Monsieur Remarquable a un visage qui ne laisse personne indifférent. de cette fascination qu'il opère chez les autres naît également une haute estime de lui-même chez notre personnage. Une estime qui se transforme d'ailleurs en monomanie : Monsieur Remarquable devient accro aux selfies. Tant et si bien que son narcissisme se confond au son des clic ! clic ! clic. Mais au fil des jours et à force de photos, son visage s'efface… Ne supportant plus sa face vaporeuse, Monsieur Remarquable va commettre l'effroyable : s'acheter un nouveau visage.
Cet album nous plonge dans un univers fantastique pour ne pas dire fantasmagorique, imprégné d'une inquiétante étrangeté, où de la fiction naît l'angoisse.
Nous avons là un album profond, d'une beauté incroyable*, qui rappellera, sans hésitation aucune, le magnifique
Une âme égarée du même duo, et dont le parallèle avec notre propre époque ne fait pas l'ombre d'un doute. Et justement, d'ombres il est question. Car à trop vouloir être unique, n'en finirait-on pas par devenir l'ombre de soi-même, à l'image du personnage principal qui commettra l'invraisemblable ? Et dès lors que notre personnage s'achètera un nouveau visage se transformant par là-même en anti héros ne symbolisera t-il pas la désacralisation de la chair ? C'est du moins ce que la lectrice que je suis en retient. Une lecture dont le sens s'imprègne dans les méandres de notre esprit pour nous rappeler que la vie c'est ici et maintenant. En effet, les artistes brossent en filigrane une société hyper connectée et individualiste qui, à force de clic ! clic ! clic finit par perdre le sens du réel. Pixel versus réel, ne nous y trompons pas. Aussi, assurément et sans concession, c'est le personnage éponyme de
Monsieur Personne de
Joanna Concejo que je vous invite à imiter afin de disséminer quelques étoiles.
Ainsi, vous l'aurez saisi, les artistes livrent ici une réflexion profonde en nous invitant à nous interroger sur nos perceptions, de nous-même et du monde qui nous entoure.
Alors de grâce, abandonnons cette technologie à portée de main et de clic, et concentrons nous sur le réel au bout des doigts.
« Les âmes n'ont plus leur tête, et les hommes finissent par ne plus avoir de coeur. Les âmes savent bien qu'elles ont perdu leur propriétaire, mais les gens, eux, ne se rendent souvent même pas compte qu'ils ont perdu leur âme. »
Olga Tokarczuk in
Une âme égarée.
« Si quelqu'un pouvait nous regarder d'en haut, il verrait que le monde est rempli de gens pressés, qui courent dans tous les sens, fatigués, en sueur, mais il verrait aussi leurs âmes égarées, à la traine… »
Olga Tokarczuk in
Une âme égarée.