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Critique de Osmanthe


Ce court récit d'environ 110 pages est bouleversant. L'auteur nous conte une histoire d'amour, de mort, de solitude, et finalement de résilience, dans un cadre naturel, la montagne, la forêt, des plus poétiques.

Le héros narrateur est écrivain. Il a l'âme d'un solitaire. Un été, dans un village de montagne, le destin lui fait rencontrer Setsuko. Ces deux-là sont fait l'un pour l'autre et se fiancent quelques mois plus tard avec la bénédiction du père chéri de Setsuko.

Pourtant, l'horizon s'assombrit déjà lorsque Setsuko tombe malade, atteinte de tuberculose. Dès lors, il décide de l'accompagner dans un sanatorium, au pied du Mont Yatsugatake près de Tokyo où ils vont s'installer le temps que Setsuko guérisse.
Mais le médecin ne cache pas au narrateur et au père de la malade que le mal est très enraciné…L'écrivain comprend que la femme de sa vie est condamnée.

Dans une langue superbe, l'auteur nous fait vivre les tourments de cet écrivain dans l'adversité : sa pudeur, sa volonté de ne pas montrer sa détresse à sa fiancée, son dévouement et son amour poétique et romantique pour elle, mais aussi sa solitude intérieure constante, sa lutte permanente pour gérer ses émotions…L'histoire d'amour entre ces deux êtres est aussi forte que brève dans son vécu terrestre, mais elle perdurera éternellement dans le coeur du survivant.
Un des aspects remarquables est la puissance de la nature, la montagne, la forêt, les oiseaux, mais aussi du climat, la neige, le froid, éléments dans lesquels le héros va sans cesse puiser de la force pour se ressourcer continuellement et faire face malgré tout dans cette situation dramatique.
A tel point qu'après la mort de Setsuko, il y trouvera le courage de se reconstruire, dans une forme de résilience, pour non pas oublier mais vivre avec cette histoire douloureuse. Il avoue ainsi que si son coeur a encore un peu de tristesse, il n'est pas fermé à toute joie.

Ce roman est aussi une forme d'allégorie de la souffrance de l'écrivain dans la création de son oeuvre, le héros écrivant au jour le jour pendant leur séjour au sanatorium son histoire d'amour avec Setsuko, son deuil annoncé et ses états d'âme.

La figure de Setsuko est celle de l'être aimée, icône, idéal... Pourtant notre héros semble parfois s'en détacher, peut-être en raison de la solitude intérieure qu'il a éprouvé toute sa vie et d'une volonté de distanciation, pour se protéger de la souffrance, sa fiancée étant très souvent désignée comme « la malade ».

Cette oeuvre est d'une puissance évocatrice et d'une beauté extraordinaires. Elle est presque mythique. Elle touche d'autant plus qu'elle n'est pas larmoyante, elle raconte simplement la vie, la vie qui continue malgré les épreuves gravées à jamais.

L'auteur tire cette force décuplée de son propre vécu. L'oeuvre est aussi soutenue par une culture étendue des grands poètes occidentaux, Rilke, Valéry (et ce vers magnifique, « le vent se lève, il faut tenter de vivre ») que l'on sent imprégner ces pages magnifiques. Son caractère japonais se révèle dans la place centrale de la nature, du cycle des saisons, qui dépassent le destin de l'homme.

A noter, comme cela a pu être souligné, qu'Hayao Miyazaki s'est bien inspiré de cette oeuvre pour son film animé éponyme de 2013. Cependant, son film est au moins autant consacré au destin professionnel du héros (qui n'est pas écrivain mais ingénieur chez Mitsubishi et inventeur du fameux avion zéro qui servira à son grand désespoir aux kamikazes quelques années plus tard), qu'à l'histoire du couple.

Je vous invite avec enthousiasme à visionner ce film non moins magnifique, mais finalement assez différent, et à faire la comparaison, cela vaut vraiment la peine de ne pas rater ces deux talents hors normes !
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