Notre vocabulaire est plein d’expressions qui font référence à l’odorat pour dire d’instinctives perceptions – « c’est curieux, je ne peux pas sentir Untel », « ce projet fleure bon », « dans cette affaire j’ai eu du nez ». Sans parler d’avoir quelque chose « dans le pif » ou d’être « en odeur de sainteté ».
C'est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Arthur Rimbaud, Le dormeur du val
Quand on vit au milieu des roses on en prend malgré soi le parfum.
Proverbe russe.
Une femme sans parfum
est une femme sans avenir.
(Coco Chanel)
L’odeur est l’intelligence des fleurs.
(HENRY DE MONTHERLANT)
Il n’y avait, sous le plafond bleu, que le parfum étouffant des fleurs. Et il semblait que ce parfum ne fût autre que l’odeur d’amour ancien dont l’alcôve était toujours restée tiède, une odeur grandie, centuplée, devenue si forte, qu’elle soufflait l’asphyxie. ( E.ZOLA)
Les tilleuls sentent bon dans les bons soirs de juin !
L’air est parfois si doux, qu’on ferme la paupière ;
Le vent chargé de bruits, – la ville n’est pas loin, –
A des parfums de vigne et des parfums de bière… ( A RIMBAUD )
J’aime fort les jardins qui sentent le sauvage ;
j’aime le flot de l’eau qui gazouille au rivage. (RONSARD)
L’odorat sera toujours en avance sur l’observation, le goût, le dégoût, et même l’intelligence. Le nez n’est-il pas placé, comme par hasard, à la proue du corps, devant les yeux et les oreilles ? Il « marche » devant nous, en première ligne, pourrait-on dire. Il nous renseigne sur les choses, les endroits, les gens que nous appréhendons, de la manière la plus directe, la plus animale. On ne peut analyser, raisonner l’odorat : il est un radar sauvage – un radar que nous n’écoutons pas toujours mais dont nous sommes bien obligés de subir les informations.
Il a reconnu la nuit au goût de l’air dans son nez.
C’était une odeur de boue et de mousse d’eau. Il a bougé doucement sa langue et ses mâchoires comme pour mâcher cette odeur et voir au fond si ça ne ferait pas souvenir de quelque chose.( J. GIONO)