Le drame de Demy, cinéaste, c'aura été sa douloureuse difficulté à faire se rencontrer son désir avec celui du spectateur. Il sait bien que le succès international des Parapluies de Cherbourg a reposé sur un malentendu, que le public en a aimé le bonheur de surface, le raffinement des couleurs, les mélodies faciles et qu'il est resté sourd à la cruauté profonde du sujet, à la désespérance paisible des amours trahies, des vies gâchées par un destin mauvais.
J'ai vraiment eu envie de laisser tomber le cinéma et de renouer avec la peinture après Une chambre en ville et, surtout après Parking. C'était une sorte de lassitude et de mauvaise humeur, de celles que l'on éprouve quand on a le sentiment que l'on ne vous aime plus.
(Jacques Demy, été 1985).
J'ai mis deux ans à faire un film de quatre ou cinq minutes qui était absolument cohérent. Il s'appelait Attaque nocturne et c'était l'histoire d'une dame qui, en rentrant du cinéma, se fait attaquer par un vilain monsieur qui lui dérobe son sac.
(1947-48, film d'animation en 9.5mm)
Il faut redire aussi, bien que cela ait été fait souvent déjà, de quelle façon obsessionnelle Demy inscrit ses personnages féminins dans la marge des conventions sociales, là où ils peuvent échapper à toute définition.
Les parapluies de Cherbourg "comédie en chanté" est aussi l'un des rares films français des années soixante où est évoqué le traumatisme de la guerre d'Algérie.