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3,6

sur 595 notes
Une fois encore je me suis délectée par le style de Jim Harrison, son naturel et son audace à bousculer les phrases et les humeurs, un joyeux cocktail qui pétille et nous émoustille. Partir sur la route, enfiler des kilomètres, traverser les états un à un, et puis cheminer dans la pensée humaine, revenir sur son passé, notamment son petit frère handicapé mort noyé, analyser son mariage brisé, retrouver son fils, s'épancher sur la fougue d'une ancienne connaissance, pleurer la mort de son chien, et poursuivre encore cette route de la vie …



Je n'ai pas lu ce dont je m'attendais, mais contente d'avoir retrouvé Jim Harrison, il est étonnant, et j'aime chez lui, sa manière de lancer en pleine face sa pensée sans prendre quatre chemins. Son humour parfois acide, son cynisme décapant, mais aussi sa façon de s'émerveiller d'un rien, et malgré parfois son langage franc, il sait nous faire rêver de ces grands espaces américains.

Une critique de la société actuelle, notamment cette manie de se balader avec un téléphone greffé dans la paume de la main, ou au fond de sa poche tel un pistolet prêt à dégainer au moindre appel, les nouveaux cow-boy ! je compatis avec lui, un engin soit bien pratique mais toutefois un mouchard, un emmerdeur de première classe, un boulet, un mangeur de liberté… J'aurais tendance à faire comme lui :

« Soudain, je me suis senti mieux : par cette chaleur extrême, la vie sur la route proposait des pensées inédites, et la première m'a poussé à rejoindre les toilettes et mon motel, à lâcher le téléphone portable dans la cuvette et à tirer la châsse. J'ai savouré ce que Robert appelle « un visuel génial » : le tourbillon concentrique de l'eau, un léger frémissement lumineux, et tout au fond la mort inéluctable d'une créature électronique qui a à peine poussé un petit cri. Sayonara, fils de pute, comme on disait dans le temps. »

Page 149 : On dirait bien que tous les éléments de notre culture marinent dans un grand sac plastique et que ces ingrédients sont profondément suspects.

Beaucoup de références littéraires dans ce livre, normal, Cliff était professeur de lettres, un bel hommage à Thoreau par exemple.

Page 157 : Je me suis rappelé que quarante ans plus tôt, pour un cours de littérature, mon professeur avait invité son mentor de Harward, qui avait déclaré : “Au royaume de l'imagination absolue, nous restons jeunes jusque tard dans la vie.”



Page 163 : Entre de brefs trajets en voiture, j'avais marché sur de nombreuses plages et, obnubilé par l'océan, oublié de déjeuner. Je venais de faire ma plus longue balade à Point Reyes, où j'avais observé un groupe de phoques à l'évidence jeunesse qui ne me quittaient pas des yeux. Adossé à un rocher, j'ai sombré dans les bras de Morphée et ils se sont approchés tout près de moi. Tout doucement, je leur ai dit “Salut” me demandant si la pensée et les rêves des phoques n'étaient pas entièrement immergés dans ces rythmes océaniques que je trouvais moi-même si apaisants. J'avais lu quelque part que les requins mangent les phoques, mais ce n'est pas un sort si tragique comparé à un séjour de longue durée dans une salle de cancérologie.

Parfois il nous étonne par ses pensées, sa nostalgie :

Page 187 : Qui suis-je pour que la vie me déçoive ? Cette question me gêne. J'entends d'ici papa crier : “Arrête tes foutes jérémiades !” J'ai l'impression que mes parents meurent plusieurs fois par semaine en moi. Ils s'en vont avec une nuée d'oiseaux de nuit fuyant à tire d'ailes, disons des engoulevents qui prennent leur essor au crépuscule. Tout compte fait, mon frère Teddy était la personne la plus heureuse que j'aie jamais connue. Il n'avait pas beaucoup d'aptitude pour parler, mais il adorait la musique. Quand maman mettait la radio afin d'écouter de la musique classique, Teddy chantonnait des syllabes dépourvues de sens. C'était un vrai fan de Mozart, et dans toute la cuisine ou au salon il dansait comme un fou en écoutant Mozart. Au début je n'avais pas une grande passion pour les oiseaux, mais, assis sur le canapé près de Teddy, j'ai si souvent regardé avec lui les livres consacrés aux oiseaux que j'ai appris à bien les connaître. Quand Teddy se mettait à sentir mauvais, c'était souvent parce qu'il gardait dans sa poche un oiseau mort trouvé dans le jardin ou la forêt. Je pensais à tout ça en franchissant le long pont à étages en direction d'Oakland, ce même pont qui s'était écroulé des année plus tôt lors d'un tremblement de terre. Je me disais que, si Teddy avait eu assez de ressources pour développer une attitude souveraine envers la vie, pourquoi n'en serais-je pas capable à mon tour ?

