Jean Yves Leloup présente son livre «
Dictionnaire amoureux de Jérusalem » à la librairie La Procure à Paris.
Retrouvez le livre : https://www.laprocure.com/dictionnaire-amoureux-jerusalem-jean-yves-leloup/9782259206631.html
[Émission tournée le 27 avril 2010]
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Un imbécile, c'est quelqu'un dont l'intelligence s'arrête à ce qu'il connaît.
Le grand danger de notre existence, qui plus est de la vie spirituelle, c’est la fixation, la clôture dans l’accompli. C’est de s’arrêter ou de croire être arrivé, de s’identifier à une situation donnée et à ses symptômes. La vie alors se gèle, le fleuve ne suit plus son cours.
La philosophie nous donne de demeurer dans une pensée qui ne cesse de comparer, d’analyser, de classer, de juger et de conclure. La philocalie nous donne de demeurer dans une conscience qui ne cesse de s’étonner, d’admirer et de remercier (ou de rendre grâces).
Le pèlerin ne sait pas toujours où il va, mais le chemin, lui, le sait.
Humanité et humilité sont deux mots qui proviennent de la même racine l’humus.
Philomène était une chèvre très impertinente, il lui arrivait de monter sur la table où nous prenions nos repas, et là elle récitait dans mon assiette le chapelet de ses crottes impeccables. La considération attentive de ces crottes éveilla en moi une extase qui me donne encore aujourd'hui à penser. Une crotte de chèvre, c'est presque parfait. La perfection dans un excrément... Si on s'attarde à contempler cela , on est pas loin du nirvana dans le samsara qu'ont contemplé les bouddhas, l'infini dans le fini, le sans-forme dans la forme qu'évoquent les mystiques rhénans.
Que reste-t-il quand il ne reste plus rien, qui suis-je avant ma naissance, qui suis-je après ma mort, qu'est-ce qui meurt quand je meurs, qu'est-ce qui naît quand je nais, qui passe, qui demeure ?
[...] La première naissance est absurde et on a le droit de maudire ses parents pour cela s'ils ne proposent rien d'autre. C'est ce que fit Job. La seconde naissance donne du sens à ce qui n'en a pas par nature. Si le Christ n'est pas ressuscité, "monté au ciel", c'est à dire éveillé au monde sans mort, à quoi bon vivre, à quoi bon aimer, se battre pour la vérité, la justice ? C'est la mort qui aura le dernier mot.
Mais si le Christ est ressuscité, cela veut dire qu'il y a quelque chose de plus fort que la bêtise, la violence et la décrépitude. Il n'est plus absurde d'aimer : "L'amour est plus fort que la mort".
Celui qui se laissait regarder par Jacques Maritain en revenait lavé comme par une fontaine et nettoyé comme par un gant de crin. Cela m'est arrivé plusieurs fois. Tant d'amour et si peu de complaisance !
Je me souviens d'une de ses paroles :
- Mon petit, aie le cœur chaud mais garde l'esprit froid. Aujourd'hui, la plupart des hommes ont le cœur froid et l'esprit chaud. Ils n'aiment pas, ils calculent; Ils ne pensent pas, ils se passionnent. Le cœur est fait pour aimer sans mesure, l'esprit est fait pour mesurer. Il ne s'agit pas d'avoir des idées bonnes ou généreuses, il s'agit d'avoir des idées justes. L'esprit nous a été donné pour discerner ce qui est et, à travers tout ce qui est, "l'Être qui est", et le cœur nous a été donné pour aimer ce qui est et, à travers ce qui est, "l'Être qui est".
Dans un ultime paragraphe, Philon tente de rassembler ce qu’il sait des Thérapeutes, ce qu’il en a retenu : « (Ils) s’adonnent à la contemplation de la nature et ils vivent l’âme unifiée (psuchèmonè) « (90).
Ce sont des contemplatifs, toutes leurs facultés sont ordonnées à « voir ce qui est » à l’intérieur comme à l’extérieur.
Avant d’être à transformer, le monde demande à être vu.
La perte de nos facultés contemplatives est liée à la perte du sens du Réel ; contempler la nature nous rappelle que la mission de l’homme n’est pas tant de faire, mais d’être, d’être avec et dans la nature, en relation avec « ce qui fait être ».
(page 114)
Voyager, c’est traverser les frontières extérieures et intérieures, en particulier celles du moi avec son paquet de mémoires (génétiques, sociales, éducatives, religieuses) qui nous conditionnent et nous limitent. C’est apprendre à respirer dans d’autres « climats ››, au sens non seulement météorologique, mais aussi corporel, culturel, spirituel.