La nouvelle se répandit comme une traînée de poudre. Le hamster de la classe de madame Laviolette avait disparu. Évasion? Kidnapping? La cage était bel et bien ouverte. L’institutrice organisa aussitôt une battue1 pour retrouver le disparu. La boîte de retailles, la corbeille à papier, les interstices du radiateur, les pupitres, tout fut méticuleusement fouillé par la classe. En vain. Un avis de recherche fut lancé à travers l’école. Devant le manque de motivation des élèves des autres classes, la direction promit une récompense. On ajouta sur les affiches: «Congé de devoirs pour qui retrouve Pogo». L’école entière fut mobilisée. Les enfants ratissaient les couloirs, questionnaient le concierge. Les professeurs constituèrent une cagnotte2. La direction était submergée d’appels. Les rumeurs avaient transformé le hamster en ours vorace. Un communiqué fut envoyé aux parents. Le port d’armes était interdit. L’école assurait la protection des élèves. Néanmoins certains professeurs, prêts à toute éventualité, ne se déplaçaient plus sans moulée et bâtonnets de carottes. La faim décuplait les forces d’un animal, c’était connu.
À une réunion de parents, la direction suggéra qu’il serait prudent de faire vacciner les élèves. À l’air libre, Pogo avait pu attraper la rage. Oui, les professeurs avaient été formés pour agir en cas d’urgence, ce qui avait coûté une fortune à l’école en heures supplémentaires. Oui, l’école travaillait conjointement avec la SPCA.
Après une semaine fébrile mais sans résultat, il fallut reprendre le cahier de devoirs. Certains parents au cœur de pierre s’étaient plaints: ils n’envoyaient pas leurs enfants à l’école pour qu’ils passent leurs journées à courir après une touffe de poils.