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sur 105 notes
Trademark, c'est d'abord une nouvelle parue dans un numéro de la revue Bifrost. Mais avec bonheur[tm], Jean Baret lance une trilogie Trademark où il compte bien montrer une société où l'ultraconsommation est devenue la norme. Vie[TM] et Mort[TM] sont deux autres romans prévus pour être des volumes lisibles indépendamment.

Au Bonheur Capitaliste !
Toshiba est un chasseur d'idées, un enquêteur de ce qui ressemble à une police métropolitaine, chargé de traquer ceux qui contreviennent aux codes de lois du quotidien, notamment le Code de la consommation qui oblige à consommer chaque jour, à participer à la reproduction car c'est un devoir civique et interdit le surendettement tout en favorisant les surcrédits à la consommation. Pourquoi ce prénom, Toshiba ? Tout simplement, parce que chaque individu est sponsorisé et que chaque sponsor de vie s'impose dans l'ensemble des aspects personnels, au point qu'on peut lire ce genre de phrases un peu surréalistes : « Toshiba et Walmart entrent dans la voiture Pepsi » ou bien que Huawei rencontre KFC dans l'immeuble Guerlain. Si on devait franciser les marques, on aurait pu imaginer qu'Alinéa et Intermarché utilisent le tramway Orangina, que ça ne donnerait pas forcément le même effet… Et toute cette société est à l'avenant, d'autant que violence et sexualité extrêmes sont le lot quotidien et que ce sont de magnifiques occasions pour miser, acheter ou vendre tout ce qui peut se consommer. Une certaine rengaine est installée quasiment à chaque début de chapitre : « Avez-vous consommé ? », « Avez-vous consommé ? »... C'est là le coeur de cette société et le coeur du roman : à quoi peut bien mener un système de consommation poussé jusqu'au bout ?

Violente et puissante critique de notre société de consommation
Dans cette société, tout le monde recherche le Bonheur avec un grand B, d'où le titre choisi. Sexe, drogue, violence : tous ces ingrédients sont devenus quotidiens et marchandisés, ce qui fait que chaque journée est surtout rythmée par des médicaments pris à hautes doses, des sexualités libres mais toujours tarifées et des paris quotidiens sur les conflits mondiaux en cours. Chacun de ces aspects peut être vu comme un argument supplémentaire pour immerger le lecteur dans un monde abrutissant et répétitif, qui éloigne la notion de libre arbitre, de créativité et de « bonheur simple ». Cela pourra certainement sembler répétitif à un certain nombre de lecteurs, mais le chemin est nécessaire pour faire arriver le protagoniste et le lecteur à l'écoeurement. Il y a ainsi dans ce roman la construction d'une analyse profonde de cette société à travers des émissions de « débats » comme on peut en avoir des overdoses déjà de nos jours : le talk-show The Shot Heard Round the World multiplie les sujets de société, mais les intervenants sont la plupart du temps d'accord sur le bien-fondé et les bienfaits apportés par la société de consommation. Toutes ces directions prises une à une peuvent sembler dérisoires, mais font évidemment partie d'un système extrêmement bien ordonné, et donc rassurant pour une partie de la population. Toutefois, il ne faut jamais oublier que ce capitalisme, par nature libéral économiquement mais pas libéral politiquement, est une idéologie ; à laquelle on peut adhérer ou qu'on peut rejeter, mais en tout cas une idéologie avec toutes les conséquences sociétales que cela comporte, reposant notamment sur du contrôle et de la domination dans la vie privée, dans les médias, dans la répartition de la valeur économique et du pouvoir de décision. Bien sûr, tout n'est pas parfait dans ce roman, dans la formulation de ce qui semble être une critique anticapitaliste, mais c'est tout de même diablement efficace et réflexif. le lecteur ne s'étonnera pas de découvrir une postface extrêmement inspirante sur le lien entre ce roman et la pensée d'un philosophe français, Dany-Robert Dufour, qui formule de quoi sortir de ces impasses.

