plus de deux heures durant par une nuit glaciale dans sa remise à outils (d’où il n’osait plus sortir), et quand j’eus appris que le jardinier avait, à mon insu, gagné trente shillings en l’engageant dans des concours à tuer des rats, alors je songeai que, tout bien pesé, Montmorency avait une espérance de vie des plus normales et que le ciel risquait d’attendre encore longtemps le retour de son ange.
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Il y avait [un baromètre] au mur dans un hôtel d'Oxford où je fis un séjour au printemps dernier. Lors de mon arrivée, il marquait « beau fixe ». Dehors, la pluie tombait tout bonnement à seaux, et elle n'avait pas cessé de tout le jour. Cette contradiction me parut singulière, et je tapotai le baromètre, qui fit un bond et marqua « très sec ». Le garçon de l'hôtel s'arrêta et me dit qu'à son idée le baromètre parlait du lendemain. Je demandai si par hasard il ne pensait pas plutôt à la semaine précédente : mais le garçon me répondit qu'il ne le croyait pas.

le lendemain matin, je tapotai de nouveau le baromètre, et il monta encore plus haut, tandis que la pluie tombait toujours plus dru. Le mercredi, j'allai de nouveau donner un coup. L'aiguille se mit à tourner vers « beau fixe », « très sec » et « forte chaleur », et elle ne s'arrêta qu'en rencontrant le butoir, qui l'empêcha d'aller plus loin. Il était plein de bonne volonté, cet instrument, mais il était construit de façon à ne pouvoir, sans ce briser, prédire un beau temps plus intensif encore. Son intention évidente était de continuer à monter et de pronostiquer sécheresse, disette d'eau, insolation, simoun, et autres fléaux analogues, mais le butoir l'en empêcha, et il dut se contenter d'indiquer ce banal « très sec ».

Pendant ce temps-là, la pluie tombait en un torrent continu, et la partie basse de la ville était déjà inondée par suite du débordement du fleuve.
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"Tel est, sur la Tamise, le seul moyen d'obtenir qu'une bouilloire consente à bouillir. Si elle voit que vous attendez sa bonne volonté avec impatience, elle s'abstiendra de chanter.
Il vous faut vous éloigner et entamer votre repas, comme si vous n'alliez pas prendre le thé. Alors vous l'entendrez bientôt bouillir à gros bouillons, folle d'envie de se transformer en thé.
C'est également une bonne méthode, si vous êtes très pressés, de vous dire les uns aux autres en parlant très haut, que vous n'avez pas besoin de thé et que vous n'allez pas en faire. Vous vous rapprochez de la bouilloire de façon qu'elle puisse vous entendre et vous lancez très haut : "Moi, je ne veux pas de thé. Et toi, Georges ?" A quoi Georges répond, de même : "Oh non, moi, je n'aime pas le thé. Prenons plutôt de la limonade. Le thé est trop indigeste."
A l'instant, la bouilloire déborde et éteint le réchaud."
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L’eau de pluie est l’élément principal du dîner. Le pain en regorge, le bifteck y baigne, et la confiture, le beurre, le sel et le café s’y sont dissous en un curieux potage.
Le repas se termine sur la découverte que le tabac est mouillé et que vous ne pourrez pas fumer. Par bonheur vous avez une bouteille de remontant (le bien nommé) qui, pris à la dose adéquate, vous redonne suffisamment le goût de vivre pour que vous parveniez à vous coucher.
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J’ai toujours en mémoire cette visite faite un jour au British Muséum. Je voulais me renseigner sur le traitement d’une légère indisposition dont j’étais plus ou moins atteint – c’était, je crois, le rhume des foins. Je consultai un dictionnaire médical et lus tout le chapitre qui me concernait. Puis, sans y penser, je me mis à tourner les pages d’un doigt machinal et à étudier d’un œil indolent les maladies, en général. J’ai oublié le nom de la première sur laquelle je tombai – c’était en tout cas un mal terrible et dévastateur – mais, avant même d’avoir lu la moitié des « symptômes prémonitoires », il m’apparut évident que j’en souffrais bel et bien. Un instant, je restai glacé d’horreur. Puis, dans un état de profonde affliction, je me remis à tourner les pages.

J’arrivai à la fièvre typhoïde… m’informai des symptômes… et découvris que j’avais la fièvre typhoïde, que je devais l’avoir depuis des mois sans le savoir. Me demandant ce que je pouvais bien avoir encore, j’arrivai à la danse de Saint-Guy… et découvris – comme je m’y attendais – que j’en souffrais aussi. Je commençai à trouver mon cas intéressant et, déterminé à boire la coupe jusqu’à la lie, je repris depuis le début par ordre alphabétique… pour apprendre que j’avais contracté l’alopécie et que la période aiguë se déclarerait dans une quinzaine environ. Le mal de Bright – je fus soulagé de le constater – je n’en souffrais que sous une forme bénigne, et pourrais vivre encore des années. Le choléra, je l’avais, avec des complications graves. Quant à la diphtérie, il ne faisait aucun doute que j’en étais atteint depuis la naissance. Consciencieux, je persévérai tout au long des vingt-six lettres de l’alphabet et, pour finir, il s’avéra que la seule maladie me manquant était bel et bien l’hydarthrose des femmes de chambre.

