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Critique de Kirzy


Kirzy
07 février 2022
La Virginie-Occidentale, ses Appalaches, ses forêts ses paysages ravagés aux montagnes striées dépouillées de leur dernière once de charbon, la dépression économique depuis la fermeture des mines et usines, la misère urbaine, la toxicomanie généralisées chez les jeunes addicts aux opioïdes ... le territoire est familier pour les amateurs de rural noir américain ; de Ron Rash à David Joy, de Chris Offutt à Daniel Woodrell en passant par Brian Panowich, d'excellents romans ont creusé le genre.

Si le premier roman de Jordan Farmer ne renouvelle pas le genre en soi, il est extrêmement prometteur dans sa faculté à rebattre les cartes en construisant son intrigue autour d'une distribution peu orthodoxe : Jason, conseilleur dans un établissement correctionnel pour mineurs surnommé la Carcasse, marginalisé par son apparence, ne mesurant qu'1m50 ; Huddles, le membre réticent d'une famille de criminels menée par Ferris son terrible frère ainé, qui se retrouve à la Carcasse après une course poursuite nocturne dans une voiture chargée de drogues et d'armes ; et Terry, jeune toxico homosexuel rejeté par son père, arrêté pour cambriolage à la recherche de cachetons, il doit de l'argent à Ferris ...

Au début, je me suis dit que le choix de caractériser deux personnages par leur nanisme ou leur homosexualité sonnerait un peu artificiel. Et il est vrai que l'auteur n'exploite pas toutes les possibilités offertes par ces déterminants, il pouvait aller plus loin avec eux. Toutefois, plus le récit avance, plus on se rend compte que ces personnages ne sont pas de simples marionnettes sans autre caractéristique, notamment Jason. Jordan Farmer construit soigneusement chaque personnalité jusqu'à ce que leurs failles et leurs douleurs nous semblent réelles et non une simple collection de malheurs arbitrairement distribués par l'auteur.

Les jeux dangereux entre ces trois personnages périphérie sociale se déploient dans une spirale de violences qui résonne avec le décor délabré d'une petite ville pressurée par la crise, symbole d'une Amérique rurale à la dérive. Il y a peu d'échappatoire dans ce premier roman bien mené, souvent désespérant si ce n'est le petite lumière allumée par le beau personnage de Jason, le seul à croire encore en l'humanité et ne pas être totalement sali par la brutalité d'un déterminisme économico-social destructeur.
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