Cyberpunk et/ou urban SF ?
Il est possible de calquer sur cette anticipation sociale un certain nombre d'étiquettes de genres. Celle de cyberpunk risque de se rappeler assez vite à nos oreilles, celle d'« urban SF » me semble également intéressante. La philosophie cyberpunk est prégnante, car nous suivons un protagoniste qui glisse doucement mais sûrement vers les marges de sa société afin de comprendre leur existence et leur fonctionnement, au risque de questionner le bien-fondé de son propre fonctionnement. Car oui, chez Toshiba, le doute l'habite au fur et à mesure de son enquête, d'autant qu'il prend relativement conscience qu'il n'est qu'un très humble rouage d'un système concentrationnaire et sécuritaire très oppressant dominé par les firmes multinationales. Mais de plus, dans un cadre urbain, nous suivons cette enquête à propos de personnages en marge, mais ceux-ci sont structurés dans une ribambelle de catégories autorevendiquées et qui correspondent parfois à des créatures limites surnaturelles mais désormais bien réelles par l'ajout ou l'ablation d'organes cybernétiques. On croise alors des cyborgs, des transhumains, des surhumains, des furrys, des mutants, des métamorphes, des purs et tant d'autres statuts plus ou moins humains. Puisque chaque catégorie essaie de se singulariser non plus par une appartenance ethnique ou culturelle comme on peut le connaître de nos jours, mais plutôt selon le credo « transforme-toi, transcende-toi, mais fais quelque chose ». Toutefois, la rencontre de différentes créatures, qui se cachent plus ou moins, lorgne sur bien d'autres influences science-fictionesques certes, mais aussi fantasy et fantastiques. Guettez alors les références à un Animus, à un jeu de Gwynt, à la contrée de Nilfgaard, à la psychohistoire, même à des vampires ; c'est au départ des petits liens culturels, voire de saines influences sait-on jamais, mais c'est aussi une manière de faire un lien intéressant entre les transformations des corps très SF et la possibilité de côtoyer des créatures fantastiques qu'on place habituellement dans d'autres contextes. du coup, voir ce roman comme de l'« urban SF » est intéressant, car dans ce cadre urbain omniprésent, nous naviguons au fond dans un monde tout à fait réel (même si c'est de l'anticipation, les codes utilisés nous correspondent plutôt très bien, malheureusement) ; en son sein, surgissent des éléments déconcertants, bouleversant de manière progressive et non trop brutale notre vision des choses en contrepoint des autres habitants qui ressentent de la rationalité à vivre dans une telle société : le concept de nouvelle frontière numérique vient donc confronter nos protagonistes, et surtout le lecteur, à leur rôle dans cette gigantesque organisation dite libérale, dite rationnelle, dite sécurisante.

C'est donc un sacré coup de coeur que ce BonheurTM ! C'est très difficile de ne pas être erratique dans cette critique tant il y a d'aspects à développer sur ce roman, tant cela touche des pans entiers de notre propre société. En tout cas, dans son propos, il a la capacité à avoir autant d'impact sur le lecteur que d'autres célèbres dystopies comme 1984. Vivement d'autres écrits de Jean Baret !

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Avez-vous consommé aujourd'hui ? Question simple à laquelle Jean Baret répond dans ce roman qui est le premier d'une trilogie. Mais une trilogie un peu particulière, puisqu'elle met en scène trois univers différents, avec des personnages différents. Les deux autres tomes devraient s'appeler Vie[TM] et Mort[TM] et seront lisibles indépendamment et dans l'ordre que l'on souhaite. le numéro 91 de Bifrost proposait une nouvelle intitulée Trademark en guise d'avant-goût et permettait de présenter l'univers du roman.

Bonheur [TM] présente une société futuriste où la seule règle est de consommer encore et toujours, toujours plus. La liberté dans ce monde est totale, chacun peut faire ce qui lui plait, vraiment tout, c'est même son droit le plus total, du moment qu'il consomme encore et toujours. Tous les matins, la phrase « avez-vous consommé aujourd'hui » s'affiche dans les logements et il faut penser à vérifier quotidiennement si on a assez consommé. On peut même consommer de l'argent que l'on n'a pas et emprunter à outrance, mais pas avoir d'économies. Il faut faire tourner l'économie et consommer. À tel point, que les gens n'ont plus de véritables noms mais portent le nom de leur sponsor avec le logo correspondant marqué sur leurs vêtements.

