Même quand elle n’avait pas peur de lui, elle se tenait sur ses gardes, marchait sur des œufs, s’assurant constamment de ne pas le contrarier ni le décevoir. Il était si difficile à satisfaire, et toute cette tension commençait à lui peser atrocement, à tel point qu’elle ne savait pas ce qui était pire : se faire cogner ou anticiper l’attaque. La vie était si déroutante en ce moment, surtout quand il s’excusait et lui affirmait à quel point il l’aimait et que cela ne se reproduirait plus jamais.
Sa douceur l’incitait presque à la violence. Pourtant, malgré tout ce qu’il lui faisait subir, elle persistait à faire preuve de compréhension : il la battait, la faisait crier, hurler, demander grâce. Après, il se rabrouait en se disant que ce n’étaient pas des manières de gentleman, mais quand il était en colère et qu’il perdait le contrôle, il se foutait bien de se comporter en gentleman.
Il souffrait d’un sentiment d’infériorité ; pensait que les autres le voyaient comme inculte, stupide, le considéraient comme une cible légitime de moqueries. Savoir qu’on riait de lui – surtout s’il connaissait la personne qui se foutait de sa gueule – était le pire des sentiments. Cela le mettait dans une telle fureur qu’il n’était plus maître de ses actes.
Si les femmes n’avaient que faire de la puissance d’un moteur, la sécurité était pour elles un sujet sensible, qu’elles comprenaient. Comme il était malin d’avoir trouvé la meilleure approche pour convaincre Rosie ! Il se rengorgea. Le fait d’être aussi psychologue, aussi intuitif, était une preuve d’intelligence.
Posséder une voiture adéquate et puissante était une priorité, mais, visiblement, pas une priorité féminine. Les femmes préféraient s’offrir des vêtements et des sacs à main. Mais, à force de patience, il finirait bien par la convaincre. Et elle verrait bien qu’il avait raison.