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Critiques de Kate Elizabeth Russell (69)
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Ma sombre Vanessa

Que deux romans sur le même sujet sortent en 2020, avec le prénom Vanessa en titre ou en prénom d'auteur , n'est que pure coïncidence : Vanessa Springora n'est pas "sa" Sombre Vanessa"... mais elles se ressemblent fortement...



La Vanessa qui nous préoccupe est une adolescente de 15 ans. Fille unique , habitant dans un coin assez isolé, elle demande à intégrer le lycée de Browick et son internat , à ses parents qui acceptent, voyant-là une occasion de se préparer à l'université. Elle se fera une amie, mais jalouse de sa nouvelle relation amoureuse , se brouillera avec elle. de sorte qu'en cette rentrée, elle est bien seule et fera une proie idéale pour le professeur de littérature Jacob Strane, 42 ans. Presque 30 ans les séparent. Il n'est pas très beau, mais il a de l'ascendant sur elle.

De petits compliments, en caresses (l'air de rien ), il va progressivement tisser sa toile autour d'elle. Elle manque tellement d'assurance, il a de l'expérience. Elle ne sait rien, il connaît tout de la littérature . Elle sort de l'enfance, c'est un homme avec maison, et voiture : le combat est inégal.

"Ma sombre Vanessa, tu es aussi sombre que moi", lui dit-il ...

Et l'histoire lui donne raison. Alternant passé et présent, Kate Elizabeth Russell passe de la Vanessa de 15 ans, à celle de 32 ans. On voit ce qu'elle est devenue, et ce n'est pas la joie... Vanessa n'a pas eu (encore) le brillant avenir que lui promettait son prof, elle est réceptionniste dans un hôtel,s'envoie en l'air avec des inconnus rencontrés sur internet, elle se drogue et boit un peu trop. Elle en est là quand une ancienne élève de l'internat Browick, à la faveur du mouvement #metoo, la contacte. Elle a porté plainte contre le Professeur Strane, suivie par quatre autres élèves, une journaliste veut interviewer Vanessa. Alors, Vanessa se souvient remonte le fil du temps, téléphone à Jacob. Elle n'a pas pu se tromper à ce point ? Si c'était une agression sexuelle, qu'est-ce que ça dit d'elle , elle qui croyait vivre une magnifique ( mais secrète) histoire d'amour ? Elle qui ne s'est jamais remise de cette relation. Elle qui croyait être la seule...

Vanessa témoignera ? Ne témoignera pas ?

Qu'est-ce que la notion de Consentement à cet âge ? ...



A travers ce portrait de femme ambigüe et en perdition, Kate Elizabeth Russell nous montre comment un prédateur approche, séduit et met KO sa victime. Enormément de nuances, de finesse d'analyse dans cette plume qui dissèque autant qu' elle raconte.

C'est brillant, on admire autant qu'on est mal à l'aise. D'autant plus , que je n'ai pas pu m'empêcher de faire le parallèle avec une histoire réelle, celle d'un prof qu' ont eu mes enfants, qu'on trouvait bizarre, (à cause de petites choses qu'il disait et qui étaient totalement déplacées mais réparties sur des années...) sans penser qu'il irait jusque là , jusqu'à ce que... Qu'il y ait des bruits qui courent, puis un procès quelques années après. La victime avait le même profil psychologique que la Vanessa du roman , très déterminée à avoir cette relation , mais très vulnérable. dans les faits. Je dirais qu'ils essaient avec toutes, et que seules "succombent" les plus fragiles...

Et du coup cette histoire m'a mise très mal à l'aise.

C'est un roman formidable, puissant, nécessaire mais éprouvant...

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Ma sombre Vanessa

L'auteur, kate Elizabeth Russell prend bien soin dans un préambule, d'insister sur le fait que "ma sombre Vanessa" est un roman et, en aucun cas, un roman biographique et que tous les personnages sont fictifs. Après lecture, je comprends pourquoi il lui a été nécessaire de prendre cette précaution. Sans celle-ci l'histoire lui aurait été assurément attribuée, il y a une telle justesse des sentiments. L'ambivalence des comportements, des désirs est tellement bien décrite que l'on croit aux personnages, cela en est même troublant. J'ai moi-même été tout au long de cette lecture perturbée par des sentiments contradictoires.

La façon dont la relation entre Vanessa, jeune fille de 15 ans et son professeur Jacob Strane, de 42 ans se met en place est troublante car il s'instaure des doutes sur le consentement.

Mais tout cela est en nuances et pas à pas on ressent l'emprise et un malaise grandissant, la culpabilité, les interrogations,l'ambivalence .

Alors bien sûr, on a envie de mettre en garde Vanessa et de la protéger mais sa fragilité ainsi que l'engrenage dans lequel elle se trouve la conduisent vers une relation de plus en plus toxique. Jacob Strane sait s'y prendre pour tisser sa toile et prévenir ses arrières, jusqu'au jour où, plusieurs années plus tard, d'autres élèves vont porter plainte.

Ce roman est extrêmement bien fait car il est criant de vérité. le professeur n'est pas le bel homme caricatural, non il est décrit comme ayant une bedaine, des bajoues, ne sachant pas véritablement s'habiller et puis il peut paraître, par moment, délicat, prévenant. C'est là tout le problème et l'ambivalence de cette relation qui n'aurait jamais dû commencer.

On alterne entre deux périodes, celle où Vanessa est une jeune fille de 15 ,16 ans et celle, 17 ans plus tard, où une plainte est déposée et où les journalistes s'emparent de l'histoire.

Avec beaucoup d'habileté, l'auteur montre combien cette relation a détruit Vanessa et continue à agir sur ses comportements et ses relations aux autres.

Bouleversant, troublant, intelligent, voilà ce qu'est ce livres qui montre la complexité de l'être humain et la notion de consentement.
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Ma sombre Vanessa

Tentée par une critique de Brooklyn by the sea (merci !), me voici empruntant ce livre. Si j'ai aimé le commentaire lu, entre temps j'ai tout oublié du livre, la thématique, la raison de l'approbation de Brooklyn, tout en un mot. Je ne lis pas le 4e de couverture (trop eu de déceptions). Donc je me lance sans idée préconçue....

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Quelle claque ! Quel livre dur.... "Glauque" c'est immédiatement l'adjectif qui me vient pour le qualifier, pour qualifier l'histoire, l'ambiance.... C'est le genre de livre qu'il est difficile de dire qu'on a aimé. Je peux en tout cas vous dire que je ne l'ai pas lâché, dévorant page après page....

