Citations sur Germania (38)
Le Parti aidait certes des mères célibataires à mettre leurs enfants au monde – si ceux-ci étaient bien sûr de « sang pur » –, mais il ne le faisait pas par philanthropie. Dans cet endroit en apparence idyllique, on était aussi en état de guerre. Même si ce qui se tramait dans ce centre n’avait aucune influence directe sur la situation actuelle sur le front russe, on préparait les conflits futurs. Les nazis renforçaient leur armement, non pas avec de nouvelles machines meurtrières, mais avec du matériel humain. Chaque femme de ce pays avait le devoir de fournir le plus d’enfants possible au régime ; en récompense, on lui décernait la croix d’honneur de la mère allemande pour avoir donné à la patrie des fils qui serviraient à l’avenir de chair à canon. Dans les foyers du Lebensborn devaient naître les futurs cadres du Parti. Une élite au sang pur qui, dans l’esprit de Hitler, prendrait par la suite les rênes du Reich.
— Alors comme ça, vous êtes juif, Oppenheimer ?
— En effet.
— Ça peut arriver, commenta le ministre. Mais le Hauptsturmführer Vogler semble tenir vos talents de commissaire en grande estime. Cela étant, personne ne doit apprendre que vous êtes d’origine non aryenne. S’il n’y avait pas votre nom pour vous trahir, on pourrait vous prendre pour un citoyen allemand de sang pur. Je suppose que vous bénéficiez d’un autre logement pour la durée de l’enquête ?
Oppenheimer le regarda d’un air étonné.
— J’habite dans une maison juive.
— Et comment faites-vous le matin pour vous rendre au travail ?
Oppenheimer hésita. Il ne savait pas où le ministre voulait en venir. Vogler répondit pour lui :
— L’un de mes hommes passe le prendre tous les matins. Nous avons aménagé un bureau pour lui dans la colonie de Zehlendorf.
Goebbels bondit de son siège.
— Vous avez perdu l’esprit, Vogler ? Il faut mettre un terme à ces trajets inutiles. Fournissez-lui un logement près de son bureau, mais en aucun cas dans une maison juive !
Il pivota vers Oppenheimer et ordonna :
— Jusqu’à la fin de cette enquête, je vous relève de votre appartenance au peuple juif. À partir de maintenant, vous serez traité comme un Aryen. Un point c’est tout. Vogler s’occupera du nécessaire. Merci, messieurs.
Complètement dérouté, Oppenheimer ne sut que répondre. Il ignorait que le ministre de la Propagande avait le pouvoir d’exclure quelqu’un de sa communauté religieuse. Qu’allait-il se passer à présent ? Son prépuce repousserait-il par l’opération du Saint-Esprit ?
«Richard, versprichst du mir, abzutauchen ?»
Oppenheimer grummelte unverständlich vor sich hin. Er hasste es, wenn Lisa ihm ein Versprechen abverlangte. Das war ihre Art, Befehle zu geben.
(«Richard, tu me promets de te mettre à l'abri ?»
Oppenheimer grommela dans sa barbe. Il détestait ça, quand Lisa lui soutirait une promesse. C'était sa façon de lui donner des ordres.)
Il examina attentivement les cheveux noirs gominés de Goebbels et son nez proéminent. Vogler, avec ses traits grossiers, ne correspondait pas non plus à l’idéal de beauté national-socialiste. Oppenheimer sourit intérieurement. Dans cette pièce, lui, le Juif, était celui qui ressemblait le plus à un Aryen. C’était le monde à l’envers.
- J'aimerais tester la qualité du matelas, dit Oppenheimer en quittant ses chaussures.
(...)
Oppenheimer voulut s'étirer voluptueusement lorsqu'il remarqua la mine réprobatrice de Lisa.
- Ca coupe vraiment toute envie, fit-elle en posant les poings sur les hanches.
Son regard était rivé sur le mur derrière lui. Oppenheimer se retourna et découvrit le cadre accroché au-dessus de la tête de lit. En se redressant, il vit le Reichsfürhrer Heinrich Himmler qui l'observait gravement à travers ses lunettes rondes.
Himmler était-il ici pour inciter ses ouailles de la SS à concevoir de futurs petits nazis ?
- Trop, c'est trop, grogna Oppenheimer en tournant le cadre.
- Je préfère que tu me le dises tout de suite : y a-t-il d'autres portraits de bonze du Parti dans la maison ?
- C'est un vrai musée des horreurs, répondit Oppenheimer. A la cave, au-dessus de la radio, se trouve un portrait de notre ami Goebbels. Et nous en avons également un de Göring boudiné dans son uniforme. Devine où il est accroché.
- Dans le garde-manger ?
Lisa se mit à pouffer. Cela faisait bien longtemps que le commissaire ne l'avait pas entendue rire.
L’endroit était froid, aseptisé. Seul le tic-tac sonore de la pendule murale transformait le silence en secondes.
Les hautes bibliotheques remplies de livres semblaient constituer une sorte de rempart spirituel qui protegeait Hilde de la folie qui faisait rage a l'exterieur du domaine.Les oeuvres bannies trouvaient ici un asile et une gardienne courageuse
- Elle a travaillé au Lebensborn ? Et le foyer ne ressemble pas à un bordel de luxe aryen ?
- Non, mais on y croise de drôles d'olibrius.
- Ça m'aurait aussi étonnée que les nazis puissent lever autre chose que le bras droit. Si c'était le cas, ils se seraient déjà reproduits dans des éprouvettes.
Jusqu'a la fin de cette enquete,je vous releve de votre appartenance au peuple juif.Completement deroute,Oppenheimer ne sut que repondre.Il ignorait que le ministre de la Propagande avait le pouvoir d'exclure quelqu'un de sa communaute religieuse.Qu'allait-il se passer a present?Son prepuce repousserait-il par l'operation du Saint-Esprit?
À quelques mètres de là, au bord de la route, Oppenheimer aperçut la carcasse noire d'un landau. Cette image lui fit comprendre douloureusement que les adversaires de Hitler, pour gagner la guerre, étaient prêts à sacrifier leurs nobles idéaux à un rationalisme cynique. (…) On pouvait se demander à juste titre si tous les hommes étaient égaux devant Dieu mais, en ce qui concernait les bombes, il n'y avait aucun doute : elles n'épargnaient personne. La question de savoir jusqu'à quel point les bons pouvaient se montrer méchants lorsqu'ils combattaient le mal ne se posait plus pour Oppenheimer. À la terreur, les Alliés répondaient avec la terreur.