L'Océan, Éléor, le Courage des Oiseaux, Immortels, Toute latitude, La Poésie, La Fragilité, le Temps qui passe sans moi, Parce que tu étais là, Par les lueurs, font partie des très nombreuses chansons de
Dominique A, un auteur-compositeur-interprète que j'apprécie particulièrement.
Découvrir un recueil de poésie de
Dominique Ané (est-ce de sa part ou de la maison d'édition L'Iconopop un choix pour marquer une distance avec le chanteur
Dominique A ?) ne me paraît pas en soi surprenant, tant les textes de ses chansons sont pour la plupart imprégnées d'une certaine poésie, la musique en plus.
Si les contraintes d'écriture, si la structure rythmique d'une chanson ne sont pas celles d'un poème, il y a dans les textes de ce recueil de
Dominique A(né) une inspiration qui s'ancre, légère, dans l'émotion, lui donne sa dimension et la laisse comme en suspension :
« La première chose que j'ai vue
c'est le carrelage
motif à trois couleurs
traçant le chemin
jusqu'à l'escalier
Je suis monté
et je suis resté en arrêt
à l'étage
face à l'eau qui s'étalait
j'ai pensé c'est l'endroit
pour mettre un crochet
aux années
Je suis redescendu
et j'ai marché lentement
sur le carrelage
pour l'habituer
Il a pris mes empreintes
pour mon retour »
Les lieux de l'enfance, les souvenirs, une maison en bordure d'un long fleuve, sur l'autre rive une ville à portée de regard, des passants anonymes, la somme des jours, et puis l'écriture, les poèmes nés de l'instant, dénués de sens d'entre les lignes, la lecture, une page tournée l'est souvent pour toujours.
Le Présent impossible, celui d'une jeunesse perdue, d'une lassitude, de l'incompréhension de ce que nous sommes devenus, d'une Terre que nous délaissons, la perception soudaine de ce que la vie trame, de ce qui nous rapproche du bout du chemin.
« J'ai chaque jour une idée plus nette
de ce qui se perd en chemin »
Même si les poèmes n'ont pas tous la même portée, ce recueil de
Dominique Ané m'a beaucoup plu. Poèmes en vers libres, sans ponctuation, détachés les uns des autres, on sent en chacun d'eux l'instant qui les a vu naître. En retour, la restitution de belles images, fragiles, évanescentes et pourtant bien réelles.
« Il n'est écrit nulle particulièrement
sur le sol
que les pieds ne peuvent s'y poser
La terre n'a pas de mots
pour barrer un chemin
La route accepte toute empreintes
mais ne garantit pas
qu'elle y demeure
Et nous serions
riches d'un sol ?
Riches ou pauvres
nous partons un jour
sans rien
à peine si le sol
s'en aperçoit »
Une mention aux très belles illustrations en noir et blanc d'
Edmond Baudoin - scénariste et dessinateur de nombreuses bandes dessinées - qui accompagnent à merveille les poèmes (le contraire de la couverture du livre dont la conception graphique laisse à désirer, tout comme l'absence de pagination).
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