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Une jeune fille de 15 ans, Vanessa, un peu isolée dans son lycée privé aux Etats-Unis pour lequel elle a eu une bourse. Un prof de littérature américaine (3 fois l'âge de la lycéenne) compatissant, attentionné, intéressé par la demoiselle.... Ne cherchez pas, il lui offre carrément "Lolita"....

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Tout le livre tourne autour de la notion de consentement, de victime. En effet jamais Vanessa ne se ressent comme victime, elle a toujours répondu oui, même quand elle pensait non. En fait le livre dépeint parfaitement la zone grise qui s'articule entre une relation saine et équilibrée et le viol. Là on est dans l'entre deux car Vanessa est flattée d'être ainsi choisie par son prof. Elle ne se rend pas compte qu'il a organisé une magnifique toile d'araignée autour d'elle, faite de manipulation, de chantage, de douceur, de violence psychologique.

Un texte qui décrypte bien une relation particulièrement toxique car en plus elle touche une gamine de 15 ans.

Un texte rude, qui secoue, accroche et finalement interroge...
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Ma sombre Vanessa

"Viens que je t'adore ; viens que je te caresse, ma sombre Vanessa (...)" écrivait Vladimir Nabokov dans "Feu pâle".

Et c'est ainsi que Vanessa, 15 ans, brillante élève promise à un brillant avenir, succombe aux avances de son professeur de lettres, alors âgé de 42 ans, qui lui susurre ces vers. Des années plus tard, il est accusé d'agression sexuelle par d'autres élèves, qui sollicitent Vanessa pour qu'elle les soutienne dans leur démarche, mais elle s'y refuse. A l'ère #MeToo, pourra-t'elle tenir sa position ?

J'ai aimé la façon dont Kate Elizabeth Russell s'est emparé d'un tel sujet dans le contexte actuel, pour en faire une réflexion pertinente et approfondie sur le besoin d'amour, l'illusion du pouvoir, et la notion de consentement chez une adolescente. Sa description fouillée des tourments de Vanessa m'a paru très juste. J'ai également apprécié sa décomposition du processus de manipulation du pédophile, et sa représentation du rôle toxique des réseaux sociaux et des médias dans ce genre d'affaires.

Le roman alterne deux périodes : les années 2000 et 2017, et j'ai été impressionnée par la façon dont l'auteur tord les deux récits en un noeud complexe et très nuancé. Il est aussi énormément question de Nabokov, et notamment de "Lolita" à laquelle Vanessa s'identifie, mais elle est ici la narratrice, et jamais elle ne se considère comme victime. Ce faisant, Russell met intelligemment en exergue toutes les questions qui se posent dans la zone grise du consentement, et c'est assez salutaire.

C'est donc une lecture perturbante, mais enrichissante, et avant tout un beau portrait de battante (même si cette sombre Vanessa n'est pas sympathique) ; une belle réussite pour un premier roman.
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Ma sombre Vanessa

Vanessa est une jeune lycéenne éblouie par son professeur de littérature qui ne manque pas de valoriser son travail et de lui porter de l'intérêt. Stran sait comment choisir sa cible, se rapprocher à petits pas et surtout sait comment user de stratégies pour que sa victime se croit consentante. Car tout est douceur, caresses légères, demandes d'approbation là où une jeune fille de quinze ans ne sait pas à quoi elle dit oui. Nait alors une histoire poisseuse entre un prédateur sexuel et une jeune fille qui la substitue à de l'amour... Car ça ne peut être que ça... Il faut que ça le soit. Sans quoi elle pourrait bien s'écrouler. D'ailleurs quand il pénètre son corps, elle se dédouble, se dissocie d'elle-même, ne retient que des poèmes de feuilles couleur d'érable qui lui font penser à ses cheveux...



Vanessa n'est pas un personnage facile à aimer bien qu'on la voit prisonnière de ce piège qu'est le mensonge qu'elle se raconte à elle-même.

L'histoire est difficile puisqu'il n'est qu'abus déguisé dans les vapeurs du consentement d'une jeune fille qui n'a rien connu d'autre. La relation qu'entretient Vanessa avec son abuseur est faite d'ambivalence alternant attraction et répulsion et on a des difficultés à saisir ce qui la pousse à revenir sans cesse vers lui si ce n'est son emprise si efficace. C'est aussi un livre qui nous décrit toute la complexité qu'il peut y avoir de se reconnaitre en victime. Car si l'on en est une, alors c'est bien que l'on a été abusée. Il est plus facile alors de se dire que ce que l'on a vécu était de l'amour, jusqu'au bout, même quand on ne peut plus y croire.



C'est donc un livre sombre oui... mais un livre dont les pages se tournent toutes seules et qui nous prend avec lui. Comment s'en sortira-t-elle ? Ouvrira-t-elle les yeux ? Et lui, Strane, son impunité demeurera-t-elle ou la vérité éclatera-t-elle enfin ? C'est une histoire qui nous révulse, nous révolte, mais nous fascine pour tenter de comprendre la mécanique à l’œuvre entre un prédateur sexuel et sa victime. Mais si la relation est malsaine, l'auteure se garde d'y rajouter de l'impudeur gratuite. C'est la nature psychologique de ses personnages qu'elle décortique et c'est ce qui rend son propos si intéressant.









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Ma sombre Vanessa

Relation prof-élève.



2000: Vanessa aime Strane. Il est le seul à la comprendre, elle l'adolescente solitaire. Peu importe qu'il soit son enseignant et elle son élève. 2017: Strane est accusé d'avoir agressé plusieurs de ses élèves. Vanessa est contactée par une de ses victimes pour témoigner.



C'est un livre extrêmement dérangeant. Vanessa est tombée sous le charme d'un enseignant charismatique alors qu'elle n'avait que quinze ans. Adolescente solitaire, elle cherche désespérément un modèle, quelqu'un qui l'aimera. Grave erreur, Strane l’entraîne en Enfer. Bien des années plus tard, il exerce toujours son emprise sur elle.



Ce roman est brillant. Il montre l'emprise d'un prédateur sur une jeune fille. Ainsi Vanessa est persuadé d'avoir une relation amoureuse authentique avec Strane. Mais la réalité est moins belle, cette relation est toxique, entachée de nombreux abus. Ceux-ci étant explicitement détaillés. Culpabilisation et manipulation sont monnaie courante. Vanessa reste engluée dans le déni dix-sept ans plus tard.



