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Critique de horline


L'Afrique de Mia Couto est loin d'être une invitation au voyage. Il laisse plutôt entrevoir une réalité sombre et désolée, une terre brûlante ravagée par les conflits et les guerres dont les femmes sont des victimes expiatoires. Lorsqu'elles ne subissent pas la violence des hommes, elles sont la proie des lions qui règnent autour d'un village abandonné du Mozambique, Kulumani, «endroit fermé, cerné par la géographie et atrophié par la peur».
Avec l'arrivée d'un chasseur professionnel, on se dit qu'il mettra fin à cette terrible série d'une vingtaine de femmes dévorées par les fauves. Mais avec un récit plein de mystères et de mysticisme, Mia Couto emmène le lecteur dans un univers particulier, un monde aux frontières brouillées où les esprits accaparent l'âme des vivants, où les personnages captent les ondes secrètes d'un autre langage, celui des malédictions et des croyances ancestrales. Pour le lecteur ordinaire c'est un récit baigné d'une réalité invisible, voire impénétrable à laquelle il n'est pas toujours évident d'accéder. A moins que Mia Couto s'amuse à égarer le lecteur ...
D'autant plus que l'auteur alterne la voix du chasseur, lui-même poursuivi par ses propres démons et celle de Mariamar soeur de la dernière victime, on la découvre spectatrice de sa propre vie, une vie dramatique et énigmatique qui menace de la plonger dans la folie. Conjuguées mais distinctes, les voix de ces personnages aux vies intimes intenses se percutent pour faire surgir une vision sauvage et chaotique. On devine le véritable paysage que chacun porte en lui, mais ces récits tout en intériorités projettent les deux personnages dans plusieurs directions, si bien qu'au cours de la lecture on se demande si les lions sont bien réels. Entre les animaux existants mais quasi-absents tout le récit, les fétiches fabriqués par les sorciers et les hommes-lions issus de hiérarchies puissamment ressenties qui condamnent la dignité des femmes, injustement bafouée, on est parfois confronté à une multitude de pistes d'interprétation savamment entretenue par l'auteur...

Reste que ce qui séduit dans La confession de la lionne, c'est de retrouver la plume souveraine et ensorcelante de l'auteur, il y a toujours le charme d'une phrase accomplie qui opère, une poésie sombre et mystique qui jaillit à la surface de la prose, conférant au texte une beauté évidente. Une beauté asphyxiante aussi car il faut résister à la chape de plomb qui pèse au fil du texte.
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