Les deux personnages principaux s'appellent ainsi Toshiba et Walmart et exercent la profession de chasseurs d'idées. Leur travail consiste à éplucher des dossiers pour vérifier que tout un chacun consomme bien comme il faut, et à traquer les fraudeurs qui ne font pas leur devoir de consommateur. Au cours d'une de leurs enquêtes, ils vont trouver un étrange complot destiné à mettre en danger la société de consommation. L'intrigue est assez simple mais ce n'est pas ce qui est marquant dans ce roman. L'important est la description d'un monde qui ressemble au notre par certains points, et qui fait penser à ce que nos sociétés pourraient devenir en peu de temps. Et franchement, ça fait peur, vraiment froid dans le dos. le Bélial définit le roman comme : « roman coup de poing visionnaire et syncopé aussi hilarant qu'effrayant, il nous offre le miroir à peine déformé de nos sociétés modernes en bout de course : rien moins qu'une révolution. ». Et cette phrase définit parfaitement le roman si ce n'est que j'ai plus été marqué par le côté effrayant.

La société dépeinte par Jean Baret est marquante par plusieurs aspects. La violence y règne en maître, et personne ne semble plus avoir aucun sentiment, agissant pratiquement comme des robots. Chacun peut agir comme bon lui semble et vouloir appartenir à telle catégorie, transhumain, netrunner, surhumain ou encore U-men et se transformer physiquement pour cela. Tout est possible et favorise même la consommation. La consommation à outrance est la seule règle.

Pour illustrer son propos, l'auteur utilise très souvent des listes de gens ou de choses, la répétition des slogans, des journées qui sont toujours les mêmes, encore et encore, un peu comme si on était dans Un jour sans fin, mais sans aucune possibilité d'en sortir. Cette répétition du quotidien provoque un véritable engourdissement des masses qui ne se rendent compte de rien et pensent vivre dans une société parfaite où ils bénéficient d'une liberté totale et possèdent tout ce qu'ils désirent à défaut de ce dont ils ont besoin. La culture y est totalement proscrite, comme tout ce qui est considéré comme une perte de temps, les promenades ou tout ce qui n'est pas voué à faire marcher l'économie. La critique de notre société de consommation est bien présente et pousse à la réflexion sur notre manière de vivre et d'acheter. La société dépeinte peut être parfois drôle tant elle est excessive mais elle est surtout écoeurante car plus rien n'a de sens, plus personne ne ressent rien, plus personne ne pense par lui-même, plus personne n'a de libre arbitre.

Le roman est suivi d'une postface signée Dany-Robert Dufour, philosophe qui a travaillé sur les sociétés occidentales et le fait de toujours vouloir posséder de plus en plus de biens. le philosophe est d'ailleurs cité dans le roman qui est une parfaite illustration de ses propos. L'auteur, dans cette trilogie, a la volonté de s'interroger sur le sens de la vie. Ce premier tome illustre la recherche du bonheur par la consommation et la liberté.

Bonheur [TM] est donc un roman brillamment construit dans le but de faire réfléchir sur nos modes de vie et de mettre en avant les travers de la surconsommation. Ce récit ne peut laisser personne indifférent tant la plongée dans notre monde à travers l'anticipation est glaçante. Car c'est notre monde que l'on voit sous ce filtre. Et surtout, avez-vous consommé aujourd'hui ?
Lien : https://aupaysdescavetrolls...
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Lu d'une traite hier et je ne sais pas encore vraiment quoi en penser.

Baret nous décrit un futur avec la finesse d'une attaque thermobarique. Il va trop loin dans tout, mais après tout nous sommes dans une satire donc pourquoi pas. Il a juste poussé tous les curseurs du libéralisme jusqu'au bout, puis il a remis encore un coup.
Est ce possible ? Je ne le pense pas, c'est trop, mais c'est quand même porteur de certains messages et cela peut faire réfléchir.
Cette idée de tout monétiser à ce point est intéressante.
L'auteur se sert d'un talk show diffusé un peu partout pour nous montrer les travers de cette société, absolument inhumaine.
Peut être que s'il était allé un peu moins loin sur certaines thématiques, en particulier le respect de la vie humaine, cela aurait pu paraître plus crédible et mieux passer.

Il y a beaucoup d'humour noir et pas mal de clins d'oeil.
Après, est ce que c'est un bon bouquin, je ne le sais pas encore. Je ne suis pas sûr, mais le lire amène à réfléchir sur certaines choses et ça ne fait pas de mal.
On verra après avoir lu la suite.