Page 200 : “Une femme allongée dans un hamac est toujours fidèle, a déclaré Bert. C'est une question de physique, pas de morale.” Sous la lampe et la lumière de la véranda qui éclairaient son visage, Bert faisait plus vieux que son âge. Je me suis dit que c'était probablement dû aux presque quarante années passées à crapahuter dans le désert. Il avait enseigné un moment à l'université locale, mais avait bientôt été “libéré” pour acquérir le statut e scientifique indépendant. J'ai alors supposé que moi aussi je devais certainement lui paraître vieux. Quand on passe le plus clair de son temps au grand air, on n'a guère de chance d'avoir le visage aussi lisse qu'un présentateur télé.

Page 209 : le monde avait acquis une netteté saisissante et j'ai décidé que la pluie était la chose la plus parfumée de la terre entière.

Page 233 : Je suis resté un moment dans la voiture pour réfléchir à cette matinée exceptionnelle où mon projet commençait à prendre forme. Je n'avais certes pas l'intention de devenir écrivain. Je suis beaucoup trop obsédé par les substantifs pour être écrivain. Ces gens-là doivent passer un temps fou à gonfler la périphérie des choses pour remplir un bouquin. Tous les jours, ils ont l'esprit obnubilé par leur travail, alors que je suis un simple marcheur.



En résumé, une belle lecture même si je suis convaincue que ce n'est pas le meilleur de Jim Harisson, pourtant un régal de le lire, le découvrir.


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Cliff, la soixantaine vient de se faire larguer par sa femme. Larguer me direz-vous c'est un peu fort non. Pourtant après 40 ans d'un mariage plutôt harmonieux Vivian est partie avec un ancien copain de lycée, laissant le pauvre Cliff sans toit ni travail. Pour elle, Cliff avait abandonné sa carrière de professeur pour devenir fermier. Pour couronner le tout, Lola sa chienne adorée vient de mourir.
Bien décidé à remonter la pente, le personnage s'embarque pour une traversée des Etats-Unis à bord de son pick-up avec pour seule carte routière, un vieux puzzle des différents états.
En route, il récupère une ancienne élève farfelue qui va lui en faire voir de toutes les couleurs rendant le voyage bien différent de ce qu'il avait prévu au départ.

Si dans un premier temps, les aventures de ce sexagénaire font sourire voir carrément rire à certains moments, je me suis très vite lassée de ce road trip qui ne mène nulle part. le lecteur et le narrateur reviennent finalement au point de départ et l'odyssée américaine est bien loin d'être complète.
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En lisant Retour en terre, je m'étais dit que Harrison vieillissait et, qu'un jour, il allait mourir. Mais peut-être pas. Un odyssée américaine, c'est un cadeau de Big Jim pour ses lecteurs, une nouvelle de Chien Brun, personnage récurent de l'auteur aux moeurs débridées, étalée sur un roman entier. Jubilatoire.
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Cliff a la soixantaine. Ancien professeur de lettres, il est devenu fermier pour s'occuper des terres familiales. Mais Cliff vient de se faire larguer par sa femme, après 30 ans de mariage, pour un ancien camarade d'école... La désillusion est dure : son chien est mort, la ferme va être vendue et il va se retrouver sans activité. Il décide alors de tout larguer et de partir faire le tour des états américains.

C'est dans son périple que nous allons le suivre. Après un départ solitaire, Cliff va bientôt se voir rejoindre par une ancienne étudiante un peu fêlée qui lui accorde ses faveurs. Loin de se passer comme il l'avait prévu, le voyage va devenir prétexte à revenir sur le passé et à découvrir l'insouciance d'une vie sans contraintes. de nombreuses digressions nous font partager ses pensées et reviennent sur son enfance, sa vie de couple, son travail de professeur et de fermier. On y retrouve la passion de l'auteur pour les femmes, le sexe ( pas mal de sènes explicites), son amour de la nature. Cliff remet en question ses choix de vie et s'interroge sur le fait de recommencer une nouvelle vie à son age.
Parfois, le ton humoristique est de mise, plus particulièrement dans la description de ses relations avec Maybelle et on se délecte de certains passages.

« C'était là un cul capable de déclencher une guerre, et je me suis senti très privilégié d'en avoir l'usage momentané, sachant combien j'allais le regretter dès qu'il serait parti. »

Pourtant, je n'ai pas trouvé que c'était le chef d'oeuvre annoncé... Il est bon, se lit avec plaisir mais on en ressort un peu déçu. Les personnages évoluent assez peu et la fin est plutôt décevante, selon moi.
Au final, je n'en ai pas ressortie grand chose. Je suis restée un peu sur ma faim. le road-movie attendu retombe comme un soufflé... Dommage.
Lien : http://legrenierdechoco.over..
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Découverte de cet auteur américain qui m'étais inconnu jusqu'ici.

