Yann Codou

Le Calavon (1)n'a pas le renom de la Seine,
Mais il a salué César (2)
Et le sage empereur qui montait Borysthène (3)
Y déploya son étendard.
Avec ses blondes eaux, il baigne, il fertilise
Des rivages aimés des dieux
où l'abricot vermeil, la pêche, la cerise,(4)
Tentent la main, charment les yeux.
Antonin Benardi de Sigoyer qui sera sous-préfet . A cette époque la fonction laisse beaucoup de loisirs pour s'en aller aux champs. Au cœur de la nature, le poète s'exalte nous précise-t-on "dans des rêves d'un esprit sublime, toujours enveloppé dan les plus chastes draperies d langage retentissant de la plus délicieuse harmonie". (...) Ne sourions pas, Tentons de nous placer dans le contexte du temps !
1 Le Calavon, affluent droit de la Durance
2 Il s'agit de l'empereur Hadrien
3) Son fidèle et très aimé destrier qui, selon la légende serait enterré dans les parages d'Apt
4) Apt, capitale mondiale du fruit confit (du moins à cette époque)

Le passage d'une siècle à l'autre et le basculement dans le troisième millénaire constituaient un tel événement qu'une collectivité, fût-elle territoriale, se devait de marquer. Quand nous étions enfants, au lendemain de la guerre, les "anciens" ne nous disaient-ils pas : "vous les jeunes vous verrez peut-être 'an 2000, il y aura ceci, il n'y aura plus cela... Nous y sommes arrivés, portés par les flots du fleuve temps, avec ses crues et ses étiages, ses calmes et ses tourbillons. C'est vrai que le monde a changé, mais aucune génération n'a pu prétendre, comme le disait Albert Camus, d'avoir refait ce monde. Les progrès sont innombrables mais ne profitent pas toujours au plus grand nombre. Et l'on sait depuis longtemps que, sans conscience, les avancées peuvent aussi entraîner des reculs.

Les monuments de pierre qui s’élèvent dans nos campagnes ne doivent pas être abordés de manière isolée et surtout pas coupés du contexte général.[…] Ils sont bien souvent le résultat de volontés politiques et font partie d’un programme plus global d’organisation de l’occupation humaine.

L'histoire de Lérins est celle d'une Église dominant la société de son temps. Très tôt, l'île, "eremus" largement ouvert sur l'extérieur, est devenue un pôle d'attraction sans équivalent sur les plans spirituel, intellectuel et social, ainsi que le lieu d'essaimage, fournissant le personnel, structures d'autorité et système de valeurs à la société de l'Antiquité tardive. Plus tard, au Moyen Âge, les religieux ont mis en place, à partir de leur monastère insulaire, une puissante Église seigneuriale commandant un vaste réseau de prieurés et de dépendances, engagée au service de la papauté et dans la lutte contre les ennemis de la foi, tels que les Sarrasins.

Le moine se nourrit de la méditation de la Bible. [...] Chez Cassien, les Écritures sont une plaine ou un champ. De même que dans la plaine poussent toutes sortes de plantes, qui nourrissait l'homme comme le détail, de même on peut se nourrir du sens littéral ou du sens spirituel des textes sacrés dans la plaine des Écritures.