Dans tous les temps, les écoles spéciales ont eu des ennemis. On les accuse d’être quelquefois des asiles ouverts par l’État à de studieuses médiocrités: on les dépeint comme des prisons intellectuelles où les talents originaux sont étouffés; on leur reproche d’étendre sur une science ou sur un art une uniformité déplorable et de viser plutôt a couronner les qualités moyennes qu’à développer les instincts exceptionnels et le génie naturel.
Il est constant qu’on ne peut devenir habile peintre ou sculpteur sans des dispositions, pour ainsi dire, surnaturelles et que, dans le nombre de deux cents sujets, à peine s’en trouvera-t-il deux ou trois qui aient ces dispositions ; de là il faut conclure l’impossibilité de former, un bon sujet dans le nombre de six ; le hasard serait trop grand, pour ne pas dire miraculeux. Il n’y a donc que le grand nombre qui puisse en produire quelques-uns. La preuve en est sensible dans l’exemple qui suit.
II y a plus de deux mille peintres à Paris; joignons-y ceux des provinces et des royaumes étrangers, cela pourra, faire quatre ou cinq mille ; combien d’excellents dans ce grand nombre ? douze ou quinze, en y comprenant même les talents particuliers.
Les six protégés, car c’est ainsi qu’on les distingue, doivent être logés, nourris, chauffés, etc..., et jouir chacun de 400 liv. de pension pendant trois ans pour leur entretien. C’est M. Dumont à qui la direction de cette école est déférée ; c’est sous ce maître qu’il faut devenir grand peintre en trois ans.
L’Académie royale de peinture a pour objet, dit Blondel, de former des peintres, des sculpteurs et des graveurs d’un mérite éminent. Elle a pour base l’école du modèle, qui se tient tous les jours de l’année à l’exception des dimanches et fêtes, pendant deux heures. Cette école est conduite par un professeur, qui change chaque mois, et par l’un des recteurs, qui sert par quartier.
On connaît, grâce aux spirituels mémoires de Charles Perrault, les tribulations du cavalier Bernin, mandé à Paris par Louis XIV pour construire le Louvre et tombé au milieu des cabales organisées par les artistes français qui le forcèrent à repasser les monts. Perrault nous apprend que le Bernin vint en France avec son fils, mais il ne nous dit pas que celui-ci ait été employé par la Cour. Il le fut cependant et on doit regarder le bas-relief de la salle de la cheminée de Bruges comme une des traces de son passage à Paris et comme une oeuvre authentique de sa main.
Depuis qu’elle compte dans l’histoire du monde civilisé, c’est-à-dire depuis la conquête romaine, la France eut-elle un art personnel et particulier, ou plutôt interpréta-t-elle d’une manière personnelle et nationale un art que ses vainqueurs lui avaient communiqué? La France eut -elle des écoles d’art? La réponse affirmative n’est pas douteuse. On sait avec quelle rapidité la Gaule s’assimila les arts de Rome, pour les empreindre bientôt de son caractère et, sur certains points, les perfectionner.
Après avoir épuisé l'admiration de la génération qui l'a vu apparaître et qui la laissa périr sans l'avoir coulée en bronze, elle ne revit pas même, aujourd'hui, sous une forme pittoresque bien définie et arrêtée dans la légende littéraire éclose autour d'elle. J'ai l'ambition de restituer à l'histoire de l'art, d'après un document positif, la pensée plastique de Léonard de Vinci.