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Critique de motspourmots


J'adore les scénarios de politique-fiction de Thomas Bronnec et je n'ai absolument pas été déçue. Dévoré en un week-end dès sa sortie. C'est terriblement actuel et très dérangeant. Comme d'habitude, l'auteur - journaliste - joue avec subtilité de sa fine connaissance de la politique et de ses réseaux ; sa matière est faite de l'information telle qu'elle nous est livrée au fil des jours mais il la malaxe, la triture, la façonne pour nous en concocter une version légèrement dystopique qui semble plus réelle que la réalité. Et là, ça fout un peu les chocottes.

A la suite d'un concours de circonstances pas forcément prévisible, Pierre Savidan a été élu Président de la République trois ans auparavant. Personnage sulfureux, sorte de gourou écologiste au passé trouble, il a mis en place des mesures drastiques en faveur de l'environnement dont l'outil principal est un système de scoring qui évalue les comportements de chaque individu avec un principe de bonus et de malus. Autour de lui, les positions radicales de certains réclament d'amplifier le mouvement ce qui favorise l'émergence de conflits de plus en plus violents face à ceux qui tentent de résister et dénoncent les privations de liberté. Les scènes d'ouverture du roman sont très parlantes voire choquantes, on est tout de suite dans le bain. Les esprits s'échauffent et les luttes d'influence s'intensifient à l'intérieur même du cénacle politique tandis que le président d'un grand groupe alimentaire, archétype de l'exemple combattu par les tenants d'actions radicales, devient le symbole de la résistance.

Le sentiment de malaise distillé au fil des pages vient du fait que les ingrédients nous sont familiers. Des centres de rééducation ? Il suffit de regarder l'histoire des dictatures. le danger de la stigmatisation qui nourrit les haines et débouche sur la violence ? On en voit tous les jours. Thomas Bronnec brosse parfaitement la solitude du pouvoir, les jeux politiques, la perversion de certaines influences, la tentation de l'abus de pouvoir et la folie qui n'est jamais bien loin. Il pousse les curseurs, jongle avec les questions qui sous-tendent les débats autour des enjeux climatiques : peut-on mener (imposer ?) le changement sans violence ? Faire le bien des individus malgré eux et forcer leur degré d'acceptation ? L'intrigue est en permanence sur un fil et c'est en cela que le livre est réussi : on est saisi par la révélation de la fragilité des remparts institutionnels que l'on pense inébranlables, et surtout par l'idée que ce type de concours de circonstance électoral est tout à fait possible quelle qu'en soit la couleur politique.

J'ai particulièrement apprécié le traitement des personnages féminins qui sont ici déclinés dans toute une palette de caractères, de statuts, de fonctions et d'humeurs ce qui n'est pas si fréquent, et font tout sauf de la figuration. Résultat : un roman très réussi, une lecture hyper addictive mais pas hyper rassurante. Raison de plus pour s'y intéresser.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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