Jean-François Duval présente son roman "Un amour anglais", réédition en Zoé Poche de "L'Année où j'ai appris l'anglais" (Ramsay, 2006).
En librairie dès avril 2023.
RÉSUMÉ
Printemps 68. Les Beatles et les Stones font vibrer la planète. La contestation bouillonne à Paris. À Cambridge pour apprendre l'anglais, Chris, dix-huit ans, révolutionne sa propre vie. Il explore les dédales de la ville estudiantine, rencontre Harry le fragile colosse,
Simon L amateur de voitures anciennes, Mike le compositeur de protest songs. Et surtout Maybelene, brillante, élégante, irrésistible.
https://editionszoe.ch/livre/un-amour-anglais
Vidéo extraite d'un documentaire de Jean Marie Verneuil consacré à
Jean-François Duval en cours de tournage.
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Pourquoi ai-je relu Robinson Crusoé avec une vraie pointe d'intérêt ? Sans doute parce que notre situation ne diffère pas tellement de la sienne. La planète, pour cause de passions contradictoires au sein de l'espèce humaine, regorge de problèmes quasi insolubles et propres à l'engloutir; l'humanité a bien du mal à ne pas s'entredévorer ; et la globalisation réduit de plus en plus notre monde é la taille d'un îlot. Il ne nous reste qu'à faire le meilleur usage possible des débris de tout ce qui nous a fondés ci soutenus jusqu'ici, des restes d'un passé déconstruit et dise paru. Apprenons, comme Robinson, que nous avons bien de la chance d'être des naufragés. Ramassons les petites choses qui viennent journellement s'échouer sur la plage du présent.
Si l'on veut réenchanter le monde, ce ne pourra être que de façon minimaliste. Non pas par de grands récits (religieux, mythologiques, scientifiques) mais en tournant notre intérêt sur des éléments épars, débris des grands vaisseaux qui portaient autrefois notre pensée et nos croyances, choses infimes que notre regard peut s'attacher à féconder. Ce n'est qu'à la quatrième année de son naufrage, si je ne m'abuse, que Robinson se surprend tout à coup à siffloter. Sa modernité, elle est là, dans ce sifflotement qui fait de lui un grand, le plus superbe des minimalistes.
Brièvement dit : le tramp, c'est le voyage et le rêve ; le hobo, le voyage et le boulot ; le bum, le voyage et l'alcool. A condition de substituer la poésie à l'alcool, on pourrait dire que le personnage incarné par Charlie Chaplin dans ses films offre un mixte des trois.
(Préface de "Les Vagabonds du rail" de Jack London)
[...] quand je me replonge dans cette époque, je m'aperçois qu'il y a quantité de détails, de péripéties, de moments précieux qui ont disparus de ma mémoire, perdus à jamais; chaque fois que j'en prends conscience, j'en ai le cœur serré : nos vies, nous ne le savons pas assez, sont pleines de minuscules instants qui en ont fait tout le prix, qui le font sans doute toujours et qui pourraient le faire encore. Leur oubli définitif n'est même pas de l'oubli, c'est un anéantissement. Quand certains de ces moments engloutis, comme par miracle, reviennent en pleine lumière, c'est un éblouissement qui fait mal : on comprend que tout nous a échappé et que tout nous échappe sans cesse, on comprend qu'on est peut-être passé et que l'on continue de passer à côté de la vie et de soi-même.
Oui étonnante époque que la nôtre qui chaque soir devant nos téléviseurs nous refait le coup de la logique magique!
« J.-F. D. – Comment résolvez-vous cette contradiction : Jack écrivain farouchement optimiste, chantre de l’Amérique et de ses habitants, et, en même temps, d’un bouddhisme nihiliste, à la Schopenhauer ?
C. C. – Jack, c’était tout cela à la fois. Ses livres sont un poème à la gloire de l’Amérique, une célébration de la vie. Mais ils se doublent d’une interrogation constante : « Pourquoi naître si c’est pour mourir ? » Il était incapable de concilier ces deux positions : d’une part, tout n’est que mort et pourriture, vanité et illusion, et de l’autre, découverte et révélation du monde et de la vie, dans toute leur gloire et leur beauté. A cette même époque, Neal et moi, nous étions en pleine métaphysique chrétienne : tout faisait sens, la mort n’existait pas… » (Carolyn Cassady, p. 97)
"Il baisse les yeux. Elle a un battement de paupières - dont s'échappe la Beat Generation. tout entière. Dans ce battement, celle-ci germe, s'envole. Si Neal en est la Chair et le Verbe, Jack en composera les Écritures. À eux deux, LuAnne le pressent, Neal et Jack captureront le Temps, ils fixeront l'instant. Sur la Route. Et de cet Ancien et de ce Nouveau Testament, par un incessant et fécond va-et-vient, Kerouac fera une Bible dont elle sera l'Ève, nue sur la banquette arrière d'une Hudson poussiéreuse, allant d'ouest en est et d'est en ouest."