AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,43

sur 827 notes
5
102 avis
4
41 avis
3
3 avis
2
3 avis
1
0 avis
Une lecture dont je ressors mitigée. Des témoignages m'auront marqués mais la méthodologie d'Alexievitch me questionne un peu. Ces témoignages sont tous très intéressants mais il est nécessaire selon moi de maintenir une certaines distance avec ces récits, de compléter cette lecture avec des ouvrages historiques complémentaires... C'est en tout ca ce que je compte faire !
Lien : https://albertebly.wordpress..
Commenter  J’apprécie          20
Svetlana Alexievitch nous raconte l'implosion de l'Union soviétique à travers vingt récits personnels et des dizaines de commentaires glanés sur la rue et dans les cuisines. Plusieurs témoins nous livrent des souvenirs douloureux que même leurs proches n'ont jamais entendus. Si ces personnes « ordinaires » acceptent de s'ouvrir c'est pour être entendues. C'est pourquoi il faut lire ce livre, par respect pour leur souffrance et celle de tous ceux qui ne seront jamais entendus. Est-ce que cela change quelque chose? Comme plusieurs des témoins nous pouvons nous poser la question. Pourtant il est important d'écouter et de savoir, d'autant plus qu'on aurait tort de penser que tout cela ne concerne que l'ancienne URSS.

L'auteure évoque en sous-titre le « temps du désenchantement » mais c'est aussi te temps de la souffrance. Une souffrance d'autant plus intolérable qu'elle est le plus souvent infligée par d'autres : un parent, un voisin, un collègue, un fonctionnaire, un passant sur la rue, un truand ou un bourreau. Cette souffrance n'est pas inévitable et c'est ce qui fait le plus mal. Ce sont d'abord des souvenirs personnels qui remontent à l'ère stalinienne, à la deuxième guerre ou aux dernières années de l'époque soviétique. Puis il y les souvenirs plus récents de ceux qui sont rejetés par le capitalisme sauvage, ou de ceux qui ont vécu les malheurs causés par les guerres civiles qui ont frappées d'anciennes républiques après la dissolution de l'URSS, sans oublier le malheur des minorités qui se retrouvent en quasi esclavage à Moscou.

Devant tant d'horreur on veut trouver les coupables. On peut évidemment rejeter toute la faute sur une idéologie triomphante (le communisme ou le capitalisme) ou sur quelques individus (Staline ou Gorbatchev). Malheureusement c'est plus compliqué. Il y a certes de vrais salauds, comme cet Ivan D, un grand-père presque ordinaire qui s'était appliqué avec zèle à son rôle de bourreau. Mais il y a surtout beaucoup de petits bourreaux silencieux. On ne les entend pas mais ils nous diraient sans doute qu'ils n'avaient pas le choix pour sauver leur mère, leur épouse, leur famille ou leur patrie. Ou leur confort? Il y avait sans doute aussi des gens bien intentionnés qui ont été bernés, ceux qu'on appelle parfois les « romantiques » dans le livre. C'est évidemment facile de juger, assis bien confortablement dans notre salon.

