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Citation de genou


On devrait l’établir inspectrice générale des écoles primaires de la République Française ; mais je ne m’en tiens pas moins à ce que j’ai dit.
– Et Bernardin de St. Pierre ?
– Paul et Virginie n’ont point d’admirateurs plus ardents
que moi, ai-je répondu ; comme je connais leur soleil, leurs palmiers, leurs habitations, je vis avec eux, je me promène avec eux partout où je les rencontre : enfants, je les caresse ; adolescents, je les admire ; cependant je m’en tiens à ce que j’ai dit. Mais laissons-là les auteurs vivants et remontons plus haut. Aurions nous voulu vivre avec Jean Jacques ?
– Non, sans doute ! s’est écrié chacun.
– Avec Voltaire ?
– Pas davantage.
– Avec Duclos ?
– Oui.
– Avec Fénelon ?
– Oh oui !
– Avec Racine ?
– Oui.
– Avec La Fontaine ?
– Pourquoi non ?
Ici nous avons été interrompus. Vous pouvez, Monsieur l’Abbé, vous amuser à continuer ce scrutin. Je pense qu’en général j’aimerais mieux vivre avec un auteur qui ne le serait devenu que par nécessité ou par une impulsion irrésistible, qu’avec celui qui se serait mis à l’être de son plein gré et par choix, c’est-à-dire, par amour-propre. Mais peut-être qu’après tout, le meilleur n’en vaudrait rien, du moins sous le rapport dont il s’agit. Tous ces gens-là sont sujets, non seulement à préférer leur gloire à leurs amis, mais à ne voir dans leurs amis, dans la nature, dans les événements, que des récits, des tableaux, des réflexions à faire et à publier, et souvent ils méconnaissent les objets et permettent à leur esprit de les dénaturer, pour les mieux plier à l’usage qu’ils en veulent faire. Il ne s’agit pas, pour eux, de la chose, mais de l’effet. Un peintre, pour l’amour de son tableau, renverse une bonne maison et la change en une masure. Je doute que Rousseau ait jamais rien vu comme il était. Ceux qu’il voulait louer, ceux dont il voulait se plaindre, sont devenus à ses yeux ce qu’ils devaient être, pour que des portraits charmants ou hideux pussent porter leur nom.
Quant à Voltaire, il ne se donnait pas la peine de se tromper lui même, il lui suffisait d’en imposer aux autres. Il disait ce qu’il lui convenait de dire. Je pourrais porter mes exemples beaucoup plus loin, mais j’en ai dit assez pour vous mettre sur les voies, et vous faire partager avec moi l’amusement que ces examens et ces appréciations m’ont donné.
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