Quel fut le rôle de l'empire byzantin dans l'essor culturel de l'Europe latine à l'époque de l'art roman ? C'est à Byzance, en effet, que fut recopiée la quasi-intégralité des uvres de l'Antiquité grecque. Et c'est dans la cité impériale que la culture antique continua pendant des siècles à servir de socle à l'enseignement scolaire, la paideia παιδεία certes réservée à une élite. Ce bagage byzantin fut transmis aux cours royales et aux abbayes de l'Europe à l'époque romane. On rencontre ainsi les influences artistiques byzantines à travers toute l'Europe des Xe-XIIe siècles, dans les vallées de la Meuse ou du Rhône, en Allemagne, jusque dans les royaumes scandinaves. De nombreux textes antiques furent alors traduits en latin puis commentés. Les routes et les intermédiaires humains par lesquels cette transmission s'est effectuée montrent un couloir de circulation reliant la Sicile, l'Italie du Sud, la vallée du Rhône, la cour de Champagne, les abbayes d'Île-de-France et de Normandie, le monde rhénan... C'est toute l'influence byzantine sur le monde latin, visible dans les fresques et les enluminures, dans la transmission d'ouvrages, d'abord religieux, puis savants que retrace dans cet essai magistral Sylvain Gouguenheim.
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Dès les premières années de la présence des Teutoniques, des villes sont fondées, en Culmerland et en Pomésanie : Thorn (1231), Culm (1232-1233), Marienwerder (1233), Rehden (1234), Graudenz (1234), Elbing (1237), Memel (1254), Königsberg (1255). Plusieurs de ces fondations furent ensuite déplacées, comme le montre l'exemple de Culm. La grande apostasie et la guerre des années 1260-1283 ralentirent un mouvement qui reprit ensuite de plus belle et ne se démentit pas jusqu'à la fin du XIVème siècle.
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Au début du XVème siècle, la Prusse comptait désormais une soixantaine de villes, le Culmerland une quinzaine et la Pomérélie vingt.
En matière de science historique, où comptent les faits et les sources, les opinions politiques ont un poids plus important qu'en philosophie : si Heidegger peut être à la fois un grand philosophe et proche des nazis, Sigrid Hunke ne pouvait être une bonne historienne. Animée par une violente hostilité envers le judéo-christianisme, qu'elle accusait d'avoir empoisonné l'Occident, elle a vu dans l'Islam son antithèse absolue, alliant énergie martiale et raffinement civilisationnel. Dès lors, son livre devenait un ouvrage politique et non plus scientifique.
Après la guerre, Sigrid Hunke vécut à Bonn et se fit mondialement connaître par son œuvre au titre éclatant. Elle fut alors admise au Conseil supérieur des affaires islamiques du Caire. Tout au long de sa vie, S. Hunke rejeta l'influence du chrisrianisme, jugé artfrefmd (« étranger à l'espèce allemande») et oriental. Dans la ligne de la pensée national-socialiste, elle prônait le retour aux valeurs de la Germanie païenne et à une identité européenne, à laquelle elle associait l'islam. Cette amie d'Himmler, demeure, par ses écrits, une figure de proue d'une certaine extrême gauche.
L'orientaliste allemande Sigrid Hunke (1913-1999) s'est rendue célèbre par un ouvrage paru en France en 1960, "Le soleil d'Allah brille sur l'Occident", où elle avance la thèse d'un monde occidental corrompu par le judéo-chrisdanisme et qui ne doit sa science, sa civilisation et son art de vivre qu'au monde arabo-musulman. En particulier, rien du Moyen Age chrétien ne trouvait grâce à ses yeux, s'il n'avait une origine arabe ou musulmane, réelle ou - le plus souvent - supposée par elle. S. Hunke avait d'ailleurs tendance à fondre les éléments arabes et les éléments musulmans, et à attribuer ainsi à l'islam ce qui venait des arabes chrériens, des sabéens ou des juifs. Livre touffu, rempli d'exemples mais avare en références précises, Le soleil d'Allah... défend la thèse d'un Islam civilisateur, pionnier, au génie exceptionnel, auquel l'Occident devrait tout, philosophie, mathématiques, science expérimentale, tolérance religieuse, etc.
L'ouvrage mériterait d'être étudié page par page tant il déforme les faits, ment par omission, extrapole sans justifications et recourt au besoin à la tradition ésotérique. Mais il a été, et continue d'être, comme le montre une rapide enquête menée sur Internet, un livre de référence qui façonne l'air du temps. Cet ouvrage, qui exalte la supériorité de l'islam sur le christianisme, est dû à une intellectuelle nazie.
