La France regorge de talents, mais il y a pénurie de décideurs pour permettre à leurs projets d'aboutir (mentalité IIIe République : être rentier, pas entrepreneur). du coup, il faut s'expatrier pour trouver chaussure à son pied… le projet rétrofuturiste consacré au personnage d'Ironman ayant été recalé par
Marvel Comics, le talentueux
Xavier Dorison a décidé de transformer son projet et on se retrouve avec les détournements grimdark de Captain American, Ironman et Rocketeer dans un mélange entre "Les Sentiers de la gloire" de
Stanley Kubrick (vous savez, ce film interdit en France jusqu'en 1975 parce qu'il fallait laisser tranquille les bouchers de la WWI et de la Guerre d'Algérie) et "Robocop" de Paul Verhoeven (vous savez, le film qui parodiait l'agonie de la ville de Détroit euthanasiée par les remèdes de chevaux des Chicago Boys néolibéraux) !
On passe donc du cyberpunk au dieselpunk et on sent les influences des comics punk du magazine anglais 2000 A.D., qui était entré en résistance avant de déclarer la guerre à
Margaret Thatcher : c'est violent voire gore, désespéré voire nihiliste, et dès qu'un soupçon d'espoir et d'amitié pointe le bout de son nez les auteurs décapitent toute tentative de faire preuve d'héroïsme en plongeant la tête des personnages dans toute la noirceur du monde… Gabriel l'humaniste est devient le premier exemplaire d'un machine à tuer, Djibouti le brave légionnaire est bien conscient d'être devenu un boucher accro à la violence, le Baron Hubert Marie de Clermont qui n'est qu'honneur militaire découvre les horreurs de la sale guerre… Et des milliers d'hommes meurent tandis les crevards continuent en salon leurs petits games of thrones à la con, où avant chaque décision on pèse le pour et le contre pour savoir qui sera loué en cas de réussite et qui sera vilipendé en cas d'échec car il faut offrir ses réussites à ses supérieurs et assumer leurs échecs à leur place… Et l'incorporation d'images d'époque nous plonge dans un contexte que nos ancêtres ont connu et vécu : une guerre totale qui s'enlise pour devenir une guerre d'attrition qui déshumanise, où chaque mètre gagné sur l'ennemi l'est au prix de milliers de vies pour que les crevards ploutocrates puissent compter bien tranquillement leur argent…
Dans ce tome 2, intitulé "Septembre 1914 : La Marne", les troupes allemandes progressent rapidement vers Paris (et comme d'habitude les élites moralisatrices censées montre l'exemple s'enfuient à toutes jambes vers le Sud-Ouest). le team Taillefer reçoit sa première mission : franchir la ligne de front pour aller récupérer à Château-Thierry les clichés photos montrant la brèche entres les armées de von Kluck et von Moltke, qui permettraient de savoir où lancer les troupes pour une contre-attaque de la dernière chance…
Il y a quand même un détournement grimdark du film très cool "De l'Or pour les braves" (réalisé en 1970 par Brian G. Hutton), mais notre antihéros a fort à faire car il fait tout pour être l'homme providentiel dont la France a besoin, d'où les actes héroïques et les mises en scène epicness to the max qui vont avec (très bon travail d'
Enrique Breccia !), car ses compagnons d'infortune n'ont aucune confiance en lui et à chaque fois qu'il parvient à les sortir d'un merdier un plus gros merdier encore leur tombe dessus avec les dommages collatéraux tragiques qui vont avec… Et après un voyage au bout de l'enfer où Djibouti perd ses derniers amis, on s'aperçoit que tous ces sacrifices ont sans doute été vains voire factices… Mais le pilote Hubert Marie de Clermont décide unilatéralement qu'il en sera autrement et grâce aux taxis parisiens la France l'emporte à la Bataille de la Marne ! Les Boches sont repoussés, mais pas trop loin quand même…
Exit Tony Stark le super-héros milliardaire :
Gabriel Féraud, c'est un Thorgal / Blueberry / Corto Maltese bionique en power armor ! Ah ça, c'est quand même vachement plus badass que Steve Austin l'homme qui valait trios milliards…
Sinon il a aussi un dealer oriental et une femme fatale qui espionnent nos antihéros pour le IIe Reich… ^^