Se défendre… Laissez-moi rire ! Elle est haute comme trois pommes et dans le meilleur des cas, savoir se défendre devait signifier mordre ou griffer !
Le fait d’avoir vingt-neuf ans et être une jeune divorcée suffisait déjà aux commérages. Si en plus on ajoutait qu’un peu plus de deux auparavant, j’avais perdu mon jumeau dans des circonstances dramatiques et que j’avais quitté le nid pour fuir à l’autre bout du monde, je ne doutais pas une seconde que j’allais être la cible de bavardages.
Je n’arrivais pas à prononcer son nom et le simple fait d’y penser fit remonter mes angoisses les plus profondes. Il m’avait répété sans cesse combien j’étais belle, combien il m’aimait. J’avais l’impression de sentir encore sa main sur la mienne. Me levant, je me dirigeai vers la salle de bain et allumai la lumière. Elle était vive, criarde et devant le miroir qui me fit face, j’observai mes traits.
Tu es si jolie !
Je me pinçai vivement les joues tant je crevais d’envie de me défigurer là, tout de suite !
Pourquoi je pense à cette fille ?
S’il y a bien une chose dont j’étais sûr, c’est que je ne voulais pas m’attacher à quelqu’un. Ma vie était bien trop dangereuse et je n’en avais pas le temps.
Et puis c’est la fille de ton proprio ! Si tu couches avec, t’es fichu !
Ma mère ne me connaissait que trop bien et savait à quel point je pouvais être une garce. Depuis toute petite, j’avais toujours pris un malin plaisir à faire tourner les gens en bourrique. Les pousser à la limite de leur patience m’amusait.
J’avais une sainte horreur de tout ce qui touchait de près ou de loin aux tâches ménagères et vu l’espace que disposait cette habitation, j’allais me transformer en Cendrillon des temps modernes.
Je m’étais mariée de connivence avec un riche français qui avait eu besoin d’une façade amoureuse pour cacher son homosexualité le temps de récupérer un héritage. En contrepartie, je bénéficiais des avantages de sa carte gold et je pouvais coucher avec d’autres comme bon me semblait.
Pute ?
Non quand même pas…
On s’était envoyé en l’air ensemble une fois. Il voulait savoir s’il était cent pour cent homo et de mon côté j’étais en manque de sexe. Au moment de jouir, il m’avait demandé de me tourner pour imaginer prendre un homme et c’est là qu’on avait su. Il y était indéniablement et on avait stoppé cette mascarade sur un éclat de rire.
Je n’avais jamais été timide avec les hommes, loin de là, pourtant aujourd’hui je n’étais pas d’humeur à tester mes pouvoirs de séduction ; car oui, je le savais, j’étais quelqu’un de joli et lorsque j’avais une proie en vue, j’arrivais toujours à mes fins.
J’avais horreur de ces vieux bedonnants qui tentaient de vous tenir une discussion, et pire encore, ceux qui vous draguaient avec un humour gras.
Je vis, je vole, je virevolte.
Telle était devenue ma façon de voir la vie, ou du moins j’essayais.
Depuis deux ans, j’avais quitté mon pays natal pour voyager.
Fuir disaient certains, et ils avaient certainement raison. Sur un coup de tête, j’avais décidé de faire ma valise et de prendre un aller simple pour l’Australie.
Pourquoi l’Australie ? Je n’avais pas d’idée précise, mais ce pays m’avait toujours fasciné. Une fois sur place, je vivais de petits boulots de serveuse dans des pubs, pour économiser, puis je passais à la ville suivante. C’était comme ça que j’avais réussi à faire le tour de ce pays, et j’en gardais de magnifiques souvenirs.