J’en éprouvai quelque dépit, tout d’abord. Cela me paraissait tenir d’une injustice. Pourquoi n’avais-je pas l’hydarthrose des femmes de chambre ?
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Ce n'est pas pour être insultant, mais je crois fermement que si vous preniez une cordelle au hasard, après l'avoir étendue bien droite de tout son long au milieu d'un champ, il vous suffirait de lui tourner le dos trente secondes pour découvrir, en la regardant de nouveau, qu'elle s'est rassemblée toute en un tas, au centre du champ, et s'est entortillée sur elle-même et toute remplie de nœuds, qu'elle a perdu ses deux bouts et qu'elle n'est plus que boucles. Vous mettriez une bonne demi-heure, assis là sur l'herbe et sans cesser de jurer, pour la débrouiller.

Telle est mon opinion sur les cordelles en général. Bien entendu, il peut y avoir des exceptions honorables : je ne dis pas le contraire. Il peut exister des cordelles qui fassent honneur à leur corporation – des cordelles consciencieuses et respectables, des cordelles qui ne se prennent pas pour un ouvrage au crochet et ne tentent pas de figurer un dessus de canapé dès l'instant où on les laisse à elles-mêmes. Il se peut, dis-je, qu'il y ait de ces cordelles-là. Je souhaite sincèrement qu'il en existe. Mais je n'en ai pas encore rencontré.
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Je lui fis remarquer qu’il eût montré plus de bon sens s’il s’était offert de travailler avec George, et de m’accorder un peu de repos. J’avais fait jusque-là plus que ma part, et je commençais à la trouver saumâtre.

J’ai toujours l’impression de fournir plus de travail que je ne devrais. Non pas que le travail me répugne, remarquez ; j’aime le travail, il m’exalte. Je resterais des heures à le contempler. J’apprécie énormément sa compagnie, et l’idée d’en être séparé me brise le cœur.

On ne saurait m’en donner trop ; accumuler le travail est même devenu chez moi une sorte de passion ; mon bureau en est rempli à un tel point qu’il n’y a plus de place pour en mettre davantage. Il me faudra bientôt construire une annexe.

En outre, je prends soin de mon travail. Une partie de celui que j’ai en ce moment chez moi est en ma possession depuis des années et des années, et il n’est souillé d’aucune trace de doigts. Je suis très fier de mon travail. Je le descends de temps à autre pour l’astiquer. Je ne connais personne qui garde son travail en meilleur état de conservation que moi.

Mais cette passion dévorante ne m’empêche pas de me montrer raisonnable. Je n’en demande pas plus que ma part légitime. Aussi, quand j’en hérite sans l’avoir désiré, cela m’ennuie.

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On ne saurait me donner trop de travail ; accumuler le travail est devenu chez moi presque une passion ; mon bureau en est rempli, à tel point qu'il n'y a plus de place pour en mettre davantage. Il me faudra bientôt faire bâtir une annexe.
Et je prends soin de mon travail, aussi. Une partie de celui que j'ai à présent chez moi est en ma possession depuis des années, et il n'y a pas dessus la moindre trace de doigt. Je suis très fier de mon travail ; je descend de temps à autre pour l'épousseter. Personne ne tient son travail en meilleur état de conservation que moi.”
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[P]our en revenir à la réclame des pilules pour le foie, j'avais indéniablement les symptômes, dont le principal est « une aversion complète pour le travail sous toutes ses formes ».

Ce que je puis souffrir de cette façon-là, il n'est pas de mots pour le dire. Dès mes toutes premières années, j'en fus le martyr. Pendant mon enfance, cette maladie ne me quitta pas un seul jour. On ne savait pas que c'était de la faute de mon foie. La science médicale était beaucoup moins avancée qu'aujourd'hui, et on attribuait cela à la paresse. On me disait :
— Mais, satané petit fainéant, secoue-toi ! Tu ne feras donc jamais rien pour gagner ta vie ?

On ne savait pas, bien entendu, que j'étais malade. Et, au lieu de m'administrer des pilules, on m'allongeait des taloches. Et, si singulier que cela puisse paraître, ces taloches me guérissaient souvent – pour une heure. Certaines de ces gifles ont eu plus d'effet sur mon foie, et m'ont beaucoup mieux inspiré le désir de me mettre à la besogne sur-le-champ que ne le fait à présent toute une boîte de pilules.
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L'avantage de l'Iris stew, c'est qu'il vous débarrasse d'un tas de choses.
Je dénichai deux oeufs qui s'étaient cassés, et on les ajouta. Ils épaissiraient la sauce, nous dit George.
J'ai oublié les autres ingrédients, mais je sais que rien ne fut perdu, et je me souviens que vers la fin, Montmorency, qui avait suivi notre manège avec le plus vif intérêt, s'éloigna d'un air grave et pensif et réapparut quelques minutes plus tard, portant dans sa gueule un rat d'eau crevé, qu'il souhaitait évidemment nous offrir comme sa contribution personnelle au repas.
Etait ce dans une intention ironique ou par désir de bien faire ? Je l'ignore.
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