J'ai aimé ce roman par sa construction. Il fonctionne en tiroirs. Un chapitre dans le présent alterne avec un chapitre dans le passé. Nous comprenons de mieux en mieux Vanessa au fur à mesure du roman. J'ai ressenti une immense empathie pour elle, son attitude faussement détestable montrant une immense souffrance. La fin apporte heureusement une belle note d'espoir.



En bref, un roman brillamment construit sur une thématique très dure.
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Ma sombre Vanessa

Ma sombre Vanessa est le roman le plus percutant et bouleversant qu’il m’a été donné de lire depuis quelques temps.



Vanessa Wye fait sa rentrée en 2000 dans un pensionnat réputé du Maine. Jeune fille solitaire et complexe, renfermée, elle y fait la connaissance de Jacob Strane, son professeur de littérature. En prenant par la flatterie, en faisant se sentir spéciale une jeune fille qui, forcément, à 15 ans, se cherche, comprend mal ses émois, le professeur tisse lentement sa toile autour d’elle afin de la faire consentir, ou en tout cas lui donner l’impression de le faire, à une relation qui va beaucoup trop loin, trop vite.



Parallèlement, l’intrigue se déploie 17 ans plus tard, quand Strane est accusé d’abus sexuel par une ancienne élève. Vanesse est à son corps défendant obsédée par le post et le profil de l’accusatrice, notamment parce que ce scandale vient remuer la boue des souvenirs de son histoire d’amour, dont elle vient lentement, à regret, remettre en cause la nature véritable.



« J’ai juste vraiment besoin que ce soit une histoire d’amour. […] J’ai vraiment, vraiment besoin que ce soit cela. […] Parce que si ce n’est pas une histoire d’amour, qu’est-ce que c’est ? ».



La navigation entre ces deux versions de la narratrice, la Vanessa adolescente et celle adulte, permet de transcrire ainsi adroitement les rouages de la prédation et la persistance de l’emprise psychologique dont Vanessa va souffrir pendant tant d’années, lui gâchant largement la vie. En pensant avoir provoqué Strane, en se sentant responsable (Strane la persuadant que c’est elle qui est systématiquement venue le chercher, qui l’a attiré sans qu’il puisse y résister, par la « noirceur » qu’il a perçue en elle et qui faisait écho à la sienne) de la dépravation de cet homme à qui elle n’a jamais su (ou pu) refuser quoi que ce soit (au prix de scènes de viol éprouvantes à lire), Vanessa refuse de se sentir victime (« Le trope de la différence d’âge n’a plus aucun secret pour moi, et je consomme des livres, des films, et tout ce qui met en scène une histoire d’amour entre un adulte et une mineure. Je me cherche tout le temps dans ces œuvres, mais je ne trouve jamais rien de vraiment juste. Les filles dans ces histoires sont toujours des victimes, et moi je n’en suis pas une – et cela n’a rien à voir avec ce que Strane m’a fait ou pas quand j’étais plus jeune. Je ne suis pas une victime parce que je n’en ai jamais voulu être une, et si je ne veux pas en être une, alors je n’en suis pas une. Voilà comment ça marche. La différence entre le viol et le sexe est un état d’esprit. On ne peut pas violer une personne consentante, n’est-ce pas ? […] On ne peut pas violer une personne consentante. La blague est terrible, certes, mais elle est censée »), allant de ce fait se sacrifier pour son bourreau, lui chercher perpétuellement des excuses. L’auteur retranscrit ainsi finement la psychologie de la victime d’un pédophile, du déni qui la pousse à penser qu’elle apprécie les traitements de son amant, qu’elle l’aime alors que clairement, la sidération et la dissociation cognitive sont des mécanismes qu’elle a mis en place dès le début pour se protéger.



Un des grands points positifs du roman est d’éviter l’écueil du pathos grâce à la personnalité froide de Vanessa (causée par le stress traumatique) et la carapace qu’elle s’est construite pour survivre. Clairement, ce n’est pas un personnage aimable (pourrait-on l’être avec une vie telle que la sienne ?) sur qui on s’apitoie (paradoxalement). Ce qui est bien joué de la part de l’autrice car elle pousse en cela le lecteur à réfléchir par lui-même à la notion de consentement, à ses conditions d’altération, à ce qui peut en constituer la zone grise. Elle interroge aussi finement la notion de victime : à partir de quel moment en est-on une ? Quand on se sent traumatisé ? L’est-on quand on ne ressent rien ?

On ne s’attache d’ailleurs pas plus aux autres personnages, puisqu’ils sont vus à travers les yeux de Vanessa, qui met tout le monde et sa vie à distance de cette souffrance qu’elle se refuse à éprouver. C’est peut-être de ne pouvoir m’accrocher à un élément positif (même une personnalité comme celle de Henry Plough qui pourrait être sympathique, est rendue de manière distordue par la vision de Vanessa, ce qui nous fait douter de ses intentions) qui a rendu pour moi la lecture de ce roman si difficile.



Le fait que Vanessa soit privée de toute capacité d’action, assister à l’anéantissement d’un esprit aussi brillant par les manipulations de Strane m’ont été très désagréables à lire par le sentiment de gâchis que j’ai ressenti, d’impuissance.



Ma sombre Vanessa est un livre coup de poing, clivant, et malheureusement terriblement actuel. Mais sa force est aussi d’instruire sur ces mécanismes de manipulation psychologique, afin de changer de regard sur leurs victimes et leurs réactions, en les comprenant mieux.

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Ma sombre Vanessa

Vanessa a 15 ans quand elle rencontre pour la première fois Jacob Strane, son professeur de littérature dans l'école privée où elle est interne. Vanessa a 32 ans quand nous faisons sa connaissance au début du roman, le professeur Strane est accusé d'attouchements par une autre élève et la vie de Vanessa vacille : ce qu'elle pensait être une incroyable histoire d'amour vécue à 15 ans avec son professeur de 42 ans cachait-il une autre réalité plus sombre ?



Sombre, glauque, dur, dérangeant, noir... à l'image de sa magnifique et troublante couverture et de son non moins magnifique titre, ce roman est une claque. Une descente en enfer dans laquelle on plonge en apnée et dont on ne ressort que 500 pages plus loin, horrifié, en ayant envie de hurler, de secouer les adultes qui entouraient Vanessa et qui n'ont pas su voir, comprendre, aider la jeune fille. Et en même temps, ce roman est beaucoup plus subtil qu'une simple dénonciation car il pose tout au long de son intrigue la complexe question du consentement : à quel moment une différence d'âge est-elle rédhibitoire ? comment décrire le phénomène d'emprise ? comment peut-on dire oui et penser non ?



