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Critique de Patsales


Quand je lis Carrère, j'ai l'impression d'être une marquise poudrée du XVIII°, découvrant avec une délectation outragée les "Confessions " de Jean-Jacques Rousseau. Mais un Jean-Jacques moins naïf car connaissant son Freud illustré sur le bout des doigts.
Mais si "Confessions " annonçait la couleur, pourquoi appeler ce récit "roman ", d'autant plus que Carrère précise qu'il n'écrit pas d'auto-fiction.
Je me suis demandée si le titre n'était pas justifié par le désir de Carrère de tout transformer de sa vie en matériau littéraire. Ou plus exactement de se comporter avec les vraies gens de sa vraie vie comme Balzac avec ses personnages : en créateur omniscient. L'exemple le plus frappant étant bien sûr l'écriture d'une nouvelle dans laquelle il ordonne à son amoureuse de ne plus être qu'une créature de papier obéissant à ses fantasmes. Quant au coup de la bague (ceux qui sont allés au bout du livre comprendront), il vaut l'appel désespéré De Balzac au médecin de la "Comédie humaine " sur son lit de mort.
Et aussi le recours incessant à la causalité. Tout est signifiant dans un roman. Carrère écrit sa vie comme il construirait un roman : le grand-père russe étant la situation initiale, sa rupture avec Sophie la situation finale, la nouvelle l'élément déclencheur, la Russie l'auxiliaire et Môman l'opposant. Et quand le drame arrive, en l'occurrence la mort d'une jeune femme et de son enfant, Carrère le reconnaît comme élément évident et nécessaire de sa propre histoire.
Mais Sophie a une vie en dehors de celle que son écrivain de génie a prévue pour elle, et Emmanuel perd le contrôle.
Mais pas au point de gratter là où ça pourrait faire vraiment mal. le grand-père est certes un admirateur de Mussolini et d'Hitler mais c'est un brave homme. Ben voyons. C'est peut-être vrai d'ailleurs mais l'enquête prend fin avant d'avoir commencé. le grand-père est un fou dostoievskien, tout en slavitude, ça c'est dicible et pittoresque. Mais nazillon? La question n'est jamais posée.
Ça pourrait être dérangeant mais en fait on s'en fout. La lucidité affichée de l'analyse et la précision impeccable de la langue, voilà ce qui fait qu'on aime Carrère. Que sa vie ne soit pas aussi au point que ses livres n'est un problème que pour lui.
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