A Benonces, à un peu plus d'une cinquantaine de kilomètres à l'est de Lyon, dans l'Ain, le samedi 31 août 1895, le corps d'un jeune berger, Victor Portalier, fût retrouvé, affreusement mutilé et souillé, dans un taillis entre deux genévriers.
Deux ans et de nombreux autres crimes non élucidés, plusieurs fausses pistes et non-lieux plus tard, un vagabond du nom de Joseph Vacher est arrêté.
Commence alors un duel entre la folie matoise d'un monstre et l'obstination investigatrice de son juge ...
"
Vacher l'éventreur" est un livre de
Pierre Bouchardon, paru, en 1939, aux éditions "Albin Michel".
Ce livre est peut-être un de ceux qui ont inspiré le film, "le juge et l'assassin", réalisé en 1976 par
Bertrand Tavernier.
Tout dans le film est habileté de réalisateur et prouesse d'acteurs.
Michel Galabru et
Philippe Noiret y ont formé un bluffant duo au service d'un tragique récit.
Mais
Pierre Bouchardon, dans son livre, ne lâche pas la bride à ses personnages.
Il raconte assez platement.
Le magistrat qu'il était, jamais ici, n'a cédé le pas au romancier qu'il aspirait à être.
Car
Pierre Bouchardon a écrit de nombreux ouvrages sur de vieilles et passionnantes affaires criminelles.
Le temps de quelques procès burlesques et autres crimes d'autrefois, il a même fréquenté, comme
G. Lenotre, la nouvelle collection des "Énigmes et Drames judiciaires d'autrefois" de la librairie académique Perrin et Cie.
"L'auberge de la tête noire", "la tuerie du pont d'Andert", Dumollard, le tueur de bonnes", "le duel du chemin de la favorite" ... autant d'ouvrages qui tentent d'allier, souvent avec succès, frisson et rigueur historique.
Un journaliste de la "Dépêche de Toulouse", Alain Lambreaux en vint même à comparer
Pierre Bouchardon à
Conan Doyle lors de la sortie de sa fameuse "Malle mystérieuse".
C'est qu'en ce temps là, on n'avait peur de rien à la "Dépêche" !
Quoi qu'il en soit, "
Vacher l'éventreur" est un livre captivant mais qui ne réussit pas vraiment à être passionnant.
Et pourtant
Pierre Bouchardon y a convoqué "l'homme invisible" d'
H.G. Wells, "l'homme qui rit" de
Victor Hugo et même
André de Lorde et son théâtre du Grand-Guignol afin de faire monter encore d'un cran la tension !
Mais la vraie question qui vaille vraiment d'être posée est celle de savoir si la justice a finalement guillotiné un dément ou un coupable réellement responsable de ses actes.
Et c'est là que l'ouvrage de
Pierre Bouchardon vient prendre son véritable intérêt.
Car même si l'on n'aperçoit que peu le caractère des deux personnages principaux de ce procès, toute l'affaire est fidèlement et minutieusement reconstituée, de manière vivante et intéressante.
Entre les années 1855 et 1861, un dénommé Dumollard avait semé la terreur et la mort parmi les servantes en quête d'une place.
Il était à peine oublié lorsque Joseph Vacher, celui qui fût surnommé "Jack l'éventreur du sud-est", entama sa lugubre et sanglante randonnée, peut-être la plus horrible dont les annales du crime aient gardé le souvenir ...