La mort sur ses épaules

C'est avec un récit à la fois sensible et dur que l'auteur a choisi pour nous emmener dans une Amérique rurale des laissés pour compte. Lynch, une bourgade de l'état de Virginie, un trou perdu enclavé entre montagnes et forêts et qui ne doit sa survit que des quelques mines de charbon encore en activité, mais plus pour longtemps. Ici le taux de chômage est élevé, alors il ne reste que la « débrouille » ou le trafic de stup. À Lynch les jeunes ont le choix de s'exiler dans les grandes métropoles ou de finir dévorés par les addictions et la violence puis incarcérés au centre de détention pour mineurs, « La Carcasse», où se déroule la majeure partie de ce roman. On va y suivre trois personnages : Huddles Gilbert incarcéré pour trafic de drogue, délit de fuite et port d'arme. Son frère aîné, Ferris, est le caïd impitoyable dans et autour de la ville. Seul le shérif Thomson ose le défier et tente d'utiliser Huddles pour le faire tomber, il en paiera le prix fort. Pour Huddles la prison sera son exutoire, lui permettra de se libérer de la mainmise de son frère. Autre personnage Terry Blankenship, un junkie homosexuel qui vivote de petits travaux et de cambriolage jusqu'à se retrouver lui aussi à la Carcasse. Alors que tout les oppose, une belle histoire d'amitié verra le jour entre ces deux écorchés vifs. Ils y croiseront Jason Felts, l'assistant social, handicapé physique, qui voudrait tant aider ces gamins paumés à s'en sortir, mais le veulent-ils et le peuvent-ils ?
Dans ce roman infiniment noir, l'auteur, dont c'est le premier livre, a réussi à m'embarquer grâce à ses personnages, ces écorchés vifs, à la difficulté d'aimer ou d'être aimé. Une écriture âpre, des personnages attachants, un récit crûment réaliste qui nous fait découvrir l'autre Amérique, loin des strasses et des paillettes, et un milieu carcéral qui n'a rien à voir avec nos « colonies de vacances », qui interroge et n'épargne pas la sensibilité du lecteur, si toutefois il en a ! Bonne lecture.

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