Je ne suis pas russe et je n'ose me prononcer sur l'âme russe. Mais le portrait d'ensemble que dresse l'écrivaine sur les hommes, à quelques exceptions près, est assez terrifiant. Et ce sont les femmes qui en paient le plus gros prix. Chose certaine ce livre est essentiel parce qu'il y a encore des guerres, des régimes autoritaires, des bourreaux, des laissés-pour-compte, des souffrances que des êtres humains infligent à d'autres êtres humains.
Commenter  J’apprécie          10
Svetlana Alexievitch, prix Nobel de littérature 2015, journaliste, a parcouru l'ex- URSS pour recueillir le témoignage de personnes qui ont vécu sous le régime soviétique. Elle leur a demandé de raconter leurs souvenirs, non seulement sur des événements politiques, mais aussi et surtout sur leur vie quotidienne à l'époque, leurs joies, leurs peines, leurs amours. Ce livre est la transcription de tous les enregistrements effectués, sans aucune intervention de sa part. C'est très intéressant mais surtout bouleversant.
Lors de l'invasion russe en Ukraine, beaucoup d'entre nous, occidentaux, se sont étonnés que Poutine ait gardé le soutien d'une partie importante de ses compatriotes. Ce récit permet de mieux comprendre cette réaction, sans la justifier bien sûr.
La plupart des soviétiques ont accueilli avec joie la perestroika de Gorbatchev, suivie de la libéralisation du régime sous Elstine. Ils allaient enfin pouvoir vivre autrement, acheter voitures, téléviseurs, lave-linge, manger et se loger décemment, découvrir le monde en voyageant. Mais ils ont finalement découvert un capitalisme où les riches sont encore plus riches, les pauvres souvent tout aussi pauvres. Leur déception fut à la hauteur de leurs espérances. Ce n'est pas pour rien que le bouquin est sous-titré « ou le temps du désenchantement ». D'autant plus que l' « homo sovieticus » a besoin de se sentir citoyen d'un grand pays, d'un empire pour lequel il serait prêt à sacrifier sa vie. C'est plus important pour lui que la liberté. Il est un idéaliste romantique, un peu naïf, certes aveugle car il sait maintenant ce que fut le régime de Staline, mais préfère ne pas y penser. Bon nombre de personnes interviewées ont encore la nostalgie du « père des peuples » : l'être humain oublie vite ! Et pourtant il en a connu des horreurs : tortures, assassinats, enfants arrachés à leur mère…
L'implosion de l'URSS a montré aussi le côté sombre de l'hommme soviétique, sans doute de l'être humain en général. Les populations du Caucase, de races et de religions diverses, vivaient en accord correct auparavant, soumises aux mêmes lois, aux mêmes règles du régime. Dès la fin de l'URSS, elles ont réclamé et souvent obtenu leur indépendance – c'est très bien- mais se sont empressées d'entrer en guerre contre leur voisin, et ces hostilités furent violentes et cruelles. Ainsi la Géorgie contre l'Abkhazie, l'Arménie chrétienne contre l'Azerbaïdjan musulman.
Tous les témoignages recueillis bouleversent tant ils prouvent qu'il y a loin du rêve à la réalité. Deux images du peule russe resteront aussi gravées dans ma mémoire : la première est celle des hommes (presque tous) qui se saoûlent à la vodka et qui battent leur femmme, la seconde, plus drôle, prend la forme d'un saucisson, qui semble là-bas être le symbole d'une alimentation correcte !
Commenter  J’apprécie          60
Malgré une structure et un chapitrage pas vraiment compréhensibles, ce pavé est un choc à la lecture ; surtout en cette année 2022, où des parallèles faciles peuvent être tracés...

Comment expliquer le destin d'un peuple qui semble condamné à souffrir et à oublier, incapable de tirer les leçons d'un passé pas si lointain ?

Il n'était pas besoin de ces presque 700 pages pour être marqué par les témoignages, mais ça aurait été se priver de celui de la page 585, à propos de l'intervention en Tchétchénie, qui résonne d'une sinistre manière aujourd'hui : "Il y a quinze ans qu'il y a la guerre chez eux, et ils viennent se réfugier ici. Ils se répandent à travers toute la Russie... alors qu'en principe, la Russie est en guerre contre eux... On appelle ça une "opération spéciale", mais c'est quoi cette guerre ?"

Le temps est comme un cercle...
Commenter  J’apprécie          40
Gorbatchev est mort alors qu'il avait 91 ans. Il a démissionné de son poste de président [...] suprême en 91 - l 'URSS s'est effondrée en 91 - je suis née en 91

et je me retrouve à lire un livre qui parle de lui au moment même de sa mort. Heureusement, nous ne sommes pas en 91 ... Sinon, j'aurais déjà cent ans. C'est que ... je ne suis pas pressée.

Du coup je me pose une question : Si c'est la Fin de l'homme rouge, peut-on dire étant donné que c'est la Fin de Gorbatchev que Gorbatchev était Rouge ? Rouge de quoi ? Rouge de honte ? Et pourquoi le serait-il ? Est-ce qu'il était sur liste rouge parce qu'on lui reprochait d'avoir vendu l'URSS aux Ricains ? Beaucoup de Russes lui faisaient ce reproche (j'espère qu'ils ont arrêté maintenant qu'il est mort ; on les entendra cependant pour l'éternité ces reproches, car ils sont inscrits dans le livre d'Alexievitch). Ils lui reprochent par exemple, les Russes, les soviétiques surtout, d'avoir échangé l'URSS contre du saucisson ( ça peut se comprendre quand on aime vraiment le saucisson). le saucisson, c'est très bon avec le vin, avec le vin qui tache, avec les taches de vin.