Par contre je trouve que l'auteur a bien trop abusé du copié/collé et ça dessert la fluidité de lecture.
A moins qu'il n'ait voulu nous montrer à quel point le monde qui décrit est chiant, je ne vois pas l'intérêt...
Cette phrase telle quelle "Dans l'ascenseur le talk show d'actualités The Shot Heard Round the World est diffusé et Minute Girl" est répétée 60 fois dans le roman ! Putain, 60 fois !!!
A partir de la 30ème (voire avant), j'avais à chaque apparition la tentation de jeter ma liseuse par la fenêtre.
Cette autre en entier "le costume réglementaire des chasseurs d'idées : veste noire, chemise blanche, cravate noire et pantalon noir, doublement griffés du slogan du sponsor du service : « Think different, Think Pepsi », ainsi que de la société Toshiba, son sponsor personnel : « Leading innovation »" est répétée pas moins de 5 fois.
Et ça clairement, pour moi, ça ne sert à rien, ça ne fait pas avancer les choses et ça n'apporte rien à l'impact du roman, au contraire.
Si l'éditeur a laissé passer c'est qu'il y a peut être une raison, mais franchement je ne vois pas laquelle.
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Je remercie Babelio et les éditions du Bélial pour l'envoi de ce roman dans le cadre d'une masse critique. C'était la première fois que je réussissais à recevoir un titre lors d'une masse critique, donc j'étais très excitée et je vous avoue que l'excitation est retombée dès les premières pages. Non pas que je n'ai pas aimé ; en fait, je ne saurais pas vous dire. Cette lecture m'a perturbée dans le sens où je ne sais pas trop ce que j'en ai pensé, et c'est pour cette raison que j'ai tant tardé à écrire cette critique. Ceci dit, je n'ai pas seulement repoussé l'échéance comme un étudiant attendrait la date limite pour rendre un examen. Non, j'ai parlé de cette expérience de lecture autour de moi, auprès de proches pour essayer de détricoter mes impressions.
Autant vous dire que ça ne m'a pas aidée, mais je vais quand même tenter de résumer tout ça. En à propos, le "mot de l'éditeur" explique que cette trilogie "un peu particulière, [...] une trilogie thématique et d'ambition" porte sur la "question fondamentale de la recherche du sens de la vie" : ok, ok, j'ai voulu me lancer le défi de lire de nouveau une vraie dystopie et je vais devoir assumer. Les considérations philosophiques, je n'aime pas vraiment ça. Sauf que BonheurTM est une oeuvre remplie de tellement de pistes de réflexion et d'idées qu'elle en est presque étouffante.
L'idée d'utiliser des personnages caricaturaux permet de faire ressortir la violence et l'aspect totalitaire de la société, la lourdeur et le caractère impitoyable du règne de la sur-consommation. J'ai apprécié ce que l'auteur essaie de faire avec ce roman, sa démarche ainsi que son dévouement total aux idées qu'il souhaite faire passer. Toutefois, la structure de l'intrigue m'a agacée, ce qui était souhaité je suppose (du moins provoquer une réaction forte en réponse aux répétitions), et perdre le protagoniste (qui certes n'en était pas vraiment un) aux deux-tiers a fini de m'achever. Je l'avais dit, je suis toujours perdue face à ce titre qui ne manque pas d'ambition et qui est une réussite, mais qui m'a laissée assez perplexe. Je ne peux pas dire que ce fut un bon moment de lecture, mais ça ne m'empêche pas de reconnaître la qualité de BonheurTM.
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« Avez-vous consommé ? » Si cette injonction ne nous est pas tout à fait inconnue, elle a été poussée à son paroxysme dans ce roman. L'ultra-libéralisme a en effet été reconnu comme la solution ultime à tous les problèmes. Désormais, être un bon citoyen, c'est consommer. Toute épargne est strictement interdite et chaque citoyen doit atteindre une consommation journalière minimale, étroitement surveillée par la police et la répression des fraudes.

Tout est permis si ça génère du profit : chaque citoyen porte comme prénom la marque de son « sponsor de vie » (on suit ainsi les aventures de Toshiba, policier à la section « Crimes à la consommation »), le mariage avec des robots sexuels est autorisé, ainsi que toute drogue ou opération chirurgicale qui permet de devenir ce que l'on souhaite : cyborg, vampire, body-builder, … Les comportements improductifs et anti-sociaux, tels que la méditation ou les promenades en forêt, sont violemment réprimés.

