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Citation de migdal


Et que dire de la table du préfet ? Les grands soirs, c’était encore un service à la française. Cent soixante domestiques déboulaient alors, leurs favoris au rouleau,
d'une raideur impeccable sous la livrée municipale : culotte rouge, habit bleu, aiguillettes d'or. Leur cortège serré passait une multitude de mets différents, sans discontinuer, parmi lesquels l'hôte époustouflé n'avait qu’à designer de temps à autre ce dont il voulait bien se régaler.

L'incroyable énumération de bisques et de fumets, de turbotines et de croustades, de poissons en gelée, de cailles et d'écrevisses en buissons, dont un passage de sorbets vous reposait avant l'attaque des salmis de volaille et des rots, des gigues et, pourquoi pas, des suprêmes, puis celle des desserts et des mignardises à n'en plus se relever, tout ce bréviaire français, en somme, courrait sur des pages entières d'un velin filet d'or fin. Oh! il y avait toujours une fine bouche pour se plaindre, tel ce Fortoul, pâle ministre de I'lnstruction publique, qui, au soir du baptême du prince imperial, notait dans son journal: « Le gras était bien mauvais, et Ie maigre peu abondant. »

L’abondance, pourtant, même pour un rapide buffet d'honneur, faisait les choux gras des gazettes quotidiennes. On s'en délectait à l'avance : "Sept grands buffets semés ça et là [...] distribueront aux invités 25 000 glaces, 35 000 verres de punch, 15000 bouillons, d'innombrables gâteaux, sorbets, chocolats, liqueurs fraiches, cafés glaces, vins de toutes espèces."

Ces vins, justement, éclipsaient bien souvent les prouesses culinaires. La cave de l'Hotel de Ville faisait l'orgueil de son hôte. Pour avoir régné sur la Guyenne, Haussmann, il est vrai, s'y entendait. Et cela se savait. Le beau monde sifflait donc tout ce qu'Yquem, Lafite et Léoville pouvaient livrer de flacons, auprès desquels un chambertin ou une romanée-conti trouvait parfois grâce. Ce vin-là devait vous griser sans vous abattre, puisque après il fallait danser.
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