Tiens, ça me fait penser, en plus d'avoir le chiffre 91 en commun avec Gorbatchev, en plus d'avoir un goût prononcé pour le saucisson, on partage aussi le fait d'avoir une tache de vin. Comme quoi. Les grands esprits se rencontrent ( ou pas, je l'ai jamais rencontré).

Est-ce qu'il voyait rouge Gorbatchev ? Et pourquoi ? Parce qu'il ne m'a jamais rencontrée ? Je comprends. Peut-être qu'il était rouge ou qu'il voyait rouge à cause de sa tache de vin ? Okay elle est moins discrète que la mienne, mais tout de même, ça donne du charme. Peut-être qu'il était rouge parce qu'il était dans le rouge à la fin du mois mais ça m'étonnerait, il avait tout de même un ascenseur chez lui, installé par des amis, et j'ai vu dans un reportage qu'il vit dans une belle demeure ... S'il était dans le rouge, c'est qu'il n'a pas conclu le meilleur des marché ? Il aurait vendu l'URSS aux Ricains mais il serait quand même dans le rouge à la fin du mois ? Mais ça tient pas debout cette histoire ! L'URSS ça valait quoi ?

Pour répondre à cette dernière question, merci de bien vouloir lire la Fin de l'homme rouge de S. Alexievitch.
Commenter  J’apprécie          2614
Avez-vous déjà entendu parler des "coûts irrécupérables" ? "Par exemple, un spectateur au cinéma qui trouve le film très mauvais, hésitera à quitter la salle avant la fin du film pour ne pas gâcher l'argent dépensé pour son billet. Mais si un ami lui a donné le billet gratuitement, le même spectateur n'hésitera alors généralement pas à partir. Les deux décisions sont pourtant exactement équivalentes." (Wikipédia)
Connaissez-vous la théorie de l'engagement ? Elle est définie comme "la tendance que nous avons à maintenir un comportement, une fois initié par un acte ou une prise de décision, même si les raisons qui ont motivé cet acte ou prise de décision ont disparu entre-temps". (Hacking-social)
Tout ça pour dire que...
Plus le coût au départ est élevé... plus on s'est investi dans quelque chose... et plus c'est difficile d'y renoncer.
Cette technique de manipulation mentale résume tragiquement l'histoire de l'URSS.
Combien de fois trouve-t-on le mot "sacrifice" dans les propos recueillis par Svetlana Alexievitch ? (Pas autant de fois que "saucisson"... mais beaucoup de fois tout de même.) Tant de sacrifices ont été demandés aux Soviétiques pour construire un monde meilleur, qu'il leur est devenu impossible de renoncer à cet idéal ; impossible même d'ouvrir les yeux. On les a éduqués au sacrifice, depuis tout petits.
Lorsque Gorbatchev a entrepris des réformes, beaucoup les lui ont reprochées.
Lorsque l'armée a tenté un putsch pour le destituer, beaucoup l'ont approuvé, comme un retour à l'ordre naturel des choses.
Ces mêmes Soviétiques, ou leurs parents, avaient fermé les yeux sur les pratiques totalitaires, sur la terreur stalinienne, sur l'Holodomor, la famine organisée pour vaincre la résistance ukrainienne à la collectivisation.
Ces mêmes Soviétiques, ou leurs parents, ont sacrifié leurs vies au son des chants patriotiques dès leur plus jeune âge. Ils et elles ont exulté devant les parades militaires, ont pleuré d'émotion devant le tombeau de Lénine, ont vénéré Staline.
Mais leurs enfants, eux, ont voulu des jeans, des Marlboro et des magnétoscopes.
La fin du Parti communiste, l'explosion de l'URSS, l'irruption de la loi du marché et la paupérisation qui s'est ensuivie ont été de tels traumatismes... que Vladimir Poutine semble n'avoir eu qu'à apparaître, pour cueillir la plus grande partie de la population russe : les nostalgiques du communisme comme la jeune génération capitaliste.
Et avec une immense compassion pour toute cette humanité déboussolée, Svetlana Alexievitch donne la parole tour à tour à chacun et chacune, dans cette oeuvre si poignante et si éclairante.
"Vous, vous êtes un écrivain, vous comprendrez ce que je veux dire : les mots n'ont pas grand-chose à voir avec ce qui se passe à l'intérieur."
Eh bien si : Svetlana Alexievitch, par la puissance de ses mots, nous montre l'intérieur.
Traduction impeccable de Sophie Benech.
Challenge Nobel
LC thématique d'août 2022 : "Lire en couleurs"
Commenter  J’apprécie          3130
Une série de témoignages et de choses entendus, mais sans contexte, ce qui rend La fin de l'homme rouge difficile à lire. Des scènes insoutenables, mais au bout du compte, une meilleure compréhension du peuple russe même si nos différends ne semblent pas prêts de disparaître.