L'auteur alterne entre le récit de la vie de Vanessa à 32 ans, une jeune fille cabossée, n'ayant jamais mené au bout les études dont elle rêvait, vivotant de petits boulots et de relations sans lendemain, et celui de Vanessa à 15 ans, élève modèle, pensionnaire du très chic lycée privé de Browick qu'elle a réussi à intégrer alors qu'elle venait d'une famille modeste. La Vanessa de 15 ans a comme seul malheur le fait d'avoir croisé le chemin de Jacob Strane, son professeur de lettres, qui va petit à petit la convaincre qu'ils sont destinés l'un à l'autre et qui à coup de livres, de cours privés, de petits gestes et de belles paroles la mettra totalement à son merci pour mieux abuser d'elle. A partir du moment où commence cette mécanique d'emprise, car c'est bien d'une véritable manipulation et lavage de cerveau qu'il s'agit, l'auteur nous embarque totalement dans son récit : j'ai assisté impuissante à toutes les manœuvres de Strane pour faire douter Vanessa, la manipuler, j'ai eu envie de la secouer, de lui crier de s'enfuir. Pire que tout, l'auteur nous décrit l'hypocrisie des adultes, l'équipe éducative du lycée, les parents de Vanessa, qui tous savaient ou auraient pu savoir mais dont aucun n'est venu à son aide. J'ai trouvé ce roman particulièrement subtil : alors que cette histoire aurait pu se prêter à une vision très manichéenne des choses, l'auteur nous fait constamment douter, reprend à son compte les arguments de Vanessa, nous fait toucher du doigt la facilité avec laquelle une relation comme celle-ci peut basculer dans le normal ou l'acceptable et en même temps à quel point elle ne l'est pas.



Je ne me suis pas ennuyée une seconde dans cette lecture, au contraire j'ai tourné les pages en voulant savoir la suite, faire le lien entre ce qu'est devenu Vanessa et ce qui lui est arrivé, comprendre. Ce roman est aussi un très bel hommage à la littérature, dans ses aspects positifs comme négatifs d'ailleurs : Vanessa est passionnée par les livres, écrit des poèmes et Strane utilisera cette passion et son aura de professeur de lettres pour la manipuler. A une époque où la parole se libère et où la question du consentement est débattue, déchainant les passions et donnant lieu aux arguments les plus extrêmes, j'ai trouvé ce roman particulièrement essentiel : rien n'est tout blanc ni tout noir, l'auteur explore toutes les nuances entre les deux, avec une grande subtilité et en même temps en appuyant suffisamment là où ça fait mal pour que le lecteur soit frappé par sa lecture. Un livre essentiel, de plus est réellement passionnant et facile à lire, un roman à ne pas rater. Chapeau à l'auteur dont c'est le premier roman et dont je vais guetter la prochaine parution !
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Ma sombre Vanessa

Je me souviens qu'au sujet du récit de Vanessa Springora, Le Consentement, on a entendu qu'il s'agissait de circonstances particulières, d'un milieu particulier et puis aussi d'une époque. Bref, malgré les faits racontés sans se cacher derrière une fiction, certains avaient du mal à percevoir la réalité d'une telle relation et surtout le fait qu'elle pouvait être subie et non consentie malgré les apparences. Ma sombre Vanessa est un roman (la coïncidence du prénom ne doit être prise que pour ce qu'elle est : une coïncidence) et l'auteure prend bien soin de le réaffirmer dans un préambule. Pourtant, les deux livres se répondent, comme en miroir, dans des pays différents, des circonstances différentes, des époques différentes. Mais un point commun : ce processus d'emprise exercé par un homme d'autorité censé être un adulte responsable sur une jeune fille à peine pubère dont la construction mentale et sexuelle est encore vierge et surtout empreinte de fantasmes jamais confrontés à la réalité. Le roman de Kate Elizabeth Russell pourrait presque permettre de mieux appréhender le récit de Vanessa Springora, parce que le pouvoir de la fiction est justement d'offrir au lecteur une capacité de projection tandis que le récit cantonne la vie qui y est racontée à une singularité affichée. C'est extrêmement troublant.



Vanessa Wye a 32 ans et travaille en tant que concierge dans un hôtel de Nouvelle-Angleterre lorsqu'elle est contactée par une jeune femme qui a fréquenté le même lycée qu'elle, accuse l'un de ses professeurs d'abus sexuels et demande à Vanessa d'apporter son propre témoignage. En 2000, Vanessa a effectivement vécu une "histoire" avec Jacob Strane, son professeur de littérature. Elle avait 15 ans et lui 42. Mais le regard que Vanessa porte sur cette relation n'a rien de celui d'une victime. Forcée de se replonger dans la réalité de ces années, la jeune femme revisite les quelques mois de cette liaison, les conséquences sur la suite de sa scolarité et même sur sa vie de femme, les liens qu'elle a gardés avec lui. Le lecteur évolue à son rythme, d'une période à l'autre, dénouant peu à peu les fils d'un fantasme construit pour mieux cacher les détails d'une réalité sordide. Découvrant la vérité derrière le déni. Happé, scotché par cet engrenage construit autour d'un mécanisme d'emprise psychologique savamment rôdé. Et parfois révolté par certaines scènes difficiles à concevoir et pourtant nécessaires.



Car rien de plus commun que le fantasme universel d'une élève pour son professeur. Cas d'école pourrait-on dire. Admiration, émoi adolescent, envie d'être remarquée, manque d'assurance... la proie est facile. Et ce que met parfaitement en scène l'auteure c'est le déploiement de la mécanique du prédateur, l'exploitation des failles psychologiques de l'adolescence qui peuvent rendre certaines cibles plus vulnérables. Et les dégâts causés, irrémédiablement. La narration est parfaitement menée, ce qui se passe en 2017 est tout aussi intéressant que le récit des années de lycée, la double progression tient le lecteur en haleine parce que dans l'esprit de Vanessa, rien n'est évident. Si je fais le parallèle avec Le Consentement, ce n'est pas simplement à cause du prénom de l'héroïne. Il se trouve que l'intrigue est construite autour de Lolita et des écrits de Nabokov (d'où est tiré le titre du livre), que l'influence est celle d'un professeur de littérature qui se sert des textes pour exercer son emprise, à l'exact opposé de son rôle. Il se trouve enfin que la notion de consentement est au centre de ce roman qui se lit comme un thriller grâce à une tension dramatique maintenue jusqu'à la fin. Une réussite.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Ma sombre Vanessa

"Je ne peux pas perdre ce à quoi je me suis accrochée pendant si longtemps. Vous voyez ?  (…) J'ai juste vraiment besoin que ce soit une histoire d'amour. Vous comprenez ? J'ai vraiment, vraiment besoin que ce soit cela. (…) Parce que si ce n'est pas une histoire d'amour, qu'est-ce que c'est ?"

