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Citation de Tristhenya


« En ce temps-là, papa me faisait penser à un lamantin : énorme, la peau douce, aussi propre que s'il venait de passer au lavage automatique. Son ventre tendu et rebondi laissait apparaître une peau blanche et blafarde comme la glaise. Il n'entendait rien, ne voyait rien, ne pensait rien. Seuls des éclats de rire sporadiques manifestaient sa présence dans l'obscurité du salon.
Un jour, vers l'âge de sept ans, j'étais sur le point de m'endormir quand j'entendis papa hurler : «Douillette ! Douillette !» Je me levai d'un bond en pensant qu'il y avait le feu et dévalai le couloir, manquant glisser à chaque pas à cause de mon pyjama fermé au niveau des pieds.
- Tu veux bien me préparer un toast ? demanda-t-il sans même me regarder.
Les doigts tranquillement croisés sur la poitrine, ses lourds mollets appuyés sur les charnières à tête de tortue du repose-pied de son fauteuil inclinable, papa ne quittait jamais l'écran de la télé des yeux.
Hormis les sorties chez le docteur, nous restions la plupart du temps à la maison. En fait, notre vraie vie - là-bas, dans l'impasse au bout du chemin de terre - n'avait rien à voir avec l'image que nous donnions à l'extérieur. Je possède une photo de nous tous, à l'époque où j'avais à peu près onze ans et Danny à peine quatre, près des Chutes du Nia¬gara. On nous voit tous les quatre, debout dans un faux tonneau sur le point de chavirer dans les eaux des Chutes, arborant des sourires aussi faux que les remous qui nous entourent. Mes cheveux sont teints en blond et je suis vêtue à la dernière mode. Visiblement, je respire le bonheur. »
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