Des hommes et des femmes témoignent de leur existence dans l'Union soviétique et pendant la perestroïka.

Ce sont aussi des phrases tirées de bruits de la rue, de bruits de café ou de conversations de cuisine, ces dernières semblant avoir eu une réalité propre en Russie. Il n'y a donc pas de fil conducteur, ce qui rend ce livre de 540 pages un peu difficile à lire.

Il manque des repères et des contextes (à moins que vous ne soyez un fin connaisseur de l'histoire russe). J'avoue qu'à ma grande honte, j'en savais bien peu : la chute du mur, bien sûr, Gorbatchev, la tentative de putsch de 1991, Boris Eltsine et puis Poutine… mais ce qu'avaient vécu les Russes ? Sans doute quelques brèves, çà et là, vite entendues et vite oubliées.

J'ai eu besoin à plusieurs reprises de me plonger dans Wikipédia

À lire pour mieux comprendre ce pays pas si lointain et ses habitants, comprendre qu'ils n'étaient pas prêts pour la liberté (tellement précieuse à nos yeux) et encore moins pour le capitalisme.

Lien : https://dequoilire.com/la-fi..
Commenter  J’apprécie          341
Après La Supplication en 1998, sur la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, Svetlana Alexievitch publie en 2013 La Fin de l'homme rouge, exceptionnel recueil de témoignages d'anciens citoyens soviétiques, récompensé du Prix Nobel de littérature en 2015. La journaliste et écrivaine biélorusse y exerce son art de transformer les expériences individuelles en littérature et retrace l'histoire de la chute de l'URSS dans les années quatre-vingt-dix et ses conséquences jusqu'aux années deux-mille, du point de vue des vies minuscules. Si, selon l'autrice, « seul un Soviétique peut comprendre un Soviétique », on approche au plus près l'expérience de la peur, de la faim, de l'espoir du début des années quatre-vingt-dix et de la désillusion qui lui a succédé. Sans jamais porter de jugement sur les personnes qu'elle interroge et leur histoire, elle se fait chambre d'enregistrement de la mémoire collective et nous aide à mieux la comprendre.
Commenter  J’apprécie          31
Un essai triste, âpre mais passionnant!
Svetlana Alexievitch, prix Nobel 2015, utilise la même technique que dans La supplication, grâce auquel je l'avais découverte : elle collecte les témoignages, tous, bavardages au coin de la rue ou confidences en tête à tête, et les conserve précieusement, sans jugement ni parti pris.
Ce qui ressort, c'est un égarement, une perte totale de repère lors que l'URSS s'est effondrée en 1991.
Avant, les soviétiques avaient un idéal de la patrie, des valeurs communes, lisaient tous les classiques de la littérature, et avaient une place dans la société, quelque soit leur profession.
Après, les seuls objectifs sont consommer, acheter, gagner de l'argent quelque soit la manière ... d'où une explosion de banditisme et de violence ou la revente aux touristes des vestiges de l'époque totalitaire et des symboles soviétiques.
Mais attention, le message est loin d'être "c'était mieux avant"! Notamment lorsque les soviétiques découvrent l'ampleur des mensonges du pouvoir et des meurtres/arrestations/internements en son nom.
L'autrice présente les témoignages très finement, afin de nous faire appréhender au mieux la complexité de l'esprit et de la culture russe.
Une excellente lecture.
Commenter  J’apprécie          162
Ce livre est absolument exceptionnel et nécessaire pour mieux comprendre la chute de l'URSS. de nombreux témoignages y sont rapportés concernant le service militaire, les conditions de vie déplorables, le travail de forçat même pour celles et ceux qui n'étaient pas au goulag. Certains passages sont très difficiles mais je vous recommande vivement de lire ce livre surtout si vous vous intéressez à l'histoire de la Russie.
Commenter  J’apprécie          234




Lecteurs (2481) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3260 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}