Ces quelques phrases donnent à elles-seules la tonalité du roman.



Il est difficile de ne pas penser au livre le consentement même si je ne l'ai pas encore lu. L'un est un témoignage tandis que l'autre est un roman. Un roman, vraiment? L'autrice l'affirme pourtant.



Vanessa Rye est une jeune fille de 15 ans qui entretiendra une relation "amoureuse" avec son professeur de littérature, âgé quant à lui de 42 ans. Elle a 32 ans quand une onde de choc la percute de plein fouet, quand une autre jeune femme porte plainte contre ledit professeur pour abus sexuel. Vanessa n'y croit pas, ne veut pas y croire, ne peut pas y croire. Car si elle y croit, elle sera alors obligée de regarder la vérité toute nue et de remettre en question "sa" première histoire d'amour, tellement importante, car fondatrice, dans la vie de tout un chacun.



Glauque, cru, curieux, malaisant, malsain, tous ces qualificatifs peuvent convenir à ce roman. Et pourtant j'ai lu attentivement chacun de ses mots, relisant même certains passages plusieurs fois. Par goût de ce qui est sale, de ce qui est transgressif ? Pas du tout, simplement pour être sûre de ne rien oublier, que personne ne puisse dire qu'elle l'avait bien cherché, après tout. A ce sujet, et bien avant de lire ce roman, mon opinion est faite, je peux même dire qu'elle est ferme et définitive. Il n'y a pas de consentement éclairé chez le mineur, même quand celui-ci a quinze ans et est en capacité de réfléchir. Surtout quand l'adulte est une personne ayant un ascendant sur le ou la mineur/e en question, là il a un boulevard pour la/le manipuler. Car qui ne s'est jamais amouraché d'un de ses professeurs ? Ou sans parler de tomber amoureux, d'au moins chercher à lui plaire ? Je me rappelle mon professeur de français remplaçant de troisième. du haut de mes quinze ans, je le trouvais beau comme un dieu, et fabuleux. Nous étions plusieurs à minauder, sans qu'il ne se passe quoi que ce soit. Car il savait se tenir à sa place.



La grande force de ce roman, qui est aussi sa plus grande finesse, est qu'à aucun moment l'autrice ne laisse planer le doute sur ce qu'elle pense. Contrairement à sa narratrice, la sombre Vanessa, qui est elle toute en ambiguïté. Et c'est ce qui rend justement la narration de ce roman très puissante, ce qui fait qu'on tourne les pages pour continuer à tenter de comprendre le cheminement de cette toute jeune fille devenue une jeune femme fracassée, quoi qu'on en dise, quoi qu'on en pense, qu'elle-même le veuille ou pas. Car l'adolescente blessée, humiliée, à laquelle un adulte a menti pour mieux faire d'elle sa chose, ne pourra pas pousser, grandir, s'épanouir comme s'il ne lui était rien arrivé. Elle ne se reconnaît pas victime? Elle l'est pourtant. A rebours



Je salue particulièrement la plume de Kate Elizabeth Russell, très réaliste, qui donne beaucoup de souffle à son histoire, qui peut se montrer très crue, mettre mal à l'aise son lecteur en le plaçant en voyeur, mais sans jamais être putassière. Un grand bravo aussi à la traductrice, Caroline Bouet, qui a très bien su retransmettre l'ambiance de ce roman.



Enfin, je tenais à remercier bidule62 car c'est grâce à son billet que j'ai eu très envie de commencer ce roman qui dormait bien au chaud dans ma PAL.



En résumé, un livre dur et d'actualité, servi par une plume de talent. Un livre qui m'a mise en colère. Un livre, croyez-moi, que je ne suis pas prêt d'oublier de sitôt. Continuons à protéger nos enfants et adolescents.





Lu en février 2022









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Ma sombre Vanessa

Vanessa Wye, trentenaire à la vie chaotique, découvre sur les réseaux sociaux qu’une ancienne élève de son lycée privé, situé dans le Maine, accuse leur professeur de lettres, Jacob Strane, d’abus sexuel. Elle va suivre de manière obsessionnelle l’affaire, étant elle-même directement concernée par ces accusations, puisqu’ayant eu une relation au long cours avec cet homme, relation qui a débuté alors qu’elle était mineure, et encore son élève. Cet aveu, de la part de sa camarade, va faire sombrer Vanessa dans la tourmente de ses souvenirs, qui vont, du fait de son âge et de ce qu’elle découvre au fur et à mesure de l’affaire, prendre une toute autre saveur, bien plus amère pour la jeune femme.



Sans être d’une remarquable qualité littéraire – stylistiquement, je n’ai en effet rien perçu qui aurait pu m’interpeller, dans le bon comme dans le mauvais sens, et ici le fait de lire une traduction ne change, je pense, rien à la chose -, Ma sombre Vanessa est au contraire un roman remarquable dans sa capacité à nous faire entrer au plus profond de l’esprit de Vanessa, à nous faire toucher du doigt, avec beaucoup de réalisme et de force, le phénomène d’emprise dont elle a été victime de la part de son ancien professeur, qui a profité de sa détresse psychologique – rupture amicale violente en fin d’année précédente, vie en internat, difficulté à nouer contact avec les autres… -, et de son goût pour la littérature, pour en faire, de manière « consentie », son objet, notamment sexuel.



Et c’est toute la complexité et la sournoiserie de la chose, que cette notion de consentement, puisque Vanessa n’a jamais, ouvertement, rien refusé à Jacob, du moindre premier petit frôlement de genou jusqu’au premier rapport sexuel, même si cette relation la met, ce dont elle se rend de plus en plus compte au fil de ses réminiscences, profondément mal à l’aise, et même si cette relation aura une incidence, ce dont elle se rend compte aussi au fur et à mesure, sur le reste de ses relations futures, plus encore sur le reste de sa vie, en ce qu’elle est une traumatisée, ayant vécu des abus dont elle n’a que bien peu conscience, défendant toujours corps et âme, dans l’adversité, celui qu’elle a aimé, ou pense avoir aimé, pendant de nombreuses années.



