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Critique de motspourmots


Il aura donc fallu un film, excellente adaptation de Xavier Giannoli pour me donner envie de me plonger dans ce roman qui, je m'en suis aperçue était fait pour moi. En sortant de la séance, le sourire aux lèvres et la poitrine gonflée d'énergie je me suis demandé comment j'avais fait pour ne jamais croiser la route de ce texte, ni pendant mes années de lycée ni par la suite. Je n'étais apparemment pas la seule puisque les librairies ont été prises d'assaut et quelque peu au dépourvu n'ayant aucunement anticipé cette ruée vers un classique de 800 pages écrit il y a deux siècles. Pour moi, il y avait une raison supplémentaire de m'y intéresser, ce métier de la presse et de l'édition qui me passionne depuis l'adolescence et qui a constitué le cadre de ma vie professionnelle pendant des années. le film m'avait ouvert l'appétit, je me suis immergée dans le livre avec un vrai bonheur.

Je suis à peu près certaine de ne pas avoir apprécié Balzac à sa juste valeur lorsque j'ai lu le père Goriot à 15 ou 16 ans ; alors qu'aujourd'hui, ses descriptions, la façon dont il décortique la petite société d'Angoulême et les moeurs parisiennes, sa fine analyse des relations humaines où se bousculent à peu près toutes les sortes de sentiments des plus purs aux plus pervers... tout est d'une richesse percutante et d'une modernité troublante. La dichotomie des trajectoires de Lucien Chardon et David Séchard est passionnante, servie par l'immersion dans un contexte qui restitue parfaitement les mécanismes des métiers de l'imprimerie, de la presse et de l'édition à une époque d'instabilité politique au cours de laquelle les libertés fluctuaient au gré des influences. le film s'attachait beaucoup plus au parcours de Lucien sur fond d'analyse critique des moeurs littéraires et journalistiques de l'époque, retrouver le roman permet d'élargir le spectre et d'englober les enjeux politiques autant que sociétaux ainsi que d'explorer plus avant la problématique des journaux, depuis le papier, objet des recherches de l'inventeur David Séchard, jusqu'au pouvoir qu'ils confèrent à ceux qui les possèdent. Toute la genèse de ce qui n'a cessé d'alimenter l'évolution de ce métier est là : la naissance des encarts publicitaires, la pression de l'argent, l'affrontement entre puristes en quête de liberté et cyniques épris de pouvoir. La vision de la critique littéraire est assez hallucinante et il est amusant d'apprendre que la vente des exemplaires de presse était alors considérée comme un complément de salaire pour les journalistes (tout comme des places de théâtre pour les spectacles sur lesquels ils écrivaient une critique)... Inutile, donc de s'effaroucher de nos jours sur des pratiques dont on comprend l'origine. Mais surtout, l'affrontement que met en scène Balzac entre deux approches de la littérature et de la poésie est d'une justesse qui trouve encore son écho au 21ème siècle au point qu'on ne ressent que peu la distance qui nous sépare de l'écriture de ce roman.

Cette expérience m'a donné envie de lire toute la Comédie humaine, j'espère en avoir le temps. Je vais déjà commencer par Splendeurs et misères des courtisanes, j'ai trop hâte de retrouver Lucien Chardon de Rubempré pour la suite de ses aventures. Titiou Lecoq avait raison dans son Honoré et moi, Balzac traverse les siècles et sa clairvoyance dans l'étude de la nature humaine permet aussi de décrypter le nôtre. Son aide ne sera pas de trop.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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