D'une certaine manière, l'auteur est parvenu à dépeindre un monde ultra-libéral parfait. Pas dans le sens où tout le monde baigne dans la félicité, mais parce qu'une fois atteint, il est impossible de s'en échapper. le Marché a tout envahi, et au moindre problème qui se pose dans la société, la solution est immédiatement « comment réussir à monétiser cette nouvelle niche ». On ne vous interdit rien, et pour cause : pour la moindre de votre envie, il y a un marché : on ne vous interdit pas de faire la sieste – si vous achetez une application qui optimise votre temps de repos ; ni de vous balader – tant que vous circulez dans un espace de réalité virtuelle qui vous abreuve de publicité.

Chaque citoyen est devenu l'Égoïste idéal, cet individu uniquement préoccupé par ses propres envies dont la somme forme le meilleur des mondes possibles. le mantra est d'ailleurs répété par tous les personnages du roman : « C'est mon droit absolu de … et personne ne peut m'en empêcher ».

Les romans de Jean Baret sont assez terribles, car l'auteur présente des avenirs (ultra-libéralisme ici, algorithmique avec Vie™) qui clôturent l'Histoire : personne n'empêchera votre colère, ou votre révolte, car elles aussi font déjà partie intégrante du système.
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Depuis un mois, impossible d'acheter ce que tu veux, ton compte en banque devient doucement positif.
Tu commences à apprécier les bonheurs simples de la vie : profiter du temps qui passe, admirer la nature, t'adonner à la paresse...
Serais-tu un terroriste en devenir ?

Futur, le bonheur est à portée de main.
Le seul impératif consommer. Chaque heure, chaque jour, chaque semaine, chaque mois, chaque semestre, chaque année...
Tour est sponsorisé, ta vie, ton nom, tes vêtements, ta bagnole...
Mais attention, si tu ne consommes pas. Les flics sont là . Et si tu préfères regarder la nature, profiter du soleil, des chants d'oiseaux, des abeilles qui butinent, des papillons qui papillonnent, du temps qui passe,... les flics sont là.
Toshiba est flic, une vie privée épanouie, sa femme lui propose chaque matin un moment de sexe oral. Mais malgré ce bonheur, il y a comme un truc qui le chagrine, alors il la tabasse, pour passer son mal être, pour aller mieux, pour être maître de son destin.

Imagine : une société où tu peux être ce que tu veux, sans entraves. Tu peux être accro à la muscu et aux amphets, être zoophile, être nécrophile, être fan de tricot ou être fan de broderie, être tout ce que tu imagines, la société te protège car TOUT LE MONDE A LE DROIT AU BONHEUR !
Seul impératif, que ça fasse marcher l'économie, toujours consommer. Toujours. Tout le temps. Les flics du détersif veillent. Flics bien entendus discriminants, violents et remplis de préjugés.
Le libéralisme avant tout.

Dans notre société où l'injonction au bonheur est très ancrée, ou ne rien faire est presque devenu synonyme de déviance, l'auteur tire une satire pleine de mordant, d'humour noir, de contestation, de révolte, de lutte contre la bien-pensance.
J'avais lu auparavant Vie™, qui à ma préférence, et ce poil à gratter m'avait donné envie de continuer l'aventure. L'auteur pousse la répétition à son paroxysme, allant même jusqu'à claquer la trame de l'autre récit.
Le politiquement correct, Jean Baret n'en a rien à foutre et tire à boulée rouge sur le conformisme, sur la pensée unique, le respect.
Tout passe sous sa moulinette caustique et trash : société, média, publicité, économie, communauté et individu, bref, c'est jouissif.
Jean Baret, c'est gonflé !
Maintenant, plus qu'à attendre la sortie du dernier opus Mort™...
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Dans un futur proche, Toshiba et Walmart sont chargés de surveiller les fraudes à la consommation. Tous les habitants sont surveillés et se doivent de consommer. Si des écarts sont repérés, une enquête est ouverte et des représailles peuvent avoir lieu. En effet, une seule loi existe, il est obligatoire de consommer et tout le monde est obligé de s'y soustraire. Lors d'une banale enquête à la consommation, Walmart et Toshiba rencontrent un Netrunner (homme qui passe sa vie dans le monde virtuel) qui leur laisse une drôle d'impression. Ils décident de faire des recherches sur ce Netrunner et son monde virtuel. Ce qu'ils vont découvrir pourrait remettre en cause le leitmotiv de leur existence : Consommer c'est le Bonheur !

