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Critique de Tiphrom


Inconvénients d'une hérédité rayonnante… Telle est la ligne de départ d'une course folle de l'auteur, à travers lui-même et de branches en branches d'un arbre généalogique chargé. Course avec ou sans fil conducteur. Si pourtant, ce fil rouge existe : c'est la douleur. Laquelle ? « That is the question ». La douleur semble une composante ontologique de la plume du romancier. Elle est là et elle pèse. Et lorsqu'elle fuit, elle ne fait que changer de porte d'accès, de forme, de moyen.

L'auteur et personnage principal de ce roman autobiographique, cette autofiction si le genre est désormais reconnu (je lui trouve d'ailleurs une certaine noblesse, mais là n'est pas le propos), fuit vers une lointaine province russe où rien ne se passe, où rien ne semble permettre d'extraire la lumière d'une nuit sociale et sentimentale, un brouillard de l'ambition, un orage d'alcool, de drames et de banalités. C'est dans cette Russie là qu'il cherche à sentir le poids de son passé, la présence de son grand-père, cette histoire que sa mère garde jalousement. C'est aussi là qu'il fuit une improbable histoire d'amour avec une femme plus torturée que lui encore. Pourquoi ce bled paumé ? Parce que. Pour y faire quoi ? Attendre. Il se passera bien quelque chose. Et s'il ne se passait rien ? Serait-on vraiment obligé de regarder au fond de soi ?

L'auteur-protagoniste tentera une folle expérience, celle de la nouvelle érotique, l'exhibitionnisme littéraire, pour reconquérir cet amour qui disparaît, qui s'évapore. Mais lorsque tout s'effondre à l'intérieur des êtres, il est illusoire de croire que les artifices de la création peuvent sauver ce qui n'existe plus. Accepter une rupture c'est vivre l'échec de soi, de ce sur quoi l'on a construit l'espoir d'un devenir. C'est une remise en cause. Dans le cas de ce roman ce sera peut-être une délivrance. Car la rupture contée sur plus de cent pages est d'une cruauté rarement atteinte.

Faire mal à l'autre pour ne pas s'effondrer soi-même. Rechercher les réponses aux questions que les siens ne veulent pas poser. Attendre que l'extérieur agisse pour éviter de s'impliquer soi-même, regarder les autres pour ne pas se voir tel que l'on est. L'écriture est implacable, le roman puissant, la douleur froide. Comme endurcie par les longs hivers russes…
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