On s’impatiente vite dans les transports en commun et leurs environnements inhospitaliers. Un jour il faudra demander à des scientifiques de faire une étude sur le sujet afin d’expliquer les causes qui conduisent l’être humain à l’empressement dans ce type de lieu ; ces mêmes spécialistes qui se demandent pendant des mois si les chats reconnaissent vraiment leur prénom puis qui s’inquiètent sérieusement de l’influence des plantes sur notre moral après le passage à l’heure d’hiver.
Là, dans ce train, je médite sur l’amour. Qui me manque mais que je crains de vivre. Qui m’obsède mais me paralyse. Qui m’attend peut-être mais qui se cache sacrément bien, fichu bougre. J’essaie de me dire qu’à chaque crépuscule succède une aube.
Elise préfère ruminer en boucle plutôt qu’exprimer ses tourments aux gens qu’elle aime. Ca lui cause souvent des insomnies, parfois des tremblements. Elle se confie un peu à sa mère mais celle-ci n’écoute pas et de toute façon elle n’a jamais été de bon conseil. Parfois elle lâche des brides de secrets en société mais toujours de façon fugace. Une petite phrase, un message sibyllin perdu dans un flot de badineries. Vu son style volubile difficile de s’en rendre compte. La confidence s’évapore aussi vite qu’elle est apparue.
Les gouvernements du monde sont en train de se rendre compte qu’enterrer les déchets n’est pas une solution d’avenir alors pourquoi tu t’entêtes à faire pareil avec tes sentiments ?
(le râteau n'empêche pas la politesse)
« La vie est faite de choix » disait un de mes professeurs : c’est l’une des phrases qui a le plus marqué ma jeunesse avec « On ne peut pas laisser deux fils ensemble sans qu’ils se mettent à faire des nœuds ».
Elle m’a fait penser à Elise par son regard énigmatique, sa façon d’évoluer dans l’espace, ce côté un peu paumé mais sûre d’elle. Cet air-là, je l’avais déjà décelé chez d’autres. Je pense que je le traque.
-Tu le revois quand ?
– J’espère avant l’extinction du panda roux….
– Et en vrai ?
– Je ne sais pas. Peut-être demain, peut-être jeudi. Peut-être cet après-midi parce qu’on se croisera dans le métro…Cette histoire cumule tellement de hasards que je ne cherche pas à faire de plans. Après, si j’ai vraiment envie de le voir, j’ai le code de son immeuble, il suffit que j’attende dans l’ascenseur. Ce n’est pas trop le genre de gars à prendre les escaliers.
Imaginez la scène. Heure de pointe. Métro bondé. On se sert les uns aux autres dans la caisse de ferraille vitrée aux portes automatiques. (…) Au delà de l’inconfort du corps trimballé entre les stations se trouve celui des yeux. Où planter le regard ? Si le hasard du Tetris humain me place face à une femme attirante, mes pupilles digressent. J’ai très envie de la regarder mais je ne veux pas la fixer au risque de paraître inconvenant.
Chaque trajet se fait avec excédent bagage émotionnel : trop d’impatience à l’aller, trop de mélancolie au retour.