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Critique de raton-liseur


Cela fait plusieurs années que je n'avais pas ouvert un livre de Jorge Amado et j'ai choisi celui-ci un peu par hasard pour renouer avec cet auteur que j'avais particulièrement apprécié dans La Terre aux fruits d'or et Les Terres du bout du monde. Quelle ne fut donc pas ma surprise de m'apercevoir que ce titre, qui m'avait surtout attirée pour ses senteurs, est en quelque sorte la suite de ces deux premiers opus. On est encore une fois à Ilhéus. Alors que les deux premiers romans avaient pour toile de fond l'implantation de la culture du cacao et l'accaparement des terres que son essor a suscité, faisant de ces livres d'incroyables diagnostics agraires (mais bien plus palpitants à lire qu'un rapport d'expert !), ce troisième volet est strictement urbain et est situé dans la période florissante de la culture du cacao, à un moment charnière de l'histoire, alors qu'Ilhéus passe de son statut de ville de Far West où toutes les lois sont celles de celui qui a la meilleure gâchette à une période de développement et de commerce prospère et cossu. Encore une fois, ce sont les luttes de pouvoir qui font la trame du livre, cette fois entre la vieille garde et la génération montante, qui a oublié ce que ses pairs ont vécu et qui veut profiter de la fortune accumulée. C'est le temps de la civilisation en marche, celle du confort dans les intérieurs, celle des cercles de danse où jeunes hommes et demoiselles peuvent flirter. C'est le temps où le commerçant prend le pas sur le producteur, dans une nouvelle répartition des tâches et de la richesse.
Jorge Amado, qui est lui-même né pas loin d'Ilhéus, dans une fazenda, livre un témoignage sur l'évolution de sa région en cette année 1925, mais n'en fait jamais un manifeste politique. Sa plume est enlevée, plein d'une verve qui coule de façon harmonieuse et qui rend la lecture extrêmement facile. L'histoire est avant tout celle d'un couple qui se forme et évolue, celui de Gabriela bien sûr (qui bien qu'elle soit l'objet du titre n'apparaît qu'à la page 100, très précisément) et de Nacib, deux habitants d'Ilhéus qui représentent bien le cosmopolitisme tant spatial que social qui caractérise la ville et qui, par leur relation montre l'évolution, bien que lente, des moeurs et des façons de vivre. Leur histoire est émaillée de nombreuses aventures secondaires avec, bien sûr en toile de fond permanente la bataille sans merci que se livrent Ramiro Bastos, le vieux producteur qui a gouverné la région pendant des décennies et Mundiho Falcao, jeune exportateur plein de projets.
Un moment de lecture très plaisant, un livre qui se lit comme on boit du petit lait, et où l'on apprend beaucoup de choses sur le Brésil et sur son évolution sans même s'en apercevoir. Ce furent de très agréables retrouvailles avec Jorge Amado, et je me promets de ne pas attendre à nouveau une dizaine d'années avant de lire un autre de ses livres.
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