Que dire, enfin, des nombreuses références faites au Lolita de Nabokov – n’ayant pas encore lu ce roman, je n’ai, par contre, pas apprécié en découvrir des éléments d’intrigue sans que l’on m’ait prévenue en amont -, donné par Jacob à Vanessa, qui deviendra son livre de chevet et qui enfoncera encore le clou de cette description, malsaine mais tellement juste, de cette emprise, sentimentale, davantage que sexuelle, dont sont capables les pédophiles.



Une lecture éprouvante, nécessaire, que j’ai trouvé intéressante, bien qu’elle ne m’ait pas marquée littérairement parlant.
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Ma sombre Vanessa

La couverture est banale, mais le bandeau accrocheur, « un roman qu’on ne lâche pas. De la dynamite« , selon Stephen King, roi incontesté du thriller. Une simple phrase qui m’a poussé à découvrir ce roman… et quel roman !



Vanessa, 15 ans, quitte le domicile familial pour effectuer une année scolaire au lycée de Browick. Comme un avant-goût de liberté, elle découvre ce que peut lui réserver la vie universitaire. Au cours de cette année, elle suivra assidûment le cours de littérature proposé par le professeur Strane, un enseignement grisonnant, pas franchement joli, mais passionné par les mots qu’il enseigne. Il dégage une certaine aura qui va captiver Vanessa. Usant et abusant de sa culture, de son statut social, de sa prestance, il va tout doucement se rapprocher de la jeune fille, lui proférant à tour de bras des compliments désuets, lui prêtant des bouquins à découvrir, la faisant paraître comme une élève spéciale à ses yeux, différente des autres, plus intelligente. La jeune fille se laisser amadouer et l’interdit est franchi : malgré près de 30 années d’écart, Vanessa et Strane débutent une relation clandestine, interdite, qui pourrait mener à leur perte à tous les deux.



L’histoire est présentée à travers deux temporalités disjointes : en 2000, alors que Vanessa n’est encore qu’une enfant, puis en 2017, à un âge mûr. Une double progression intéressante à suivre, qui nous en apprend plus sur la psychologie de la jeune femme lors des événements et après. Car, bien des années plus tard, l’histoire qu’elle a vécue avec Strane continue à la poursuivre. Elle est contactée par Taylor Birch, une jeune femme qui a fréquenté le même lycée qu’elle, qui a subi des violences sexuelles de la part d’un de ses professeurs et qui cherche à tout prix à recueillir le témoignage de Vanessa, afin qu’elle appuie les peines qui surplombent Strane. Mais ce que Taylor Birch n’avait pas compris, c’est que Vanessa est très loin de se considérer comme une victime.



Vanessa est un personnage à la personnalité complexe, rendu encore plus difficile à cerner après les expériences qu’elle a vécues. En 2017, près de vingt ans après les faits, la jeune femme se sent toujours sous l’emprise de cette histoire qui la hante, la ronge, l’anéantie progressivement, sorte de poison d’amour qui envahie son âme sans s’évaporer. Strane aussi a son penchant de complexité : je l’ai trouvé bien lâche face à cette situation, grand manipulateur, être froid et clinique, très égoïste, qui ne m’a inspiré qu’aversion et dégoût. Leur duo, très improbable, dérange, questionne, affole les esprits, assaillis de questions sur leurs véritables intentions à tous les deux.



L’intrigue est construite autour de Lolita, ce récit de Vladimir Nabokov mondialement connu, qui met en scène Humbert Humbert, un professeur de littérature qui s’éprend d’une nymphette de 12 ans prénommée Dolorès, jeune fille insouciante, remplie d’innocence. Elle se fait abuser par cet homme, avant de finalement abuser de lui à son tour. Un schéma qui correspond parfaitement au duo formé par Vanessa et Strane dans ce récit de Kate Elizabeth Russell, deux êtres sombres, qui se détruisent mutuellement.



Dans Lolita comme dans Ma sombre Vanessa, il est question d’amour torturé, obsessionnel, de sentiments confus, mais intenses et purs. Alors que Taylor Birch assure haut et fort dans les médias avoir été abusée par Strane, Vanessa reste silencieuse, fidèle à la promesse qu’elle a faite à Strane des années plus tôt, de ne jamais dévoiler leur liaison. Mais derrière ce silence pesant, se cache en fait des sentiments bien plus complexes, que nous, pauvres lecteurs, sommes bien en peine de comprendre. Amour, aversion, attachement, colère, déception… tout se mélange pour former un amas psychologique complexe, qu’on peine à délier. L’auteure décortique avec précision les rouages de cette relation improbable, nous permettant de pénétrer dans le débat intérieur qui se joue en Vanessa.



C’est un récit qui dérange. On balance constamment entre la consternation face à cette situation inhabituelle et scandaleuse, face à certaines scènes difficiles à concevoir et pourtant bien réelles ; puis, à la consternation succède l’assentiment devant les preuves d’attachement évidentes qui existent entre Vanessa et son bourreau. Vanessa ne se sent pas victime de Strane ; on ne peut donc pas parler de pédophilie pure, puisque la jeune fille était consentante lors de leurs ébats. Là réside tout l’intérêt de ce récit, qui met en exerce la frontière très mince qui existe entre le consentement et l’abus, sexuel et psychologique. Une histoire brillamment écrite, éblouissante de réalisme mais perturbante au possible.



Un récit psychologique complexe sur le viol, le consentement, qui dérange et fascine tout à la fois. Construit en partie sur les fondements du Lolita de Nabokov, ce premier roman de Kate Elizabeth Russell est une franche réussite !
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Ma sombre Vanessa

Vanessa, en 2017, est rattrapée par son passé via la déferlante MeeToo. Contactée par une journaliste et par une élève abusée par le professeur Strane, la jeune femme refuse pourtant de se considérer comme victime d'un prédateur qui aurait abusé de son autorité sur l'adolescente qu'elle était dix-sept ans plus tôt.

Non, elle considère la relation qui a commencé quand elle avait quinze ans comme une exceptionnelle histoire d'amour entre deux être très sombres et au mieux, reconnait-elle que Strane est éphébophile, mais en aucun cas pédophile.