Livre coup de poing qui, pour dénoncer tous les maux de nos sociétés modernes, nous montre un futur où ces maux sont la norme. Tout est publicité. Des hologrammes sont présents du soir au matin vantant les mérites de milliers de produits que l'on se doit d'acheter pour atteindre le Bonheur. Tout est sponsorisé, chaque habitant a son sponsor de vie. Fini les noms propres, seul le nom du sponsor permet de définir une personne. le sponsor reste, alors que l'individu est lui interchangeable à l'infini. Il n'y a pas de place à l'oisiveté, seule la consommation a le droit de cité, aucun temps libre. Des émissions où débattent des spécialistes sont diffusées partout, que ce soit dans les rues, dans la voiture ou dans les cages d'ascenseur. Et là encore, les spécialistes ont tous une pensée formatée, tous différents mais tous pareils.

La liberté de l'individu est totale, il peut vivre avec un ou plusieurs hommes et/ou femmes, avec un robot, un cyborg, un transhumain, un posthumain... L'individu est libre de se transformer physiquement, de s'injecter toutes les drogues qu'il veut, de vivre dans un monde virtuel, la seule chose immuable est son obligation de consommer, car consommer c'est être heureux.

Sur le fond, le roman est saisissant, agaçant, dérangeant, il imprime en nous une habitude, une logique : la consommation comme seule possibilité de vie. le libre arbitre n'est plus, le choix inexistant. Et c'est juste un livre passionnant, intelligent qui égaie vos neurones. Sur la forme, les répétitions, la redondance des faits, la routine m'ont un peu dérouté voire agacé mais elles participent à la cohérence de l'ensemble.

En résumé, l'auteur pousse à l'extrême son raisonnement : la surconsommation comme mode de vie ultime et on le prend dans la gueule, nous petits consommateurs individualistes ! Bonheur TM est donc un livre qui fait réfléchir et nous permet de découvrir la pensée du philosophe Dany-Robert Dufour dont la postface apporte au livre un indéniable plus.

Achetez Bonheur TM, sa consommation est indispensable !
Lien : https://les-lectures-du-maki..
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Avez-vous consommé aujourd'hui ? Consommé est un devoir civique. Ne pas consommer est passible d'une amende - Art. L.643-2 ter du Code de la consommation.


Voilà le crédo qui suit le lecteur tout au long de Bonheur TM. Dans un futur plus ou moins lointain (voire demain), la société de consommation est devenue l'axe central de la vie des citoyens (n'est ce pas déjà le cas ?). Consommé est un devoir civique, une obligation légale pour chacun, un monde ultra-libéral où faire marcher l'économie est le devoir de tout citoyen. Un monde à la fois proche du notre et en même temps étranger. Afin de mettre un pied dans ce monde, Jean Baret nous propose de suivre Toshiba, policier, section des "crimes à la consommation"... autrement dit Toshiba enquête sur les personnes dont le profil de consommation montre des anomalies... Un boulot nécessaire et prenant. Les noms ne sont plus utilisés, chacun portant le nom de son sponsor de vie dont le slogan apparait alors sur ses vêtements. Toshiba porte donc le slogan de son sponsor : Leading Innovation et celui du sponsor de son service Pepsi : Think different, Think Pepsi.

Jean Baret nous fait suivre son personnage jour après jour avec une volonté d'imprégner le lecteur de cette vie où consommer est le centre de tout. Et ça marche, même très bien ! Suivre la vie de Toshiba entre son appartement, son boulot et son appartement a rendu la lectrice que je suis très mal à l'aise. On découvre, page après page, par un jeu de style tout en répétitions, la vacuité de cette existence. C'est perturbant... et même relativement effrayant ! Mais également fascinant. Jean Baret, en 340 pages, arrive à parler d'un nombre incroyable de sujets : religion, transhumanisme, génie génétique, exclusion, liberté individuelle et bien sur du bonheur... car le bonheur est "notre droit le plus stricte", chacun à droit au bonheur et doit pouvoir l'atteindre en consommant comme il l'entends. La preuve ? Notre personnage principal est officiellement marié à un robot... et son coéquipier, en tant que surhumain, peut passer sa journée à se toper sans que personne ne trouve à y redire.

