Toute soi-disant volonté est une manifestation du je-concept. Qui recherche l'illumination ? Dans la mesure où cette dernière est recherchée sous la contrainte du je-concept, comment pourrait-elle être atteinte ?
Ceci est la raison pour laquelle toute "méthode", "discipline", etc... assujétie au je-concept est nécessairement un chemin qui nous éloigne de chez nous. Etant donné que toute action qui n'est pas une non-action, et ne peut être spontanée, se trouve accomplie sous la contrainte du je-concept --car il n'y a pas d'autre "acteur", j'entends d'autre acteur véritable -- l'illumination ou satori ne peut être que la conséquence de la non-action.
Il semble y avoir deux types de chercheurs : ceux qui visent à faire de leur ego quelque chose d’autre qu’il n’est, quelque chose de saint, de gai, de généreux (comme si l’on pouvait rendre « non chat » un chat) et, d’autre part, ceux qui comprennent que toutes les tentatives de ce genre sont seulement des gesticulations et de la pure comédie. Ces derniers réalisent aussi qu’il n’y a qu’une seule chose qui puisse être faite, elle consiste à se désidentifier de l’ego en prenant conscience de sa non réalité et en prenant conscience également de notre identité éternelle avec le pur Etre. Autrement dit, il s’agit juste de sortir du rêve éveillé comme nous sortons tous les matins du rêve endormi.
Il n’y a rien à chercher quand c’est trouvé
Il n’y a nulle part où aller quand c’est ici,
Il n’y a rien à faire quand c’est fait,
Il n’y a rien à regarder quand c’est vu,
Il n’y a rien à être quand nous SOMMES.
Qu’y a-t-il à trouver quand « trouver » est le « cherchant » ?
Où peut-on aller quand « aller » est l’ « allant » ?
Qu’y a-t-il à faire quand « faire » est l’ « agissant »
A voir quand « voir » est le « regardant »,
A être quand « être » est l’ « étant » ?
Quoi donc ?
Quand il n’y a point d’acteur pour « agir »,
Aucun « moi pour jouer « Je »,
Le spectacle est terminé.
A qui puis-je être présent, de qui puis-je être absent ?
Par l'absence de : regarder, écouter, toucher, goûter, sentir et penser, nous saisissons que cette nature virtuelle [la conscience] est ce que nous sommes. Car elle est le non-manifesté de ce que nous voyons, entendons, ressentons, goûtons, humons et concevons comme étant manifesté. C'est le négatif de tout ce qui pour nous est positif; c'est la virtualité de toute illusion – et toute expérience sensorielle ou conceptuelle est illusion. Je n'ai qu'à cesser d'être, afin de devenir ce qu' Est un «je» ; il me suffit de comprendre que « je ne suis pas », afin d'être « Ce Que Je Suis ».
Toute comparaison est fondée sur la mémoire, et la mémoire est une image fondée sur des engrammes. Il s'ensuit que tout jugement, toute appréciation est une interprétation d'images car même le présent est déjà un souvenir lorsque nous l'avons saisi. En conséquence, le processus interminable qui consiste à trouver les choses « bonnes » ou « moins bonnes » est une œuvre de l'imagination. Ne serait-il pas vraiment futile de supposer que de tels jugements, c'est-à-dire n'importe lequel d'entre eux et tous à la fois, puissent avoir quelque existence ou valeur absolue ?
Chercher à nous persuader que nous n'avons pas d'exis- tence en tant qu'entités particulières, c'est cependant demander à un œil de croire que ce qu'il observe n'existe pas. Pourtant il n'y a pas que nous seuls qui sommes sans existence en tant qu'entités : il n'y a d'entité nulle part dans le cosmos ; il n'y en a jamais eu, et il ne saurait y en avoir. Seul le mental-intégral peut révéler cette connaissance, en tant que cognition directe, laquelle une fois aperçue, est évidente. Cela constitue le rajustement intégral. Et « JE» seul demeure.
L'intuition, au contraire, est notre « Soi » impersonnel (pour utiliser ce terme à la façon des Védantistes), et quand nous reconnaissons cela, nous devenons ce « Soi» impersonnel pour la durée de la compréhension. Nous ne faisons qu'être nous-mêmes, ce que nous sommes lorsque nous ne sommes plus « nous ». La « prise-de-conscience » de toutes pensées est « nous » en tant que conscience, mais les pensées sont alors nos objets, tandis que les intuitions sont subjectives, et sont la conscience même.
Toute soi-disant volonté est une manifestation du je-concept. Qui recherche I'illumination ? Dans la mesure où cette dernière est recherchée sous la contrainte du je-concept, comment pourrait-elle être atteinte ? D'autre part, aussitôt que disparaît le je-concept, on la sent comme ayant toujours été présente.[...] L'illumination ou satori ne peut être que la conséquence de la non-action.
Il n'y a pas de « Chemin». L'image est trompeuse - car il n'y a nulle part où aller, et personne pour aller où que ce soit. Il n'y a qu'un regard à partir de la bonne direction, une orientation du mental. Paravritti, la métanoesis, est, à n'en pas douter, simplement cela. Et personne ne l'accomplit, rien n'est accompli, cela est acte pur.