Elle n'a pas perdu le lien avec cet homme qui l'a valorisée, qui a su amadouer  cette étudiante douée à coups de lectures orientées ( Nabokov, bien évidemment), mais qui s'est aussi montré lâche et manipulateur.

Alternant les époques, Kate Elizabeth Russell fouille avec une précision chirurgicale les rouages faussés de cette relation et nous donne à voir le déni dans lequel se débat Vanessa , dont la vie ne correspond en rien à ce qu'elle aurait pu en attendre.

Les rebondissements se succèdent , sans jamais rien d'artificiel, les multiples facettes, souvent contradictoires de l'héroïne se donnent à voir et l'on est fasciné par une telle maitrise dans l'écriture et la construction de ce premier roman.  à lire absolument.
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Ma sombre Vanessa

Voici une des lectures qui ma mise le plus mal à l'aise en cette année 2021, il y est question de pédophilie et la narratrice alterne entre passé et présent pour nous raconter son histoire avec son professeur de l'époque.



Nous la suivons donc adolescente à cette période et aujourd'hui à la trentaine ou son ancien professeur est accusé d'avoir entretenu d'autre relations avec d'anciennes élèves.



Aujourd'hui avec les réseaux sociaux cette affaire va avoir un retentissement médiatique, les personnages de Vanessa et du professeur Strane sont vraiment très bien travaillés psychologiquement et on ressent bien le phénomène d'emprise que la jeune adolescente subit même si elle ne semble pas le percevoir à l'époque de son adolescence.



Un récit fort et poignant avec vraiment une ambiance constamment oppressante, je dois cependant avouer que le mois de Décembre juste avant les fêtes n'était peut être pas le moment adéquat pour cette lecture et j'ai eu du mal a y retourner du fait des sujets évoqués.
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Ma sombre Vanessa

Jacob Strane, le professeur de lettres de cet excellent premier roman, n'a rien a envié à Gabriel Matzneff, triste sire mis à jour dans Le consentement.
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Ma sombre Vanessa

Le débat sur le consentement a eu lieu récemment en France autour du livre de Vanessa Springora. Il s'agit ici d'une autre Vanessa qui est confrontée au même débat, alors même qu'elle revient sur sa liaison avec son professeur de lettres de 30 ans plus âgé.

Quelle est en effet la valeur du consentement, lorsque l'on est une adolescente de 15 ans, peu sociable, mal dans sa peau et rêvant de poésie ? Que vaut-il quand on est à l'âge des premières pulsions sexuelles, de la confusion des sentiments, du désir de plaire ?

Lorsqu'un professeur, auréolé de son prestige et de ses connaissances, en vient à complimenter son élève sur l'incroyable qualité littéraire de ses poèmes, lorsqu'il flatte son ego en lui disant qu'elle est une personnalité hors-normes, lorsqu'il lui donne à lire Lolita de Nabokov pour qu'elle s'identifie ?

Alors Vanessa tombe amoureuse, même si parfois il lui fait mal, même si parfois son corps vieillissant l'ecoeure, même lorsqu'elle a envie de rentrer chez elle.

Sans les nommer, l'auteure met en scène les mécanismes de l'emprise : la valorisation dans les débuts de la relation, le sentiment d'être unique, la culpabilité, la nécessité de protéger le bourreau puis la déprise avec le manque et l'autodépréciation.

Tout au long de son parcours, jusqu'à 17 ans après les faits, Vanessa ne parvient pas à se libérer de cette emprise, de la conviction d'avoir vécu un véritable amour. Et lorsque l'on lui demande de temoigner contre son prédateur, malgré les preuves reunies contre lui, elle ne peut se résoudre à balayer cette liaison de peur de devenir ce qu'elle ne peut admettre : son statut de victime.

Il faudra attendre la mort du prédateur pour que "pour la première fois, j'arrive à imaginer comment ce serait de ne plus être à lui, de ne plus être lui".



Kate Élisabeth Russell n'est jamais dans la démonstration, ni dans l'accusation. C'est dans la finesse de la psychologie qu'elle décrit cette relation de domination et c'est dans l'intelligence de ses lecteurs qu'elle compte pour condamner Jacob Strane.
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Ma sombre Vanessa

Ma Sombre Vanessa est un roman d’une noirceur absolue à laquelle on ne s’attend pas. L’auteure nous prend doucement par la main en commençant son roman par une histoire banale. Vanessa, 15 ans quitte le foyer familial pour effectuer son année scolaire dans le prestigieux lycée de Browick, un avant-goût de la vie à l’université. Là-bas, Vanessa suit le cours de littérature du professeur Jacob Strane. Il n’est ni jeune ni attirant mais il captive Vanessa. L’interdit est bientôt franchi lorsque Strane et Vanessa entame une liaison clandestine et condamnée.



Plus tard, en 2017, Vanessa a la trentaine. Elle est concierge dans un hôtel. Sa vie tient en quelques mots: alcool, drogue, sexe avec des inconnus. Vanessa n’arrive pas à vivre pour elle. Quand Taylor Birch la contacte, tout le passé de Vanessa remonte à la surface. En effet, Taylor affirme avoir été abusée par Strane…



L’auteure commence son roman de manière assez innocente en nous montrant comment, doucement, Vanessa va tomber amoureuse de son professeur. Les cent premières pages pourraient correspondre aux affres amoureuses d’une midinette. Et puis, lentement, le récit bascule dans le glauque et la noirceur totale. De manière insidieuse, à l’image de Strane qui séduit Vanessa, le lecteur voit se dérouler devant ses yeux la liaison interdite entre un professeur et son élève. Strane s’immisce dans la vie de Vanessa comme un serpent. Ce sont d’abord des paroles, des compliments puis une main sur le genou, un livre, Lolita de Nabokov offert, et enfin l’engrenage fatal: le sexe, le viol, la violence et la pression psychologique.



Ce qui est impressionnant dans ce livre c’est que le lecteur est un peu comme Vanessa, il ne voit presque rien venir parce que Strane s’assure que son élève est toujours « consentante ». Mais est-on consentante à 15 ans lorsqu’on a face à soi un homme de presque quarante ans? Sait-on ce que l’on fait, dans quoi on s’engage? Kate Elizabeth Russell pose des questions importantes et complexes. Son histoire ne présente pas de morale. Vanessa est un personnage extrêmement complexe qui vingt ans après les faits est persuadée d’avoir aimé et d’avoir été aimée.



