Un fort joli roman d'un auteur que je ne connaissais pas encore.
Nous sommes en 1938 à Mézière. Joseph W.un jeune soldat de 21 ans fait son service militaire dans le nord de la France. Lors de quelques jours de repos, il se rend un dimanche matin à St Mihiel , entre dans l'église où on célèbre la messe dominicale. Il y tombe éperdument amoureux d'une jeune fille assise non loin de lui. C'est le coup de foudre, le début d'une histoire d'amour, trop belle qu'elle est, pure dans sa robe blanche, dévoilant ses orteils dans ses sandalettes, leur regards se croisent ; ils se reverront, il en est certain.
Dès lors il se promet de ne jamais faire la guerre, de ne pas aller au front si on lui demandait.
Une courte, mais très belle histoire d'amour.
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La guerre est une horreur, fils, je sais de quoi je parle. Ne va pas croire mes vantardises d'autrefois, quand j'avais bu. Non, je ne suis pas un héros...
J'ai tiré à l'aveuglette, dans le tas, comme les autres, je me suis servi de ma baïonnette et j'ai étripé pour n'être pas étripé moi-même, oui, j'ai tué des êtres humains, j'en ai abandonné se tordant de douleur en retenant leurs boyaux, j'ai marché sur des mourants, écrasé des visages dans ma terreur... J'ai été un assez beau salaud et je veux que tu le saches.
Notre mère portait en elle, inné, le respect de la vie. Tu ne tueras pas. C'était écrit. Ni la mouche, ni l'araignée, ni la souris, ni l'oiseau dans l'arbre, ni le têtard dans l'eau. L'unique loi de mort qu'elle acceptât concernait les malheureux animaux domestiques, chevreau, agneau, porcelet, poulet, lapin... dont il fallait nourrir les siens dimanches et jours de fêtes. La seule viande jamais servie. Mais elle n'aurait pas mis d'elle-même la main à la mort. Elle surveillait de loin, avec horreur, notre père qui égorgeait le lapin, tordait le cou au poulet, saignait le porc ou l'agneau. Il avait fait la guerre, lui qui avouait sans vergogne - quand il avait bu - avoir étripé l'un ou l'autre Russe.
- Tais-toi ! Tu devrais avoir honte et demander pardon chaque jour que Dieu fait au Maître de la vie et de la mort.
page 105
Je chantonne, assise sous un saule, je me déchausse et je trempe mes orteils, avec délices, dans l'eau du fleuve. Et voilà que la Meuse-elle est bonne fille, après tout- me caresse, me frôle, me lèche, me chatouille. Je ferme les yeux et je crois sentir son ventre, sa poitrine et ses lèvres...Je m'allonge et, toujours mes pieds nus dans l'eau, je m'assoupis.
Le prêtre dépose l'hostie sur mes lèvres. Je suis heureux en me relevant, avant de la suivre dans l'allée jusqu'à sa place, les yeux sur le bas de sa robe d'où s'échappent deux chevilles et ses jolis orteils nus dans des sandales. Je demande pardon à Dieu, je le loue...