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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Si vous désirez une lecture légère pour la plage, fuyez ! La crise de la culture ressemble plutôt à une pierre ponce inversée : le livre n'a l'air de rien à vue de nez, mais il faut prendre une pause d'une demi-heure à chaque page pour bien assimiler ce qu'on vient de lire.

L'investissement en valait cependant la peine. L'essai met des mots précis sur des concepts un peu vagues que je ressens depuis quelque temps (et je ne parlerai donc que de ceux-là dans la suite de cette critique). Globalement, le monde occidental repose depuis des siècles sur un trio de fondements qui se renforcent mutuellement :
- la tradition : on sait qui on est, et qui on a toujours été (même si paradoxalement, ça peut changer souvent au fil des générations. Mais à tout moment donné, la majeure partie de la population a une référence unique en tête).
- l'autorité : on reconnaît qu'il y a des gens qui savent très bien quoi faire pour être encore mieux nous-même, et on leur fait naturellement confiance dans leurs prises de décision.
- la religion : on n'est pas nous-même sans raison, et il y a des transcendances qui justifient parfaitement nos comportements.

Or, ces derniers temps, toutes ces belles certitudes ont été pulvérisées par les philosophes, les scientifiques et les historiens, et souvent brillamment. On se sait plus très bien qui on est, ni même si ce « on » a bien un sens ; toutes les valeurs deviennent relatives, et il est difficile de savoir au nom de quoi on pourrait bien donner des leçons aux autres ; quant à l'autorité, vu que le respect naturel qui doit la provoquer n'a plus de base stable, elle est bien souvent remplacée par des petites crises de violence et/ou de rapports de force qui ne mèneront pas à grand-chose.

Il ne s'agit cependant pas d'être nostalgique de vérités passées : l'auteur montre que l'idée même d'un événement fondateur dans le passé dans lequel tout le corps social se reconnaît ne fonctionne tout simplement plus dans nos sociétés. Et que les tentatives d'en inventer de nouveaux se cassent la gueule encore plus vite que ceux qu'elles prétendent remplacer. Mais en tout cas, rien n'a encore émergé pour remplacer ce concept, et on gère désormais les problèmes au jour le jour, sans vraiment avoir de vision d'avenir claire. Est-ce que c'est grave ? Est-ce qu'on finira par nous découvrir une nouvelle cohésion ? Est-ce qu'on tiendra le choc face aux sociétés qui savent très bien, elles, où elles veulent aller ? L'avenir nous le dira.

L'essai demande pas mal d'efforts, mais je pense qu'il en vaut largement la peine si on veut vraiment réfléchir en profondeur à ces questions et éviter les lieux communs habituels.
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Que reste-t-il dans le monde déboussolé d'aujourd'hui des grandes notions qui en ont façonné la pensée, comme la liberté, l'autorité, la vérité, la tradition ou l'histoire? Les analyses serrées d'Hannah Arendt montrent à quel point celles-ci sont ébranlées, que les expériences politiques et scientifiques radicales du vingtième siècle ont mis à mal tous les repères. Elle montre aussi l'écart qui existe entre la pensée solitaire du philosophe et la vie dans la cité, où la vérité importe beaucoup moins que l'action, où l'éducation, en voulant épouser les besoins de l'enfant, devient vide de sens, où la culture, en se démocratisant, se transforme en banal objet de consommation. le monde nous échappe, et nous ne pouvons que le penser sans coller à lui, que faire semblant de l'adapter à la faiblesse de nos sens imparfaits. La crise ouverte est loin d'être refermée.
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Le titre de l'édition française, "La crise de la culture", est trompeur. le titre de l'édition américaine "Between Past and Future : Six Exercices in Political Thought" en explicite bien mieux l'objet. Il s'agit d'un recueil d'essais sur la modernité vue sous différents angles : crise de la culture, mais aussi crise de l'autorité, place de la tradition, crise de l'éducation, place de l'histoire, conception de la liberté,....
Lisant rarement des écrits de philosophes, je resterai lapidaire ; mes citations seront plus utiles que ce que je pourrais en dire.
Hannah Arendt nous offre une pensée rigoureuse, profonde, assise sur une érudition impressionnante, mais parfois difficile à saisir d'autant qu'elle desservie par un style très lourd.
Des essais écrits il y a environ une soixantaine d'années et toujours (malheureusement) d'actualité.
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Lecture ardue et complexe, avec beaucoup de références et de notes de bas de page. L'auteur nous explique en quoi l'autorité, qui était la colonne vertébrale des sociétés passées, souffre d'une crise, qui s'étend dans tous les domaines, notamment la culture.
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L'auteur nous invite à repenser voire à réévaluer des notions qui semblent communes à tous, or le commun n'a rien de bien naturel, nous le savons, mais c'est au contraire très contraignant. Arendt le dit, mieux vaut ne pas partir dans des généralités, mais établir des distinctions précises, pour enfin mieux expliquer la crise de notre temps.

C'est pourquoi le chapitre III « Qu'est-ce que l'autorité ? », est le plus parlant à ce propos, et le plus révélateur en termes de réévaluation d'une notion ou d'un terme en le plaçant dans un contexte précis. Elle nous amène, par un processus historique, à nous interroger sur ce qu'a été la société occidentale, et plus spécifiquement l'autorité, pour approfondir cette notion, en insistant sur son origine platonicienne ; et enfin, à nous demander comment restaurer une forme d'autorité, pour atteindre une harmonie au sein de notre société. La démocratie, est t-elle la forme de gouvernement qui permet une pleine liberté de l'individu ? Il semblerait que la crise de la démocratie est à son apogée…puisque l'individu est dominé par la société qui l'entoure, et il n'a pas la liberté de s'exprimer pleinement. C'est pourquoi, pour Arendt, notre démocratie actuelle serait une forme de gouvernement autoritaire.

De fait, Arendt ne cesse d'inviter le lecteur à prendre part à sa réflexion, en le questionnant. C'est une réelle discussion permanente entre l'auteur et le lecteur, ce qui en fait un texte unique en son genre.
L'actualité de son texte me donne des vertiges, parce qu'à travers ses idées, on peut penser le monde d'aujourd'hui et s'interroger sur le monde de demain, comme par exemple : qu'est-ce qui fait que l'individu peut trouver une forme de liberté au sein d'un Etat politique pré-établi ?
Au sujet de la liberté, elle démonte le discours des écrivains libéraux et conservateurs au XIXe siècle qui analysent la liberté au sein de la politique. Elle dénonce leur négligence à ne pas s'interroger sur la source même du problème de la liberté, celle que l'on trouve du côté d'un gouvernement. Plus précisément, de ceux qui se permettent la liberté politique de mener des dictatures et des tyrannies.

En bref, une lecture enrichissante à la fois historique et philosophique qui m'a donné envie de m'ouvrir à d'autres lectures ou auteurs dont la pensée s'oppose en quelque sorte, comme Hegel par exemple. Ou bien La République de Platon qui défend une société idéale autoritaire, mais où Arendt y voit un Etat totalitaire.
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