Il y a certaines pages qui m’ont laissée groggy parce que moi, je le sais qu’on ne fait pas l’amour a une enfant de quinze ans quand on en a quarante mais qu’on la viole. Tout ça vient d’un seul coup, un peu comme un coup de poing en pleine tête. Strane est tellement pervers, tordu, manipulateur que s’en est douloureux, écœurant. Il domine Vanessa de sa taille, de son intellect, de son ascendant. L’auteure nous donne aussi à lire la face B de l’histoire d’amour de Vanessa. On retrouve une adulte complètement détruite, anéantie, persuadée d’avoir vécu « sa plus belle histoire d’amour » mais qui pendant son temps libre boit pour oublier. Mais oublier quoi? Car personne ne le lui a jamais dit clairement à Vanessa que son histoire n’était pas normale.



Avec ce roman, Kate Elizabeth Russell frappe fort et laisse son lecteur pantois, abasourdi. Son histoire complexe parle de viol, de consentement et de conscience de soi. Un roman à lire nécessairement.
Lien : https://carolivre.wordpress...
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Ma sombre Vanessa

Vanessa a quinze ans, elle est un peu banale, un peu solitaire. Jacob Strane, quarante-deux ans, prof de littérature dans son école, trouve les mots qui font mouche, ceux par lesquels on peut se sentir spéciale, différente … Il hameçonne sa proie et la fait basculer du côté interdit.

Naïve, Vanessa croit en cet amour unique, passionné et clandestin. Avec Strane, elle découvre les mots, le sexe, la littérature, le mensonge et l’obsession. Elle lit Lolita de Nabokov en boucle. Explore le côté sombre et complexe de son esprit.



Dix-sept ans plus tard, leur relation n’a pas vraiment tenu … Vanessa essaie de se construire une vie. Elle est seule. Entre son boulot et sa psy, elle se tape des coups d’un soir, des relations tordues qui la questionnent toujours sur son côté dark. A-t-elle jamais échappé à l’emprise de son prof ? Elle découvre que Strane a vécu d’autres histoires similaires avec des étudiantes de son lycée, notamment Taylor, qui la contacte et lui raconte les abus qu’elle a subi. Le fieffé menteur ! Elle qui ne se considérait pas comme victime d’un professeur manipulateur commence à réfléchir à son passé. Etait-il un prédateur sexuel ? Un éphébophile manipulateur et calculateur ? Mais que devient-elle alors dans ce cas ? Sa vision de sa jeunesse et de leur relation « amoureuse » bascule.



Ma sombre Vanessa, c’est Lolita au temps de #metoo, c’est la délicate observation du fil ténu qui sépare le consentement d’une mineure et le viol d’une jeune fille abusée.

L’attachement mêlé d’aversion que Vanessa ressent pour son professeur/amant est complexe. Jusqu’au bout elle ne voudra pas l’accuser, le dénoncer, participer à cette campagne qui ruinera sa carrière. Elle ne veut témoigner de rien, de quoi ? Qui sont-ils pour dire qu’elle est une victime alors qu’elle-même ne se ressent pas comme telle ? Ou bien si ? Le mal était tapi si profondément dans les ombres de son esprit. Elle se sent coupable. Était-elle victime ou non ? Le chemin de Vanessa est encore long, mais plein d’espoir.



Stephen King a encensé ce roman et c’est ce qui m’a intriguée. C’est en effet un regard sibyllin, une plongée dans la psychologie d’une jeune fille vulnérable, en construction et toute en questionnement. Un roman fouillé, terriblement bien écrit, qui nous laisse pénétrer au plus profond de l’esprit tourmenté, désabusé de cette Sombre Vanessa et qui pose question sur le débat de l’âge de la majorité sexuelle.
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Ma sombre Vanessa

J'ai beaucoup aimé ce roman qui m'a aussi pas mal retourné l'estomac. Un livre qui relève la complexité de la victime, de son ressenti, de la manière dont elle se construit une histoire, une interprétation de celle-ci pour arriver à continuer à vivre, à s'accepter.

Je pense que ce roman va clôturer mes lectures sur ce type de sujet, pour rester sur cette lecture forte et intense mais aussi nauséeuse.
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Ma sombre Vanessa

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Autopsie d’une relation *****



«I just really need it to be a love story. You know ? I really, really need it to be that. Because if it isn’t a love story, then what is it?”



Vanessa Wye n’a que quinze ans lorsqu’elle entame une relation sexuelle avec l’un de ses professeurs, Jacob Strane, alors âgé de quarante-deux ans. La narration se compose d’une alternance entre le passé –le développement de cette relation terriblement glauque– et le présent, dix-sept ans plus tard, alors que Vanessa est contactée par une autre jeune femme qui prétend avoir vécu une histoire similaire.



«My Dark Vanessa» est un livre impressionnant, d’autant plus étonnant qu’il s’agit d’un premier roman et qu’il est captivant alors que les faits narrés sont relativement banals. Ses qualités premières sont à mon sens d’une part la finesse de l’analyse psychologique des personnages et d’autre part le grand réalisme que l’auteure a réussi à leur insuffler. L’on en ressort avec l’impression que Vanessa est l’archétype de toutes ces très jeunes filles qui découvrent soudain le pouvoir de leur corps sur les hommes et qui, sans réelle conscience de leur grande vulnérabilité, échouent dans les filets de manipulateurs en se convainquant qu’il s’agit d’une histoire d’amour.



Le lecteur ne manquera pas d’éprouver un sentiment de malaise à plusieurs moments, doté d’une lucidité qui échappe à la narratrice, Vanessa, prisonnière de son fantasme et de sa perception faussée des choses. Le roman comporte de multiples références littéraires, notamment à «Lolita» de Nabokov, et j’y ai également trouvé des similitudes avec l’histoire d’une autre Vanessa, celle contée dans «Le consentement» par Vanessa Springora : quel peut être le degré de consentement d’une adolescente aussi jeune face aux fantasmes d’un homme plus âgé qui en fait un objet sexuel sous couvert d’une histoire passionnelle et quel sera l’impact sur l’adulte qu’elle deviendra ?



Un roman très bien écrit, aussi sombre que son titre le laisse présager, et qui propose une analyse très fine d’une relation toxique et de ce qu’elle laisse dans son sillage des années durant. Une lecture à la fois glauque et addictive qui donne à réfléchir et que je vous recommande.
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