Les dix premières pages - à savoir le vieux narrateur qui se fait larguer par sa femme après bien des années de mariage - m'ont laissé espérer un style à la Bukowski, désabusé, irrespectueux, sec et drôle.
Attente assez rapidement déçue...
On est ici dans du simili-Bukowski, la présence d'une certaine poésie de la Nature en plus.

Ci et là, quelques rares situations ou dialogues s'avèrent cocasses et drôles, à peine quelques paragraphes où pointe une poésie timide. Mais au bout du compte, lorsqu'on a lu pas mal de nouvelles de Bukowski, subsiste cette impression qu'Harrison cherche à imiter ce style, sans y parvenir vraiment de manière convaincante.

Alors j'ai peut-être tendance à trop vouloir rapprocher le style de Harrison de celui de Bukowski, déformation de lecteur certainement arbitraire de ma part... mais je n'ai pas pu en faire abstraction : un grand nombre de situations, d'attitudes langagières, me remémoraient des souvenirs de lecture prégnants liés à Bukowski.

Le choix du terme "odyssée" du titre, est un choix que je qualifierais de disproportionné eu égard aux ambitions affichées par le roman : ni voyage intérieur à proprement parler (les remises en question du narrateur par rapport à son vécu, ne sont pas d'une grande universalité), encore moins escapade géographique d'ampleur (je n'y ai pour ma part trouvé aucun souffle narratif qui insuffle à cette cavale un caractère épique, ni même un quelconque aspect picaresque tonifiant).

Une déception donc, puisque je m'attendais à un "road-movie" littéraire sinon d'ampleur, au moins relevant d'une vigueur dramaturgique plus entraînante, malheureusement absente.
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Cliff est un personnage profondément humain et attachant, un « bon vivant », à bien des égards, il m'a fait penser à Chinaski, le héros récurrent des romans de Bukowski.
Que dire de ses ambitions littéraires, pour le moins fantaisistes ? En effet, le héros de ce roman nourri l'ambitieux projet de renommer à la fois les oiseaux et les cinquante États d'Amérique.
L'identification du lecteur au héros sexagénaire fonctionne parfaitement et même si ce roman parle du désir et des rêves après soixante ans, Jim Harrison s'adresse en fait à chacun d'entre nous, lorsque survient ce que l'on appelle communément un « accident de la vie », deuil, rupture, chômage, maladie ou dépression, et que nous nous retrouvons à un carrefour de notre existence.
Pour Cliff, son divorce est paradoxalement la chance de sa vie quand il réalise l'opportunité qui s'offre à lui, celle de réaliser les choses, petites ou grandes, qui lui tiennent vraiment à coeur.
À mesure qu'il traverse chaque État, son périple se mue en une introspection et en un voyage dans le passé. Il se remémore son enfance aux côtés d'un frère handicapé, tragiquement disparu, il se souvient de sa rencontre avec Vivian, du temps où elle n'était pas encore cette femme dévorée par l'ambition professionnelle et obsédée par ses problèmes de surpoids. Il se rappelle aussi les raisons qui lui ont fait renoncer à l'enseignement pour se reconvertir dans l'agriculture. Enfin, il prend conscience de sa part de responsabilité dans l'échec de son mariage et réalise la grande solitude où l'a menée sa vie d'agriculteur, une vie entièrement dédiée à la bonne marche de son exploitation.

Cette « odyssée américaine » ne serait pas ce qu'elle est sans les évocations, en filigrane, des deux grandes passions de l'auteur de « Légendes d'automne », je veux parler ici de son amour de la nature et de la littérature. À chaque page de ce roman, Jim Harrison nous fait l'amitié de partager avec nous, ses lecteurs, son goût infini pour de grands poètes et auteurs américains comme Thoreau et Emerson.
C'est avec regret que j'ai laissé Cliff à la dernière page, un Cliff sans doute plus serein et épanoui qu'au début du roman, moi j'aurais bien fait encore un bout de route en sa compagnie !

Lien : http://lameraboire.over-blog..
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L'histoire rocambolesque d'un sexagénaire largué par sa femme et qui traverse tout l'ouest des USA à la recherche d'un nouveau souffle à donner à sa vie. A chaque fois on découvre la devise de l'Etat traversé, l'animal et la plante qui en sont les emblèmes. Plein de remarques acidulées sur les contradictions de notre vie, la difficulté de suivre les innovations techonologiques..Ce carnet de route est une ode à la Nature et à la recherche des véritables valeurs humaines.
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Un fabuleux voyage et une sacrée remise en question !
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Absolument jouissif ! Un hymne à la solitude !
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Un grand roman des grands espaces. Une belle découverte.
Lien : http://madimado.com/2010/12/..
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