A son origine se trouvent en effet les engagements politiques de Sigrid Hunke, qui adhéra au NSDAP (le Parti national-socialiste allemand) le 1er mai 1937 et fut membre active de la section berlinoise de l'Association national-socialiste des étudiants (Nationalsozialistischer Stiidentenhmd) dès 1938. Elle suivit à la Humboldt-Université de Berlin les cours de Ludwig Ferdinand Clauss, théoricien racialiste influent et soutint une thèse sous sa direction en 1941, consacrée à l'influence de modèles étrangers sur l'« homme allemand» («Herkunft und Wirkung fremder Vorbilder auf den deutschen Menschen»).
A partir de 1940-1941, sa sœur Waltraud et elle participèrent activement aux activités de la Germanistischen Wissenschafteinsatz de la SS et S. Hunke obtint une bourse de l'institut Ahnenerbe («Héritage des ancêtres»), fondé le 1er juillet 1935 par H. Himmler et W. Darré, et placé sous le patronage des SS et du ministère de l'Agriculture. Bientôt membre de cet institut et collaboratrice de sa revue Germanien, elle entretint d'amicales relations avec H. Himmler qui la mit en contact avec le grand mufti de Jérusalem, Al-Husseini, admirateur des nazis. L'Ahnenerbe se voulait un institut scientifique voué, entre autres, à la perpétuation de l'Allemagne éternelle, celle que concevait l'idéologie national-socialiste.
Mais Constantinople n'était plus le coeur d'un empire. Elle n'était qu une cité-Etat, de faible envergure par rapport à ses contemporaines italiennes, sans véritable domination territoriale au-delà de ses enceintes. Son activité se déployait au sein d'un univers hostile. La marche de l'Histoire la laissait sur le côté de la route.
29 mai 1453. De longs cortèges d’hommes, de femmes et d’enfants entravés sont embarqués dans les dizaines de navires ancrés dans la Corne d’Or : près de 50 000 nouveaux esclaves destinés à finir leur vie dans l’immense Empire ottoman. Derrière eux, une ville dévastée, parcourue par la foule des soldats du « Padichah », le sultan Mehmed II ; des rues jonchées de milliers de cadavres qui flottent aussi à la surface des eaux, « tels les melons gâtés dans le canal » notera, en une image saisissante, le Vénitien Nicola Barbaro, rescapé du siège. Constantinople vient de tomber aux mains des Turcs. L’Empire romain d’Orient, vieux de mille ans, à l’agonie depuis des décennies, a cessé d’exister ; un nouvel empire le remplace. L’ordre du monde change.
Le spectacle ravit sans doute le cœur du sultan ; il le laissa songeur aussi, si l’on en croit le chroniqueur Tursun Bey, chargé du recensement du butin et des esclaves après la victoire :
"Quand il constata que les annexes et dépendances de ce puissant bâtiment étaient en ruine et détruites, il se fit la réflexion que ce monde est sans constance ni permanence, et, qu’en fin de compte, il court à sa ruine. L’araignée tisse sa toile dans les tours de Khosroès ; la chouette fait sa ronde sur la forteresse d’Afrasiyab."
Le sultan y gagna toutefois son surnom de Fatih, « le Conquérant », tandis qu’un moine crétois exprimait la lamentation des chrétiens : « Jamais il n’est survenu, jamais il ne surviendra d’événement plus épouvantable. »
(INCIPIT)
L'absence de politique impérialiste ne signifie pas l'absence de politique impériale. L'empereur est un dispensateur de libertés - au sens médiéval du terme -, non un conquérant.
Le sultan avait montré son habileté diplomatique, largement aidé par la crainte que suscitait son armée. Le monde chrétien, comme souvent ceux qui redoutent la guerre, s'était volontiers laissé persuader que son adversaire ne désirait rien d'autre que la paix. Seuls les Grecs avaient déjà pu éprouver sa fermeté.
"Il n’est pas aisé ni anodin, de passer du grec à l’arabe – que ce soit ou non par l’intermédiaire du syriaque-, puis de l’arabe au latin. Quel texte philosophique, quel raisonnement scientifique peuvent sortir indemnes de telles transformations répétées où, non seulement le vocabulaire, mais la pensée, exprimée par la syntaxe, basculent d’un système indo-européen à un système sémitique avant de faire retour à l’origine."
Héritier de deux royaumes, porteur de deux couronnes mais très tôt orphelin, confié à la tutelle du pape et en butte aux ambitions des régents, Frédéric II détenait, en théorie, un pouvoir immense, résultat des politiques menées par ses ancêtres ; mais il dut s'en emparer.