La société de consommation menée à son paroxysme où tout peut être un business : un problème de surpopulation ? La fondation Bill & Melinda Gates vous propose de faire un don à leur association qui sous couvert de vaccination propose de stériliser des millions d'africains, tout ceci dans un soucis du bien être de chacun. Vous voulez lutter contre le Khalifat mondial ? Bono vous propose de participer à une OPA agressive afin de racheter les petits états qui composent le Khalifat et ainsi le faire reculer... Une vision extrêmement dérangeante de notre futur, dérangeante et assez navrante il faut bien le dire, surtout que le récit de Jean Baret sonne presque trop "juste" par rapport au monde économique actuel : reste à enlever quelques tabous moraux et ce monde "futuriste" pourrait bien être le notre.

Je pense que par certains cotés, notamment avec son style souvent répétitif, ce livre peut rebuter des lecteurs. Et pourtant, la richesse de ce premier tome de la trilogie Trademark est hallucinant. Jean Baret utilise sa plume sans complaisance pour démontrer l'absurdité d'une société qui prône la liberté individuelle tout en contrôlant le temps libre de chaque individu : l'oisiveté est un délit, le temps libre de chacun doit être utilisé pour consommer. La pub est omniprésente, partout et tout le temps... de quoi devenir agoraphobe rapidement.

Un détails que j'ai particulièrement aimé : à chaque fois que les personnages prennent l'ascenseur, il se retrouvent au milieu d'un talk show d'actualité : The Shot Heard Round the World. Les sujets sont différents à chaque émission et en quelques lignes, l'auteur nous présente un sujet de société. Je trouve l'exercice particulièrement réussi car ce talk show donne énormément de détails sur le monde dans lequel le récit prend place.

Au final, Bonheur TM est une lecture top. Un OVNI littéraire dérangeant mais visionnaire. Jean Baret nous propose un récit d'anticipation présentant l'absurdité d'une société où le travail et la consommation sont des vertus cardinales... toute ressemblance avec un société actuelle serait fortuit... vraiment ? Une chronique difficile à écrire tellement ce livre est riche en réflexions sur notre société, les thèmes abordés étant également particulièrement nombreux. Je pense qu'on ne peut pas ressortir de cette lecture sans un léger sentiment de malaise. Je le dis rarement, mais je trouve que ce livre est une lecture à ne pas rater... Je ne sais pas ce que nous réserve l'auteur dans les deux tomes suivants mais je les lirai avec beaucoup de curiosité mais aussi une petit appréhension... due à ces auteurs qui tapent parfois "trop juste" dans leur manière d'abordés des thèmes d'actualité.
Lien : https://chutmamanlit.blogspo..
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Une déception énorme pour ce roman. Je me suis faite avoir sur l'encensement de l'éditeur et des quelques critiques extrêmement élogieuses. Je ne saurais tout détailler ici, il y a trop à dire...

Retenons :

- Un style extrêmement pauvre (mais expliqué par une critique dans le roman comme justifié... lol ?), dont des incises inexistantes (dialogues à coup de "il dit, il dit, il dit") et des répétitions à outrance.

Sans oublier des anglicismes et des listes interminables. On nous sert du hub, du talk show, de l'achievement, du holo-files, du holo-book, du holo-cat, du holo-dog, du first blood, du battle, du booty call, du … c'est lourd hein ? Ben des énumérations comme ça, y'en a tout le roman. Comme ça, on évite de s'enquiquiner à faire des jolies phrases. :)

- Personnages sans intérêt, on ne s'y attache pas du tout.

- Univers décousu, complètement "what the fuck" mais tout de même intéressant.

- Obsession du sexuel.
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Avec BonheurTM, Jean Baret nous décrit une société proche d'une société cyberpunk, mais en plus extrême et actualisé, avec ses corporations qui dominent la planète, ses publicités partout, l'obligation pour les citoyens de consommer.
Les personnages que l'on suit ne sont pas des rebelles, ils sont parfaitement intégrés à ce système dans lequel une marque peut être le sponsor de vie d'un individu, qui se voit dépossédé de son identité au profit du nom de la marque (on suit ainsi "Walmart" et "Toshiba"), et contribuent même à son bon fonctionnement puisqu'ils sont "chasseur d'idées" dans une police de "crimes à la consommation"...
Chronique complète et très détaillée sur le blog.
Lien : https://leschroniquesduchron..
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